Contraception masculine : Erwan, 38 ans, porte-étendard du "slip chauffant"

par Charlotte ANGLADE
Publié le 26 septembre 2019 à 8h45, mis à jour le 26 septembre 2019 à 10h38
Contraception masculine : Erwan, 38 ans, porte-étendard du "slip chauffant"
Source : AFP

PIONNIER DU SLIP - Comme il le dit lui même, Erwan Taverne fait partie d'une "espèce en voie d'apparition". À 38 ans, ce professeur de physique-chimie dans un collège du Nord utilise le "slip chauffant", un sous-vêtement contraceptif spécialement conçu pour les hommes. À l'occasion de la Journée mondiale de la contraception, ce jeudi, nous vous livrons son témoignage.

À 38 ans, Erwan Taverne est un homme épanoui. Depuis plus d’un an, il vit sa sexualité comme jamais auparavant. Son secret, c’est le "slip chauffant". Loin d’être le nouveau sextoy à la mode, ce sous-vêtement est en fait l’un des rares  moyens de contraception destinés à la gente masculine. Rien à voir avec un patch chauffant.

Le principe est naturel : en plaquant les testicules de l’homme contre son corps, il y fait monter la température de 2°C et freine ainsi la production de spermatozoïdes. Moins mobiles et réduits à moins d'un million par millilitre de sperme (contre 15 à 60 millions en moyenne), ils sont alors trop peu nombreux pour féconder un ovule.

La première semaine ça m’a fait un peu bizarre
Erwan Taverne

Vous trouvez peut-être cette idée saugrenue, voire inconfortable. Mais pour ce professeur de collège, elle est la garantie de relations sans complications. "À 23 ans, j’ai dû accompagner mon amie de l’époque à l’hôpital pour faire une IVG. Par la suite j’ai eu l’occasion d’aller chercher des pilules du lendemain avec d’autres partenaires", se souvient-il. "Je n’ai jamais trouvé ça anodin".

En portant son slip toute la journée, Erwan, qui ne souhaite pas avoir d'enfants, a donc l’esprit léger. "On l’enfile le matin et on l’enlève le soir. C’est une habitude à prendre", explique-t-il en se souvenant de débuts un peu perturbants. "La première semaine ça m’a fait un peu bizarre d’avoir les testicules remontés. […] Il faut prendre ses marques mais au bout d’un mois, on n’a vraiment plus du tout de souci", assure-t-il. À tel point qu’aujourd’hui, le trentenaire a complètement adopté son nouveau sous-vêtement et que c'est désormais lorsqu'il l'enlève qu'il trouve la sensation étrange.  

C'est une contrainte de l’ordre du soutien-gorge
Erwan Taverne

Emballé par la méthode, Erwan n’a pas hésité à en parler à ses proches. "Mes amis ont été très enthousiastes de voir qu’il y avait enfin un bonhomme qui se décidait à prendre les choses en main", explique-t-il. Cet habitant du Hainaut, dans le département du Nord, a même réussi à convaincre l’un d’entre eux d’adopter la contraception thermique.

Pour les réfractaires, cet ambassadeur du slip chauffant a bien rôdé son discours. En défendant la cause de ses sous-vêtements, il rappelle que les hommes ont jusque-là toujours fait confiance à leurs partenaires. "Une femme qui tombe enceinte, elle a encore le choix d’avorter alors que l’homme n’a plus son mot à dire si elle décide de garder l’enfant", soutient-il en ajoutant que "rien n’empêche de doubler la contraception".

Et lorsqu’on lui pose la question de la contrainte, Erwan a également tout prévu. "Si on aborde le sujet, je sors la photo d’une pin-up des années 50 avec les cheveux tirés à quatre épingles, les faux cils, le maquillage, le push-up, les porte-jarretelles, les talons aiguilles… Si on regarde les contraintes qui pèsent sur le corps des femmes, là on est sur une contrainte qui est de l’ordre du soutien-gorge !" Ses partenaires sexuelles, elles, ont en tout cas été "enchantées" de son initiative. Pas tue-l’amour pour un sou, donc.

Une espèce en voie d’apparition
Erwan Taverne

Le "slip chauffant", inventé entre autres par le docteur Mieusset, andrologue au CHU de Toulouse il y a une trentaine d’années, n’a pour autant jamais vraiment trouvé son public. Aujourd’hui, seule une petite vingtaine d’hommes porterait ce vêtement contraceptif en France. "Je fais en quelque sorte partie d’une espèce en voie d’apparition", plaisante Erwan Taverne qui fait tout pour populariser ce moyen de contraception.

En parallèle de son métier de professeur, il a créé un site internet dédié et poétiquement appelé "Boulocho". Il organise également des rencontres un peu partout en France pour faire connaître la méthode et entretient des liens étroits avec l'association pour la recherche et le développement de la contraception masculine, ARDECOM, dont fait partie le docteur Mieusset. Pour le moment, les "slips chauffants" sont uniquement prescrits par le médecin toulousain. Fabriqué de façon artisanale pour un coût s'élevant à 44 euros, le slip pourrait cependant bientôt être produit en série et commercialisé à moindre coût. Tenté ?


Charlotte ANGLADE

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