Covid : la fin du remboursement des tests "ne devrait pas empêcher de surveiller l'épidémie", estime un virologue

Propos recueillis par Aurélie Loek
Publié le 20 octobre 2021 à 13h23, mis à jour le 20 octobre 2021 à 13h40

Source : JT 20h WE

ENTRETIEN - À la suite de la fin du remboursement des tests individuels pour les personnes non vaccinées, les données de Santé publique France montrent une chute sur le premier jour de sa mise en place de 45% du nombre de tests. De quoi laisser craindre une baisse du suivi de la circulation du virus ? On fait le point avec un virologue.

Depuis le 15 octobre, premier jour de l'instauration du non-remboursement des tests pour les personnes n'ayant pas encore entamé leur schéma vaccinal, le nombre de dépistages a chuté.

Si cela devrait avoir des conséquences sur le taux de dépistage, le virologue Vincent Maréchal, interrogé par LCI, estime cependant que cette mesure ne devrait pas perturber le suivi épidémiologique. Il nous explique pourquoi. 

Quel va être l'impact de la fin du non-remboursement des tests Covid ? 

Le non-remboursement des tests va probablement faire un peu reculer la mesure du nombre de cas en France. En d'autres termes, le taux d’incidence qui nous sert de référence, tel qu’on le mesure et qui nous permet d'observer les reprises épidémiques, risque de baisser. Cela ne veut pas dire que l’indicateur va s’effondrer, il ne va pas perdre de sa valeur, mais il risque d’être un petit peu moins consolidé que ce qu’on imagine. 

Cependant, on a eu des périodes par le passé durant lesquelles les tests individuels ont été perturbés et cela ne nous a pas empêché de surveiller l'épidémie, malgré tout. Souvenez-vous, à Noël l'année dernière, tout le monde est allé se faire dépister. Cette affluence a forcément eu un impact sur le taux d’incidence. 

La question va être de savoir de quel ordre va être cette baisse de qualité du taux d'incidence. C'est difficile à anticiper, mais d'ici à la fin de la semaine, on va commencer à regarder les chiffres de Santé publique France. Si on voit que le taux de dépistage continue de baisser et de façon importante, il faudra faire plus attention à qui a été testé, si les cas positifs concernent surtout des personnes vaccinées ou pas.

Un suivi épidémiologique qui a un coût

Si cette baisse du taux de dépistage est effective, va-t-elle perturber le suivi épidémiologique en France ?

Cela ne m’inquiète pas à partir du moment où l'on a des moyens alternatifs ou complémentaires pour avoir un suivi. Ce qui m’inquiéterait, c’est d’avoir une baisse de vigilance au niveau des tests individuels. C'est-à-dire que si tous les indicateurs s’éteignent au même moment, le suivi sera effectivement compliqué. Pour le moment, on ne peut qu'attendre de voir quelle est l'ampleur de la réduction des tests. 

Mais de fait, ce nombre de tests doit diminuer pour des raisons budgétaires. Il faut quand même le dire, cela nous coûte excessivement cher. Et l’intérêt était au départ que les gens le fassent tôt pour qu’ils s’isolent tôt et qu'ils évitent de contaminer d'autres personnes. Or si vous interrogez autour de vous, vous ne verrez pas tant de données que ça disant que les gens s’isolent efficacement. Pour moi, il faut aussi regarder le rapport bénéfice-coût de l’opération. Si c’est juste pour faire de l’épidémiologie, ça coûte très cher. Entre 2020 et 2021, les tests individuels ont quand même coûté 6,2 milliards d’euros à l'Assurance maladie. 

Des moyens alternatifs pour suivre l'épidémie

Quelles sont donc les autres indicateurs que vous suivez pour étudier l'évolution de l'épidémie ? 

Sur les premières vagues, on avait des indicateurs individuels très indirects comme les coups de téléphone à SOS médecins, tout ce qui mobilisait les services d’urgence...  Cela a bien marché sur les premières vagues parce que correspondant à la symptomatologie des services d’urgence. Si on appelle SOS médecins, c'est que, forcément, on ne va pas bien. Avec le vaccin, ces indicateurs risquent de moins clignoter, ou en tout cas, tardivement.

Le suivi des eaux usées permet aussi de détecter des traces du virus. Il y a les marins pompiers de Marseille qui sont dans une analyse au sein des grandes villes, au niveau des collecteurs ; ce qui est intéressant pour observer des reprises épidémiques localisées sur un quartier par exemple.

Sinon, avec le réseau OBÉPINE, dont je fais partie, nous surveillons le virus dans 200 stations d’épuration. Ce qui représente plus de 33% de la population française. De quoi observer l'évolution du virus sur tout le territoire, en parallèle des tests individuels et du taux d'incidence. Ainsi, on commence à signaler, dans les taux d'incidence, une reprise de l'épidémie dans certains territoires. 

De la même façon on le voit aussi dans les stations dans les eaux usées. Toutes les stations étaient en décroissance très nette depuis le début de l’été. Et puis depuis la fin septembre, on voit certaines stations soit arrêter cette décroissance, soit se mettre sur un plateau, voire repartir à la hausse. Cela concerne aujourd'hui peut-être une vingtaine, une trentaine de sites, sur 200, traduisant le fait qu'on entre dans une saison plus froide qui favorise la circulation du virus.


Propos recueillis par Aurélie Loek

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