L'OMS a-t-elle vraiment déclaré qu'aucune deuxième vague n'était en cours ?

Publié le 2 novembre 2020 à 17h01
Des propos tenus par une responsable locale de l'OMS ont été sortis de leur contexte.

Des propos tenus par une responsable locale de l'OMS ont été sortis de leur contexte.

Source : CHRISTOPHER BLACK / WORLD HEALTH ORGANIZATION / AFP

HORS CONTEXTE - Les propos d'une responsable de l'OMS ont été sortis de leur contexte et détournés par une série de sites à travers l'Europe. Sa prise de position, datant de la mi-octobre, est présentée de manière réductrice.

L'épidémie de Covid-19 est-elle en train de connaître une nouvelle accélération, après la flambée des cas observée au printemps ? Des internautes en doutent et n'hésitent pas à partager les éléments susceptibles d'accréditer la thèse d'un emballement démesuré des autorités. Dernier exemple en date ? Des déclarations d'une directrice régionale de l’OMS, selon qui "aucune seconde vague n’est en cours". 

Sur Facebook, un article du site pro-russe Sputnik News daté du 13 octobre est relayé en masse, sans forcément que les lecteurs ne prennent la peine de le parcourir en détail. Dans les commentaires, l'on en conclut rapidement que les récentes mesures du gouvernement sont incohérentes. "Pourquoi confiner alors ????", peut-on notamment lire. Un étonnement qui n'est pas propre aux internautes français puisque des messages similaires ont été massivement relayés ces dernières semaines en Allemagne et en Autriche, comptant plusieurs milliers de partages.

Une phrase extraite sans contexte

Cette phrase est-elle authentique ? Oui, mais elle est totalement sortie de son contexte. Tout d'abord, il faut préciser qu'il ne s'agit pas d'une prise de position de l'OMS elle-même (via un communiqué ou lors d'une conférence de presse par exemple), mais d'une déclaration effectuée par la directrice pour les situations d’urgence régionales sur la zone Europe, l'Israélienne Dorit Nitzan.

Elle est intervenue lors d'une conférence organisée le 13 octobre en Russie, à l'initiative de plusieurs structures parmi lesquelles le ministre russe de la Santé. En visio-conférence, elle s'est appuyée sur une série de graphiques pour analyser la progression de l'épidémie. Et a déclaré que ceux-ci montrent "qu'il n'y a pas de deuxième vague". Indiquant que "le virus est parmi nous et le virus restera parmi nous jusqu'à ce que nous trouvions une solution". 

Le site allemand Correctiv souligne que dans les graphiques utilisés par la représentante de l'OMS, on observe une hétérogénéité des situations, avec des résurgences plus ou moins fortes, et une efficacité des mesures de contrôle de l'épidémie très variable en fonction des territoires. L'OMS, sollicitée par nos confrères outre-Rhin, a précisé les propos de Dorit Nitzan : "Elle a déclaré que la pandémie avait progressé différemment dans différents pays et que sur aucun des graphiques présentés elle n'avait complètement disparu avant sa résurgence. En tant que telle, cette pandémie est une grande vague avec des résurgences et des réductions de cas en fonction des mesures que les pays et les individus adoptent."

Et d'ajouter que "dans cette situation, nous devons tous apprendre à vivre avec ce virus et ce faisant, essayer de trouver un moyen de garder nos sociétés aussi ouvertes que possible tout en brisant les chaînes de transmission le plus tôt possible". Notons que si ces propos, à la lumière de la situation actuelle et des mesures de reconfinement décidées dans plusieurs pays européens, peuvent sembler un brin décalés, la situation a évolué très rapidement. Depuis le 13 octobre, date de cette intervention, la flambée des cas s'est confirmée, les autorités de santé alertant sur l'afflux massif de patients atteints du Covid-19.

Conclure que l'OMS nie l'existence d'une seconde vague est donc clairement abusif. Si une responsable de l'organisation a estimé qu'il n'en apparaissait pas de nette deuxième vague à grande échelle et que des différences étaient marquées d'un pays à l'autre, il s'agissait de propos tenus il y a près de trois semaines et sortis de leur contexte. Il ne s'agissait par ailleurs en aucun cas de nier l'ampleur de l'épidémie, mais plutôt de s'interroger sur le fait qu'elle revienne alors qu'elle n'a jamais véritablement disparu. Depuis ces déclarations, la résurgence de l'épidémie s'est confirmée et accrue dans une série de pays parmi lesquels la France, ce qui fait même craindre une possible "3e vague" dans le futur à certains experts.

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Thomas DESZPOT

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