Le mouvement contre la réforme des retraites est notamment marqué par une grève des éboueurs.Ainsi, à Paris, malgré les réquisitions, plus de 7000 tonnes de déchets s'entassent toujours dans les rues.On a demandé à un pneumologue si cette situation pouvait avoir des conséquences sur la santé des riverains.
Les éboueurs vont-ils prolonger leur mouvement ? Au 22ᵉ jour de grève, la situation s'améliore légèrement en région avec la reprise progressive du travail à Marseille. "Le ramassage des poubelles va reprendre dans tous les quartiers", a annoncé ce lundi 27 mars Patrick Ayache, secrétaire général adjoint FO Territoriaux. Mais elle reste très perturbée à Nantes, Angers, Poitiers, Guingamp et au Havre, où les éboueurs poursuivent leur grève jusqu'à vendredi.
Tandis qu'à Paris, même si le volume des déchets accumulés dans les rues est repassé sous le seuil symbolique des 10.000 tonnes ce week-end grâce à la réouverture des incinérateurs et aux réquisitions, il reste encore plus de 7000 tonnes en souffrance. Le retour à la normale n'est donc pas pour tout de suite. D'autant que ce lundi matin, des éboueurs, des syndicalistes, des étudiants et des cheminots bloquaient l'incinérateur de déchets d'Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) en signe d'opposition à la réquisition par la police. Des manifestants se sont également rendus devant celui d'Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine).
Aux revendications sociales s’ajoutent, en marge, de nombreux heurts : à Paris, jeudi soir, des dizaines de poubelles avaient été incendiées dans des rues étroites du quartier de l'Opéra, pouvant laisser présager des conséquences sur la santé des riverains. Pour le savoir, on a interrogé le docteur Frédéric Le Guillou, pneumologue dans le Var et président de l’association Santé respiratoire France.
Ces déchets alimentaires peuvent dégager un certain nombre de bactéries, de moisissures, de champignons qui peuvent être inhalés
Docteur Frédéric Le Guillou, pneumologue
L’accumulation de poubelles à l’air libre est-elle dangereuse à terme pour la santé ?
Au 19ᵉ siècle, l'invention de la poubelle et la mise en place du tout-à-l'égout ont été deux grands progrès dans la médecine hygiéniste. Ce n'est pas pour rien. Ces déchets alimentaires qui se décomposent peuvent en effet dégager un certain nombre de bactéries, de moisissures, de champignons qui peuvent être inhalés et donc tous ces germes peuvent être responsables d'un certain nombre de pathologies respiratoires. Notamment chez ceux qui ont déjà une maladie respiratoire sous-jacente comme l'asthme, la bronchite chronique, un cancer... Ça peut favoriser une complication, voire aggraver la maladie sous-jacente. On le voit aussi chez les enfants. À condition évidemment d'être à côté de ces déchets.
Mais le riverain qui passe devant tous les jours, au vu du nombre de sacs éventrés, n'est pas à l'abri à force de respirer trop souvent ces émanations toxiques. On ne peut pas l'exclure parce qu'il y a une concentration beaucoup plus importante. Sans parler de l'eau de pluie qui peut être contaminée au contact de ces déchets et l'urine des rats (responsable de la leptospirose), le tout ruisselant dans les égouts. Ce serait intéressant de savoir quelle est la qualité de l'eau de Paris en ce moment. La mairie a-t-elle intensifié son traitement des eaux usées ? La question se pose, car c'est tout un écosystème qui est concerné.
Comment se prémunir de ces facteurs de pollution ?
Pour les personnes les plus fragiles, quand il y a une forte concentration de déchets, le plus simple est de porter un masque chirurgical parce que ça permet de filtrer quasiment 70% des substances. Par ailleurs, si vous avez des poubelles sous vos fenêtres, notamment pour ceux habitant au rez-de-chaussée ou au premier étage, il est conseillé de ne pas trop les ouvrir en ce moment. Ensuite, plus on est élevé dans les étages, moins le risque est important.
Principale problématique : les dioxines
Et que dire des conséquences des feux de poubelles sur la santé des riverains ?
Des fumées toxiques peuvent en effet s'en dégager. Et la principale problématique en fait, ce sont les dioxines, un groupe de polluants organiques très toxiques, présent dans les plastiques. Des nanoparticules peuvent se détacher dans l'air que l'on respire. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que certains riverains s'opposent à la présence d'incinérateurs d'ordures ménagères dans leur quartier.
Bien sûr, là encore, tout dépend de la concentration à laquelle on est soumis. Si elle est très forte, cela va être irritant pour la peau. Des boutons ou de l'acné peuvent apparaître. Ces toxines peuvent également être inhalées, mais passer aussi par les yeux, la bouche. Cela va se stocker dans la graisse et rester très longtemps dans l'organisme. Suivant l'intensité de l'exposition, on peut par la suite développer des maladies parce que ce sont des perturbateurs endocriniens. Donc attention aux femmes enceintes et aux enfants. On trouve aussi bon nombre d'autres composants toxiques dans ces fumées qui peuvent ensuite passer dans le sang. Cela peut aggraver toutes sortes de pathologies respiratoires ou cardiaques sous-jacentes.
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