L’arrêt du tabagisme avant la grossesse quand même nocif pour la femme et le futur bébé ?

C.A.
Publié le 7 octobre 2020 à 6h00
L’arrêt du tabagisme avant la grossesse quand même nocif pour la femme et le futur bébé ?

Source : iStock

BON A SAVOIR - En France, 17% des femmes continent de fumer alors qu'elles portent leur bébé. L'arrêt du tabagisme en vue d'une grossesse est pourtant crucial pour la bonne santé de l'enfant. Mais selon les travaux de chercheurs français, il faudrait que cet arrêt se fasse bien longtemps avant la conception de l'enfant.

Lâcher la cigarette pour porter son enfant. En France, 17% des femmes n'y parviennent pas, soit l'un des plus mauvais scores en Europe. L'arrêt du tabagisme avant de tomber enceinte est pourtant reconnu pour diminuer considérablement les risques pour la santé de la mère et l’enfant. 

Mais selon une étude de l'Inserm, du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes, il ne suffirait pas, pour se prémunir de tout risque, de s'arrêter juste avant. Ces travaux, publiés dans BMC Medicine, montrent que la consommation de tabac, même lorsqu’elle est stoppée trois mois avant la grossesse, peut avoir des conséquences sur le placenta. Vulnérable à de nombreux composés chimiques, celui-ci joue néanmoins un rôle crucial dans le développement du foetus.

Lire aussi

568 échantillons de placentas analysés

Les chercheurs français ont étudié l'ADN d’échantillons de placenta prélevés au moment de l'accouchement chez 568 femmes pour mieux comprendre l’impact chez la femme enceinte de la consommation de tabac dans les trois mois précédant la grossesse et/ou pendant la grossesse. Ils cherchaient plus précisément à savoir si cela pouvait entraîner des variations dans la méthylation de l'ADN placentaire, soit dans les modifications naturelles dans l’activité des gènes.

Les participantes à l'étude étaient réparties en trois catégories : les non-fumeuses (n’ayant pas fumé depuis les trois mois précédant la grossesse ni pendant la grossesse), les anciennes fumeuses (arrêt de la consommation dans les trois mois précédant la grossesse) et les fumeuses (consommation dans les trois mois précédant la grossesse et pendant toute la durée de la grossesse). 381 d'entre elles étaient non-fumeuses, 117 avaient fumé au moins une cigarette par jour pendant leur grossesse et 70 étaient d'anciennes fumeuses.

Les gènes capables de garder en mémoire une exposition antérieure au tabac ?

Les observations de ces échantillons ont permis de se rendre compte que, chez les fumeuses, 178 régions du génome placentaire, soit l'ensemble du matériel génétique placentaire, présentaient des altérations de la méthylation de l’ADN. Chez les anciennes fumeuses, les chercheurs ont identifié 26 de ces 178 régions dont la méthylation de l’ADN étaient encore altérées.

Ces régions correspondent pour la plupart à des zones capables de contrôler à distance l’activation ou la répression de gènes. Une partie d’entre elles est située sur des gènes connus pour avoir un rôle important dans le développement du fœtus. "Si un grand nombre de régions semblent avoir un profil de méthylation normal chez les femmes après arrêt du tabac, la présence de certaines modifications de méthylation de l’ADN dans le placenta de femmes ayant arrêté de fumer avant la grossesse suggère l’existence d’une mémoire épigénétique de l’exposition au tabac", indique la chercheuse Inserm Johanna Lepeule, qui a dirigé ces travaux. Même après l'arrêt du tabac, les gènes pourraient donc garder en mémoire les effets de ce dernier.

D'autres travaux doivent par la suite déterminer si ces altérations impactent des mécanismes impliqués dans le développement du fœtus et si elles peuvent avoir des conséquences sur la santé de l’enfant.


C.A.

Tout
TF1 Info