PROTOCOLES - Il n'est désormais plus nécessaire de faire confirmer par un test PCR le résultat positif d'un test antigénique. Une évolution qui interroge sur la fiabilité de la politique de dépistage, l'efficacité des deux dispositifs n'étant pas comparable.
"Compte tenu de la circulation virale intense, il n'est plus nécessaire de confirmer par PCR un résultat de test antigénique", indiquait en ce début d'année la Direction générale de la Santé (DGS) aux médecins et autres professionnels de santé. Une évolution des protocoles puisque, jusqu'à présent, la réalisation d'un test PCR faisait foi pour attester d'une contamination.
Les laboratoires, particulièrement sollicités en ce début d'année, sont ainsi censés pouvoir gérer plus facilement la multitude de tests réalisés quotidiennement, la réalisation d'antigéniques se montrant plus rapide et aisée, tout en demeurant moins coûteuse. Pour autant, leur efficacité interroge, par rapport aux PCR pris en référence. L'efficacité des campagnes de dépistage pourrait logiquement s'en trouver diminuée.
Des marges d'erreur supérieures avec les antigéniques
Sollicité par LCI, le président du Syndicat national des jeunes biologistes médicaux (SNJBM) rappelle que l'efficacité d'un test PCR est comprise "entre 90 et 95%". Une petite partie des personnes positives ne sont donc pas diagnostiquées comme telles à l'issue de leur prélèvement naso-pharyngé, note Lionel Barrand. "Si vous vous contaminez la veille en soirée, le lendemain votre test sera négatif." Pour autant, "la fenêtre de tir est très large : il suffit d'une dose infime de virus pour qu'on le retrouve". Cela tient à la technologie utilisée, ayant recours à une amplification moléculaire.
Un fonctionnement différent de celui des antigéniques, dont la "performance brute toute population comprise est de 65% de sensibilité". Sur dix personnes infectées, résume le spécialiste, "vous en aurez un tiers qui sera négatif". Pour autant, il faut préciser que cette efficacité à détecter une infection baisse chez les personnes positives dont la charge virale est faible. Pour les asymptomatiques par exemple, "la sensibilité chute à 44% en situation de vie réelle". Les résultats de travaux réalisés par le CHU de Berne, en Suisse. Notons par ailleurs que les résultats sont similaires quels que soient les variants, comme l'a récemment indiqué le virologue Didier Trono.
Bien que moins efficaces, les tests antigéniques présentent une série d'avantages. Leur coût inférieur aux PCR d'une part, mais également leur réalisation plus facile. Aujourd'hui, même si les autorités sanitaires définissent le PCR comme une référence (elles évoquent le "gold standard" parmi les outils diagnostiques), c'est avec une forme de pragmatismes qu'elles privilégient les antigéniques.
Un choix qui ne facilite pas forcément le quotidien des biologistes. "On est totalement débordés" à l'heure actuelle, reconnaît Lionel Barrand. Le président du Syndicat national des jeunes biologistes médicaux ajoute que ce constat est valable dans la France entière. "Entre le 31 décembre 2021 et le 6 janvier 2022, près de 9,5 millions de tests ont été réalisés dont 2,86 millions de tests PCR et 6,65 millions de tests antigéniques", glissait cette semaine la DGS. "Le volume de tests réalisés a ainsi cru de 25% par rapport à la semaine précédente."
Un "trou béant dans la raquette"
Outre la circulation intense du virus, qui entraîne un nombre massif de contaminations et génère de très nombreux cas contacts, on peut expliquer la hausse des volumes de tests par l'évolution des protocoles. "Les cas contacts sont dépistés à J0, à J2 et à J4 seulement, par un autotest à J4 notamment. Mais un autotest à J4, il est bien souvent négatif, car ça ne suffit pas pour être en charge virale très élevée chez beaucoup de gens", rappelle le dirigeant du SNJBM. "On n'a plus désormais le PCR qui faisait référence à J7 et qui faisait foi jusqu'à présent. Ce que je préconise, ce serait plutôt de remettre ce test PCR entre J5 et J7." Agacé, il peste contre le "trou béant dans la raquette" observé à l'heure actuelle.
En parallèle, il livre quelques pistes pour réduire la sollicitation des pharmacies et des laboratoires. "Des PCR à J5 pour déterminer si une personne contaminée est contagieuse ou non, ça n'a pas de sens. C'est plus utile de réserver ce test à une personne cas contact à J5." Et de déplorer au passage la réalisation d'antigéniques ou de PCR chez les enfants cas contacts. Obligatoires pour retourner à l'école, ils sont chronophages et globalement mal acceptés par les jeunes, insiste Lionel Barrand. D'où une perte de temps considérable au quotidien dans les laboratoires. Il préconise plutôt des autotests, moins invasifs et qui permettent d'éviter de solliciter les biologistes, en assumant une plus faible détection des cas chez ces publics peu à risque. Autant de manières de soulager le travail de détection du virus et de permettre une focalisation plus importante sur les cas contacts.
En résumé, on constate donc que juger suffisants les résultats de tests antigéniques contribue à réduire la qualité du dépistage, tout en ne réduisant que partiellement la charge de travail des professionnels en charge de l'analyse des résultats. Pour les biologistes, c'est une réflexion d'ampleur sur les protocoles qui est aujourd'hui demandée. Non seulement en raison de leur grande complexité, mais aussi en raison des tests jugés parfois peu utiles au regard des besoins actuels.
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