Le centre hospitalier, que dirige le professeur Didier Raoult, est épinglé pour de nombreux manquements par l'Inspection générale des affaires sociales.Elle fustige le recours à des traitements contre le Covid-19 dont l'efficacité n'a pas été prouvée, des recherches déformées et une direction autoritaire.
Tant sur le plan des traitements proposés, des publications scientifiques ou encore sur celui du fonctionnement interne de l'établissement, les dérives sont nombreuses à l'institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille, dirigé de longue date par Didier Raoult. C'est la sévère conclusion dressée par un rapport réalisé par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), qui dépend de plusieurs ministères dont celui de la Santé.
Relayé mercredi par le journal La Provence, ce nouveau document, auquel l'AFP n'a pas eu accès, couvre un champ plus large qu'un précédent rapport, déjà cinglant, publié quelques semaines plus tôt par l'agence du médicament (ANSM).
"Logique de soumission"
Les patients soignés à l'IHU se voient notamment donner "des prescriptions qui ne respectent pas le code de la santé publique, ce qui est de nature à relever d'une qualification pénale", selon un extrait de ce rapport cité par le journal local. Ces prescriptions comprennent notamment un traitement anti-Covid à base d'hydroxychloroquine. Malgré l'inefficacité de ce médicament contre le Covid, Didier Raoult s'en est fait le promoteur depuis le début de la pandémie, se taillant ainsi une importante célébrité médiatique, mais s'attirant aussi de nombreuses critiques de la communauté scientifique et même des sanctions.
Selon La Provence, le rapport de l'Igas conclut que les médecins de l'IHU ont été sous pression de leur direction pour prescrire ce traitement, ainsi que de l'ivermectine, un autre médicament dont les bénéfices anti-Covid n'ont jamais été avérés.
Sur le plan scientifique, le rapport dénonce aussi de mauvaises pratiques en matière de recherche : les équipes de l'IHU publient certes beaucoup, mais dans des revues de qualité médiocre. Ces recherches seraient souvent menées de manière biaisée, là encore sous la pression de la direction. De jeunes chercheurs en viennent à "édulcorer volontairement les résultats et les données ou supprimer des choses qui ne marchent pas, pour ne pas subir de pression", selon un extrait du rapport.
Celui-ci évoque, plus largement, un fonctionnement très autoritaire de la direction du professeur Raoult, qui a mis en place une "logique de soumission". Sur 300 employés interrogés, une cinquantaine ont ainsi fait part "d'une situation allant du malaise à une forte souffrance liée à leur activité professionnelle". Cette fuite intervient alors que ce rapport doit encore être finalisé avec, notamment, les réponses de l'IHU de Marseille. Elle a, en outre, lieu une semaine avant une réunion du conseil d'administration pour donner un successeur à son actuel directeur.
Un comité scientifique a recommandé le nom de Pierre-Edouard Fournier, chercheur déjà intégré depuis longtemps à l'IHU, mais ce choix a été critiqué, en interne comme en externe, comme ne marquant pas une rupture suffisante.