Syphilis et femmes enceintes : l’appel à la vigilance lancé au Québec vaut-il pour la France ?

par Charlotte ANGLADE
Publié le 7 février 2019 à 18h13
Syphilis et femmes enceintes : l’appel à la vigilance lancé au Québec vaut-il pour la France ?
Source : iStock

IST - Au Québec, la recrudescence des cas de syphilis chez les femmes enceintes inquiète les médecins. Cette infection sexuellement transmissible peut en effet s'avérer très grave pour le bébé à naître. Mais qu'en est-il en France ? Nous avons posé la question à Isabelle Derrendinger, secrétaire générale du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes.

La semaine dernière, le Collège des médecins du Québec appelait les médecins à redoubler de vigilance quant au dépistage de la syphilis, et davantage encore lors d’un suivi de grossesse. Cette infection sexuellement transmissible en recrudescence peut en effet avoir de graves conséquences, non seulement pour les femmes, mais aussi pour les bébés. Or entre 2014 et 2017, environ 25 % des cas déclarés de syphilis au Québec ont été diagnostiqués chez des femmes enceintes, rapporte Radio Canada.

En France, la syphilis gagne aussi du terrain depuis plusieurs années. Alors qu’elle avait quasiment disparu à la fin des années 90, elle infecte désormais chaque année plus de 1000 personnes selon Santé Publique France. Nous avons donc demandé à Isabelle Derrendinger, secrétaire générale du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes et directrice de l’école universitaire des sages-femmes de Nantes, si cette augmentation des cas était inquiétante pour les enfants à naître.

Des cas rares, mais graves

"La prévalence de séropositivité à la syphilis au cours de la grossesse est de 0,02 à 4,5 % en Europe", nous indique-t-elle. Bien moins que ce qui est observé au Québec. Et cela notamment grâce au dépistage systématique de la maladie par prise de sang au début de la grossesse.

Pour autant, ces rares cas peuvent avoir des effets dévastateurs sur le nouveau-né. Non traitée lors du premier trimestre de grossesse, la maladie entraîne un risque de mortalité périnatale estimé à environ 40 %. À la naissance, un enfant atteint de syphilis congénitale peut présenter des séquelles neurologiques, osseuses... "Ça peut atteindre tous les organes, en fait", note la directrice de l'école des sages-femmes de Nantes. Les premiers symptômes se caractérisent par un écoulement nasal riche en Treponema pallidum, la bactérie à l'origine de la syphilis, ce qui facilite un diagnostic rapide. Cet écoulement survient environ une à deux semaines avant une éruption cutanée. Une hépatosplénomégalie (augmentation du volume du foie) et une jaunisse peuvent également se déclarer.

L'infection à chlamydiae, une menace bien plus présente pour les femmes

Si les cas de syphilis congénitale, en France, sont rares, "cela ne doit surtout pas faire oublier un certain nombre d'IST comme le chlamydiae, qui évolue vraiment à bas bruit mais qui a un retentissement important sur la fertilité", insiste Isabelle Derrendinger. "Les bactéries se logent dans le col de l'utérus puis migrent vers les trompes de fallope, ce qui entraîne un processus inflammatoire" explique-t-elle.

L'infection étant indolore, la femme ne ressent aucun signe alarmant qui pourrait la pousser à consulter. Or, sans traitement antibiotique, l'inflammation peut conduire à l'obturation des trompes. L'ovocyte émis par les ovaires reste donc coincé et ne rencontre jamais de spermatozoïde. "Quand un chlamydiae est diagnostiqué, une femme sur dix peut potentiellement être stérile", indique la secrétaire générale du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes. En 2016, 267.000 infections à chlamydiae ont été diagnostiquées. Soit trois fois plus qu'en 2012.

"En dehors de tout désir de grossesse, il faut penser à utiliser le préservatif", martèle la professionnelle. "C'est le meilleur mode de protection contre les IST."


Charlotte ANGLADE

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