ACCÈS AUX SOINS - Le chef de file communiste Fabien Roussel a pointé le manque de médecins dans de nombreux territoires français. Il avance ainsi que 7 millions de personnes vivent aujourd'hui dans un désert médical. Un chiffre qui varie toutefois selon le mode de calcul employé.
Défenseur de la vaccination, Fabien Roussel se montre toutefois hostile à la mise en place d'un pass vaccinal. Le candidat communiste à la présidentielle, invité en début de semaine sur Europe 1, a estimé que les Français qui ne se faisaient pas vacciner étaient avant tout "éloignés des soins". Il ne faut ainsi pas les cataloguer d'emblée comme antivax ou complotistes, a-t-il insisté.
Pour compléter son propos, le député du Nord a mis en avant un chiffre : "Vous savez, il y a aujourd'hui 7 millions de Français qui vivent dans des déserts médicaux", a-t-il lancé. Un chiffre que l'on retrouve dans des publications sérieuses, mais qui nécessite d'être analysé avec précaution, car il n'existe aucune définition stricte permettant d'établir ce qu'est ou non un désert médical.
3,8 millions de personnes concernées pour la Drees
Les difficultés d'accès aux soins sont régulièrement évoquées dans les médias, les déserts médicaux n'étant pas une problématique propre à la période actuelle. Pourtant, lorsqu'on se rend sur les moteurs de recherche pour consulter les chiffres relatifs aux populations concernées, on se retrouve assez vite déconcerté. "En 2019, 7,4 millions de Français vivaient dans un désert médical", titrait en décembre 2020 Le Figaro. Pourtant, plus tôt dans l'année, Le Monde livrait un constat bien différent : "Près de 3,8 millions de Français vivent dans un désert médical", assurait le quotidien.
Pour analyser ces disparités, il faut se pencher sur les sources de deux journaux. Le chiffre de 7,4 millions, très proche de celui avancé par Fabien Roussel, provient de l'édition 2020 d'un "Observatoire" publié par la Fédération nationale de la mutualité française. "Les déserts médicaux", apprend-on, "se sont multipliés ces dernières années : en 2018, 7,4 millions de personnes, soit plus d’un dixième de la population (11,1 %), vivent dans une commune où l’accès à un médecin généraliste est limité. Cette proportion n’a cessé de croître puisqu'elle était de "seulement" de 7,6 % en 2012. Ces déserts médicaux sont essentiellement concentrés dans le centre et le nord-ouest de la France ainsi que dans certaines communes de la région parisienne (Val-d’Oise et Seine-et-Marne)."
Méthodologies différentes
Un peu plus loin dans le document, l'origine de ce chiffre est indiquée dans les notes de bas de page : il s'agit de la Drees, la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques. Une source fiable, donc, mais qui peut laisser confus. En effet, la publication de la Drees partagée par la Mutualité française ne retient pas le même chiffre. "En 2018, les territoires sous-dotés en médecins généralistes concernent près de 6 % de la population", peut-on lire dès le titre. Comment une même source, fiable de surcroît, permet-elle d'aboutir à deux chiffrages très largement différents ? Tout dépend de la méthodologie de calcul et des indicateurs retenus.
La Mutualité française "s’intéresse à la population des communes dont l’accessibilité est inférieure au seuil de 2,5 consultations par an et par habitant", souligne la Drees, notant que c'est un indicateur qu'elle produit par le biais de ses services et qu'elle partage dans ses travaux. Pour autant, lorsqu'il s'agit d'évaluer la population concernée par les déserts médicaux, elle explique s’intéresser "principalement à un autre échelon, le territoire de vie-santé, qui vise à délimiter le territoire au sein duquel les habitants ont accès aux équipements et services les plus courants. Ces territoires de vie-santé sont des agrégats de communes." Selon les approches choisies, la population concernée varie donc du simple à près du double.
Les zones communément désignées comme des déserts médicaux, fait remarquer la Drees, "sont moins bien équipées que la moyenne, que ce soit en matière de commerces, d’établissements scolaires ou d’équipements sportifs et culturels". Ce qui incite à réfléchir à ces questions non seulement sous un prisme médical, mais aussi et plus globalement par le biais d'enjeux liés à l'aménagement du territoire. Parmi les autres points communs qui caractérisent ces zones, on note enfin "une croissance démographique particulièrement faible, ce qui peut s’interpréter comme une faible attractivité", ainsi que par une faible densité d'habitants.
Les observateurs craignent que ce mouvement de désertification ne s'accentue à l'avenir, en raison notamment du vieillissement de la population. Un mouvement global que les autorités tentent de contrer via une série de dispositifs incitatifs, cherchant à attirer les professionnels de santé dans des zones a priori moins attractives et mal pourvues.
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