Où, combien, à quelle fin ? La complexité du transfert de patients à l'heure de la 2e vague

Publié le 4 novembre 2020 à 18h43, mis à jour le 5 novembre 2020 à 14h56
PASCAL GUYOT / AFP
PASCAL GUYOT / AFP - Source : PASCAL GUYOT / AFP

EN BREF - Plus compliquées qu'au printemps dernier, alors que l'épidémie touche cette fois largement le territoire français, les évacuations de malades du Covid-19 ont commencé. Dans quelles proportions et quelles conditions ?

C'est l'un des points qui rend cette seconde vague plus redoutable que la première dans l'Hexagone. Avant même que la circulation du Covid-19 ne gagne autant en intensité et en rapidité, au point de motiver le reconfinement du pays pour quatre semaines au moins, les possibilités de transférer des patients d'une région à l'autre étaient présentées comme limitées par rapport au printemps. 

"Toutes les régions sont affectées, donc l'entraide entre les hôpitaux va être très difficile", appréhendait notamment fin octobre, le chef du service des maladies infectieuses au Nouvel Hôpital Civil de Strasbourg, Ferhat Meziani. "En tout cas pour ce qui concerne la région Île-de-France, on n'imagine pas être conduits à transférer dans les mêmes conditions qu'on l'a fait au printemps", prévenait à la même période Martin Hirsch, soulignant que les hôpitaux ne peuvent pas mettre en œuvre les mêmes réponses qu'en mars.

Emmanuel Macron lui-même dans son allocution du 14 octobre consacrée à l'annonce du couvre-feu dans certains départements, expliquait cette particularité de la seconde vague : "Quand nous avons décidé le (premier) confinement, le virus était dans la région Grand Est et Ile-de-France et comme on a tout fermé, il s'est très peu répandu et nous avons pu, vous vous en souvenez, répartir des centaines de patients. Donc, on a libéré des places. Aujourd'hui, le virus est partout en France, donc il n'y a pas de réserves cachées de lits."

La donne semble avoir quelque peu évolué alors que la seconde vague est depuis bel et bien installée en France et que les services de réanimation de plusieurs hôpitaux sont saturés, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes ou dans le nord de la France.

Des transferts "par anticipation"

En appelant le 29 octobre tous les établissements de santé français à déclencher "sans attendre" leur plan blanc et déprogrammer des activités médicales, Olivier Véran en avait expliqué l'objectif. Outre le fait d'"atteindre le plus rapidement possible les capacités maximales" en lits de réanimation, "l'armement de lits supplémentaires" dans toutes les régions vise aussi à "assurer une solidarité des territoires par le transferts de patients", détaillait-il. Sur RTL ce lundi, il évoquait à ce sujet une volonté de "faire les choses par anticipation, forts de l'expérience de la première vague".

Pour rappel, le nombre de lits de réanimation, déjà relevé de 5.100 à 5.800 après la première vague épidémique, était monté à 6.400 en début de semaine dernière et devrait bientôt dépasser 7.000. Le président de la République Emmanuel Macron avait annoncé le 28 octobre que les capacités de réanimation seraient augmentées à 10.000 lits.

Les services de réanimation des hôpitaux au bord de la saturationSource : JT 13h Semaine

Vers quelles régions ?

Lundi, Olivier Véran indiquait que "40 évacuations sanitaires (avaient) déjà eu lieu" la semaine dernière entre régions, essentiellement par avion, du sud-est vers l'ouest du pays. "Un certain nombre ont été faits avant que la situation ne soit trop critique", a-t-il encore précisé.

Parmi ces transferts, dix patients du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Nîmes ont été transférés vers Toulouse et la Bretagne, "l'une des régions les moins touchées" par la seconde vague du Covid-19, a souligné de son côté le directeur de l'Agence régionale de santé d'Occitanie Pierre Ricordeau. Ce dernier a en outre décrit une situation qui s'est "fortement tendue" à Nîmes et sa périphérie au cours du week-end dernier, notamment chez les plus de 65 ans. Quatre patients d'Avignon ont également été pris en charge mercredi dans des établissements de Lorient et de Vannes, détaille dans un communiqué l'ARS Bretagne, qui précise que cela porte à vingt le nombre de patients du sud de la France touchés par le Covid-19 accueillis dans les établissements de la région depuis le 27 octobre.

A noter que des transferts de malades ont également eu lieu entre établissements d'une même région, "notamment en Auvergne-Rhône-Alpes", ces opérations étant menées "pour l'instant par voie aérienne", a rappelé Zaynab Riet, déléguée générale de la Fédération Hospitalière de France (FHF).

Et bientôt à l'étranger ?

Des transferts de malades du Covid-19 depuis les Hauts-de-France vers l'Allemagne sont "envisagés dans les prochains jours", ainsi que des évacuations vers d'autres régions françaises, a indiqué mardi Frédéric Valletoux, le président de la FHF. "Des transferts vers d'autres régions, voire d'autres pays, vont permettre de faire baisser cette pression et seront parfois indispensables", a-t-il ajouté, évoquant une "pression extrêmement forte dans certains territoires". Ces évacuations pourraient intervenir "dans les dix jours qui viennent", a-t-il précisé, les autorités sanitaires prédisant "un point de saturation avéré d'ici une dizaine de jours" dans les services de réanimation.

Avec quelle aide de l'UE ?

Il se trouve que, concernant les transferts de patients hospitalisés d'un pays à l'autre, l'UE a fait marche arrière vendredi sur la question du financement précisant que la somme de 220 millions d'euros annoncée la veille n'était pas nouvelle et que seulement 20 millions de ce montant y étaient dédiés dans la répartition initiale.

"Il n'y a pas de divisions, pas de limitation (...) Autant que je comprenne, on peut donc aller au-delà de cette somme de 20 millions pour les transferts de patients", a néanmoins estimé plus tard un porte-parole. Alors que la deuxième vague menace de saturer les capacités hospitalières, "la question du transfert transfrontalier de patients revient sur la table (...) Il était important de repréciser qu'il y a de l'argent pour les financer", a justifié un autre porte-parole.


Audrey LE GUELLEC

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