L'étude du jour : le Champix est efficace pour arrêter de fumer, mais...

Daphnée Leportois
Publié le 18 février 2015 à 13h03, mis à jour le 28 septembre 2018 à 9h42
L'étude du jour : le Champix est efficace pour arrêter de fumer, mais...

TABAC – Une étude souligne qu'une molécule, la varénicline, est trois fois plus efficace qu'un placebo pour arrêter de fumer en six mois, tout en étant sans danger pour la santé. Mais en décortiquant ces recherches, on s'aperçoit que c'est un peu plus compliqué.

Vous êtes 16 millions à fumer en France . Sachant qu'un peu plus de la moitié des fumeurs réguliers (58%) déclarent avoir envie d'arrêter de fumer, apprendre qu'il existe un médicament permettant de réduire sa consommation de cigarettes puis d'en finir avec le tabagisme semble capital. Une étude publiée dans The Journal of the American Medical Association (JAMA) souligne en effet l'efficacité d'une molécule, la varénicline , pour cesser progressivement de fumer. Sauf qu'il ne faudrait pas croire que ce médicament est la panacée.

La varénicline n'est pas une nouvelle molécule. En France, le médicament est commercialisé sous le nom de Champix . Or, et cela met la puce à l'oreille, il a été développé par les laboratoires Pfizer, qui ont financé l'étude parue dans le JAMA.

Conseils pour aider à arrêter de fumer

Déjà, les résultats observés ne sont pas imputables au seul médicament. Les participants à l'étude ont été accompagnés dans leur démarche de réduction puis d'arrêt du tabac. Ils ont ainsi reçu du "counseling" (comprenez "un programme de conseil") et un soutien téléphonique. Par exemple, ils ont reçu la brochure " Clearing the Air : Quit Smoking Today " (Changez d'air : arrêtez de fumer aujourd'hui) du National Cancer Institute. Des techniques de réduction du nombre de cigarettes fumées leur ont aussi été fournies, comme celle d'augmenter le temps entre chaque cigarette pour éviter de les enchaîner. Or cet accompagnement, en France, fait partie des traitements recommandés en première intention pour arrêter de fumer.

Efficacité par rapport au placebo, mais pas les substituts nicotiniques

Reste que, dans l'étude, la molécule semble plus efficace que le placebo. Ainsi, 37,8% des participants sous varénicline avaient cessé de fumer au bout de six mois, contre 12,5% dans le groupe test, auquel était donné un placebo. Au bout d'un an, 27% des individus ayant pris des comprimés de varénicline pendant six mois avaient arrêté de fumer, contre 9,9% pour les autres.

Sauf que cette efficacité par rapport au placebo n'est pas une découverte : la Haute Autorité de santé (HAS) soulignait ainsi en octobre 2014 que " la varénicline est supérieure au placebo pour l'arrêt de la consommation de tabac à six mois ". En nuançant son propos : "La varénicline n'a pas montré de supériorité par rapport aux TNS (NDLR : traitements nicotiniques de substitution) et notamment aux patchs nicotiniques, ni à une combinaison de TNS." Encore faut-il comparer ce qui est comparable...

Attention aux effets secondaires

C'est pour cela qu'en France la prescription du Champix n'est recommandée qu'"en seconde intention, après échec des TNS". Car il a des effets indésirables conséquents, "notamment des symptômes neuro-psychiatriques : dépression et comportements suicidaires/auto-agressifs, changements comportementaux, hostilité, agitation". Le rapport efficacité/effets indésirables du Champix est donc "moyen".

Dans l'étude en question, pourtant, seuls 3,7% du groupe sous varénicline ont reporté des effets indésirables graves, contre 2,2% dans le groupe de référence, sous placebo. Pire : les chercheurs soulignent que, pendant le traitement et dans les trente jours suivant la dernière prise, des idées et comportements suicidaires ont été notés chez 0,8% des participants du groupe varénicline et 1,3% de ceux sous placebo, laissant entendre que ces pensées suicidaires seraient le lot de quelques fumeurs en passe de devenir non-fumeurs.

Sauf qu'ont été préalablement exclus de l'étude tous les fumeurs qui avaient eu des comportements suicidaires dans les deux années précédant le début de l'étude, de même que tous les individus qui présentaient des troubles dépressifs ou d'anxiété importants. Les chercheurs eux-mêmes écrivent que ce biais empêche de généraliser leurs résultats à une population plus représentative de fumeurs. Alors, quand l'un d'eux souligne que la varénicline est "une approche efficace et sûre pour accroître le nombre de personnes qui arrêtent durablement de fumer", difficile de le croire sur parole.

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Daphnée Leportois

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