Se laver les mains à longueur de journée, la fausse bonne idée ?

par Charlotte ANGLADE
Publié le 15 octobre 2018 à 18h14
Se laver les mains à longueur de journée, la fausse bonne idée ?

Source : Thinkstock

PROPRETÉ - Avant de manger, après être allé aux toilettes, en sortant des transports en commun... Se laver les mains régulièrement est un réflexe que l'on a tous (plus ou moins) adopté. Mais, selon certains médecins, une hygiène trop importante nuirait à nos défenses naturelles. Nous avons demandé à la bactériologue Geneviève Héry-Arnaud , du CHRU de Brest, s'il fallait continuer à passer par la case lavabo.

L’utilité de la douche au quotidien fait débat depuis longtemps. Lorsque certains dermatologues plaident pour son importance dans l’élimination des bactéries et de la sueur et du sébum, d’autres l’accusent de détruire d’assécher la peau en détruisant son film hydrolipidique, voire d'affaiblir notre système immunitaire. En avril, un médecin américain Josh Axe, affirmait ainsi dans son livre "Salement bon pour la santé" que trop d'hygiène tuait l'hygiène. Si, pour l’heure, la question n’a pas été tranchée, qu’en est-il du lavage de mains ? Nous avons posé la question à la bactériologue Geneviève Héry-Arnaud qui officie au CHRU de Brest.

"Tout est dans la mesure", explique Geneviève Héry-Arnaud à LCI concernant le lavage de mains. Pour la bactériologue, se laver les mains après avoir été aux toilettes et avant de passer à table est incontournable pour éviter la transmission de virus et de bactéries. En période d'épidémie, une bonne hygiène des mains est aussi indispensable. "Ça ne coûte pas grand-chose et ça peut rapporter gros. Pour la gastro-entérite par exemple, dont les germes se transmettent de manière oro-fécale, la chaîne de transmission peut être coupée par un simple lavage de mains."

À trop se laver les mains, on risque de se débarrasser de son propre microbiote.

Geneviève Héry-Arnaud, bactériologue au CHRU de Brest

En revanche, inutile de se laver les mains de manière frénétique tout au long de la journée. Cela serait même contre-productif puisqu'"à trop se laver les mains, on risque de se débarrasser de son propre microbiote", avertit la bactériologue. Or, cette flore microbienne naturelle est tout aussi importante que celle présente au niveau digestif, qui joue un rôle de défense.

Les bactéries commensales [bactéries présentes dans l'organisme sans nuire à celui-ci, ndlr] qui constituent ce microbiote protègent le corps des bactéries pathogènes via deux mécanismes, décrit la Revue médicale suisse. "D’une part, elles entrent en compétition pour les nutriments et pour l’espace disponible, ce qui réduit donc le risque que des bactéries pathogènes puissent proliférer. D’autre part, elles peuvent également produire des bactériocines, des composés qui peuvent tuer d’autres espèces bactériennes."

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La dermatologue Laurence Netter rapporte d'autre part à LCI recevoir en consultation de plus en plus de patients qui, maniaques du lavage de mains, présentent diverses pathologies de la peau, telles que de l’eczéma  ou d'importantes sécheresses cutanées. "Certaines personnes arrivent aussi avec des ongles qui sont devenus perméables, explique-t-elle. C'est-à-dire qu'ils sont tellement mouillés régulièrement que cela les fragilise et ils deviennent très cassants"

Les Français, si hygiénistes que ça ?

Pour le médecin de santé publique et d'hygiène au CHU de Bordeaux Pierre Parneix, l'excès d'hygiène est cependant loin d'être alarmant chez les Français. "Il faut plutôt encourager les progressions dans ce domaine-là parce que la marge est immense, estime-t-il. Quand vous regardez le nombre de gens qui sortent des toilettes sans se laver les mains... "Selon une enquête de Win Gallup International publiée en 2015, près d'un Français sur deux ne se laverait effectivement pas les mains après avoir fait ses besoins.


Charlotte ANGLADE

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