De plus en plus d'accros à la "to do list", et si c'était toxique ?

Publié le 12 juin 2020 à 12h24, mis à jour le 12 juin 2020 à 14h19

Source : JT 20h Semaine

PENSE-BÊTE - On en fait pour nos courses, pour les tâches à accomplir dans la journée ou pour ne rien oublier avant de partir en vacances. Des listes, nous sommes 56% à faire régulièrement, incapables de nous organiser sans noter, énumérer, cocher, barrer. Mais est-ce vraiment une bonne chose ?

Si vous avez peur d'oublier de faire votre déclaration, de payer le plombier ou d'offrir un cadeau d'anniversaire à votre belle-mère, c'est sans doute que vous n'avez pas fait de listes sur un bout de papier. Nous sommes des millions à utiliser ces pense-bêtes. Certains utilisent des carrés de papier fluo adhésifs, d'autres des alarmes sur leur téléphone portable. 

Pour comprendre ce phénomène, le mieux est encore de s'adresser à ceux qui en sont accros : Astrid Hamelin est l'une de ces aficionados. Elle a des listes pour tout : travail, vie personnelle, sans compter les notes prioritaires qui passent avant toutes les autres, et évidemment celles pour les enfants.... "J'ai quatre enfants, un mari, un boulot, je serais paumée sans mes listes", avoue-t-elle au 20h de TF1.

Le téléphone portable sert de disque dur à la place de notre cerveau, et là on contribue à la perte de concentration.
Docteur Vera

Première utilité de ces listes : elles nous aident tout simplement à nous organiser, mais elles sont aussi parfois synonymes de rêves et de projets. En témoigne le succès fou depuis deux ans du "bullet journal". Pas de traduction pour ce nouveau modèle d'organisation, c'est une sorte de journal intime sous forme... de listes. "C'est souvent accompagné d'objectifs. Ce n'est pas seulement des listes de courses, c'est aussi des listes de choses qu'on a envie d'acheter ou d'offrir, des listes de films qu'on a vus ou de livres qu'on a lus", explique Perrine Signoret. 

Cette journaliste a enquêté sur cette mode des listes et, selon elle, chez les jeunes entre 20 et 30 ans, ça vire à l'obsession, avec des listes par dizaine sur leur téléphone, voire des sites internet dédiés où ces derniers cochent les films à regarder ou les livres à lire dans l'année. "Faire ces listes a permis à certains de combattre leur anxiété, leur flemme ou leur procrastination. A l'inverse, il y a des personnes qui se sont rendues compte qu'elles étaient un peu excessives, et qu'il fallait peut-être qu'elles relâchent un peu la pression sur elles-mêmes", dit-elle.

C'est en effet la dérive qu'a constaté le docteur Louis Vera, psychiatre à Paris, qui voit arriver de plus en plus souvent dans son cabinet des adolescents accros aux listes en tout genre : "Ne faites pas de to-do list pour tout et rien", alerte ce médecin, expliquant que "faire une to-do list sur un téléphone portable est ce qu'il y a de pire". "On est en train d'externaliser notre mémoire", prévient-il. "C'est-à-dire que le téléphone portable sert de disque dur à la place de notre cerveau, et là on contribue à la perte de concentration".

Les applications plébiscitées

Un phénomène qui a pris de l'ampleur avec l'arrivée des applications. Rohid Jetha, entrepreneur à Paris, est un mordu de ces plate-formes. Il utilise l'application todoist qu'il a connectée à trois de ses écrans, mais également sur sa montre, et l'ouvre chaque matin pour voir comment sa journée va se passer.  "J'ai juste à regarder l'heure et cela me dit ce que j'ai à faire à 14 heures", avance-t-il, amusée. Des listes et des tâches qu'il peut partager avec son associé. "C'est compliqué d'oublier des choses avec 'todoist', car à chaque fois il me fait des rappels". 

Comme lui, un demi-million de Français utilisent cette application, de quoi donner des sueurs froides à l'un des autres acteurs du marché : la fameuse note adhésive, qui pourrait tout de même avoir un avantage de taille sur ses concurrents car, comme le souligne Virginie Remaud, directrice marketing de Post-it, on mémorise mieux ce qu'on a à faire quand on écrit ses listes à la main. "Des études montrent en effet que lorsqu'on écrit sur une note Post-it, on a 42% de chances que les choses s'accomplissent", rappelle-t-elle.

Et pour lutter contre la concurrence du numérique, la marque innove, avec une note Post-it "Extreme", résistante à l'humidité, à la chaleur ou au froid. Une stratégie payante, puisque les ventes ont augmenté de 4% l'an dernier. Le petit carré coloré, utilisé en France par 9 millions de personnes chaque jour, a donc encore de beaux jours devant lui. 


La rédaction de TF1info

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