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Oui, la France connaît bien "l'un des confinements les plus durs d'Europe"

Publié le 16 novembre 2020 à 18h29, mis à jour le 19 novembre 2020 à 23h27
JT Perso

Source : TF1 Info

ÉPIDÉMIE - Fustigeant la politique sanitaire du gouvernement et son confinement "à deux vitesses", le vice-président du RN, Jordan Bardella, a affirmé ce lundi sur LCI que la France vivait l'un des confinements les plus durs d'Europe. Ce qui est vrai.

Le gouvernement est jugé quand il n'en a pas fait assez. Et montré du doigt quand il en fait trop. Invité politique de la matinale de LCI ce lundi 16 novembre, Jordan Bardella a vilipendé ce deuxième confinement. Se faisant le porte-voix des Français, le vice-président du  Rassemblement national a estimé que ces derniers "ne supportent plus ce confinement à deux vitesses, à géométrie variable". Principal argument, celui d'un pays qui en fait plus que ses voisins. Une allégation véridique mais à contextualiser. 

Plusieurs voisins ne sont pas confinés

Si certains accusent ce confinement d'être trop "light", il est en fait très strict. Il se distingue tout d'abord de ces pays qui se sont arrêtés à la mise en place d'un couvre-feu similaire à celui que nous avons connu en France en octobre. C'est le cas du Portugal. Dans plus d'une centaine de municipalités, qui rassemblent environs 70% de la population, il est interdit de sortir après 23h en semaine, et dès 13h le week-end. Idem chez sa voisine, l'Espagne, à l'exception des îles Canaries. 

Dans d'autres pays voisins, on préfère des mesures localisées. En Italie, le pays a choisi la stratégie des "zones d'alerte", mettant près de la moitié de sa population en "zone rouge". L'Allemagne ou la Suisse ont quant à elles une politique, par essence, plus locale. Si le premier fait figure de modèle, le deuxième est critiqué pour ses décisions. Certains jugent en effet que le Conseil fédéral se montre trop timide. Seuls quelques cantons ont, pour le moment, décidé de fermetures de restaurants, de commerces et de confinement partiel. Ceci dit, un "petit confinement" serait envisagé au niveau fédéral, selon la presse locale

Ce "reconfinement localisé", c'était la formule préconisée par le gouvernement français à l'heure où l'épidémie reprenait rapidement. Rappelez-vous, l'exécutif écartait alors de mettre le pays sous cloche. Depuis, les choses ont changé. Les commerces non essentiels ont fermé à quelques semaines de Noël. Les promeneurs sont condamnés à se balader à un kilomètre à la ronde et les restaurants n'ont toujours pas relevé le rideau. La population qui le peut continue tout de même à aller travailler et à amener ses enfants à l'école. 

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Des restrictions qui font de ce confinement "le plus dur en Europe" selon le député d'extrême droite Jordan Bardella, qui s'est repris sur notre antenne en précisant "l'un des plus durs". De fait, la France est bien sur le podium européen, selon "l'indice de sévérité de la réponse gouvernementale". C'est un indicateur mis en place par six chercheurs pour comprendre quelles politiques peuvent être efficaces afin d'endiguer l'épidémie. Il se base sur neuf indicateurs. À savoir : les fermetures d'écoles, les fermetures de lieux de travail, l'annulation d'événements publics, les restrictions sur les rassemblements publics, les fermetures de transports publics, les obligations de rester à la maison, les campagnes d'information du public, les restrictions aux mouvements dans le pays et enfin les voyages internationaux. Les données et recherches de cette équipe de l'Université d'Oxford sont disponibles sur le site "Our World in Data". 

L'indice de sévérité de la réponse gouvernementale, arrêté au 15 novembre 2020, en Europe
L'indice de sévérité de la réponse gouvernementale, arrêté au 15 novembre 2020, en Europe - Our World in Data

On y observe que, alors que certains pays, dont l'Italie ou la Croatie, avaient atteint un indice situé entre 90 et 100 lors de la première vague épidémique, toute l'Europe connait cet automne un confinement plus léger. Désormais, selon les données des chercheurs arrêtées au 15 novembre, le pays le plus rigoureux est l'Irlande, avec un indice qui atteint 81. C'est lui qui a été le premier du continent à se reconfiner le 22 octobre dernier, pour six semaines, tout en gardant les écoles ouvertes. On trouve ensuite, entre 70 et 80, une dizaine de pays, comme le montre la carte ci-dessus, dont la France. Elle est à la tête de ce peloton, juste devant le Royaume-Uni.

Pas de fermeture d'école, mais une attestation

À noter que ce qui fait de l'Hexagone le deuxième pays le plus contraignant, selon cet indicateur, n'est pas la fermeture de certains commerces. La France, comme la Belgique et les Pays-Bas, fait en fait partie de ces rares pays à pousser les entreprises vers plus de télétravail. C'est également l'un des seuls pays à avoir rendu le masque obligatoire dans tous lieux publics et à l'extérieur. Cependant, l'exécutif a décidé d'être moins restrictif que d'autres en matière d'éducation. Seules les universités n'ont pas été autorisées à reprendre. 

Ce qui n'est pas le cas en Autriche, entre autres exemples. Alors que le pays avait été relativement épargné au printemps dernier, le nombre moyen de contaminations quotidiennes y a explosé. Il se situait samedi à 831 par million d'habitants sur les sept derniers jours, selon Our World in Data, ce qui le place en tête dans le monde devant la Suisse ou la République tchèque. Samedi, le chancelier a donc annoncé un renforcement des mesures au moins jusqu'au 6 décembre. Les traditionnelles fermetures de bars, restaurants et commerces se sont accompagnées de celle des écoles. Tous les niveaux ont désormais cours à distance. Le chancelier, Sebastian Kurz, est actuellement vivement critiqué pour avoir tardé à prendre des mesures plus radicales cet automne lorsque l'épidémie a recommencé à flamber. La fermeture des établissements scolaires est, elle aussi, très mal vue.

Reste que  ce que fustige le plus l'eurodéputé ne sont pas les consignes sanitaires et leur impact sur la propagation du coronavirus. Lui critique ce "grand voyage en Absurdistan" qu'aurait fait le gouvernement. L'élu reprend ainsi le terme utilisé par le quotidien allemand Die Zeit. Dans cet article, la correspondante en France critique essentiellement les injonctions paradoxales du gouvernement. Et la sacro-sainte attestation de sortie. Des consignes si incompréhensibles qu'elles auraient malheureusement fait tomber "les règles sensées en discrédit".

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Felicia SIDERIS

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