STRATÉGIE - Invité du 20H de TF1, le ministre de la Santé a estimé ce jeudi que "70 millions" de personnes pouvaient être vaccinées en France d'ici à la fin de l'été. Une annonce que nous avons passée au crible.
Un peu d'optimisme et beaucoup de conditionnel. C'est l'état d'esprit dans lequel il faut être pour considérer, comme l'a fait Olivier Véran jeudi 21 janvier, que la totalité de la population française (67 millions de personnes en 2019) pourrait être vaccinée avant la fin de l'été. Invité du 20H de TF1, le ministre de la Santé a créé la surprise en assurant que c'était le nouveau plan de vaccination prévu par le gouvernement. En début d'année, l'exécutif ne tablait que sur près de 27 millions de personnes protégées des formes graves du coronavirus à cette même échéance. Un regain d'optimisme impressionnant. Mais qui comporte encore beaucoup de "si".
Le calendrier jusqu'à juin est clair
Le calendrier de livraison jusqu'au mois de juin est précis. Détaillé par le gouvernement depuis le 7 janvier dernier, il prévoit une montée en puissance pour les mois à venir. "Chaque semaine, nous recevrons 500.000 doses supplémentaires" du vaccin de Pfizer/BioNTech "jusqu'à la fin du moins de février", se félicitait ainsi le ministre de la Santé. "En mars, le rythme doublera, avec environ un million de doses livrées par semaine grâce à l'ouverture de nouvelles lignes de production". En tout, l'exécutif avait donc prévu de recevoir un total de 26 millions de doses avant juin. Sauf que la France a nettement revu à la hausse cette estimation. Non pas que le nombre de commandes ait été multiplié, mais parce que le gouvernement français avait choisi la voie de la prudence. Il pensait encore à cette époque qu'il pourrait y avoir 30% de pertes de doses. Un chiffre révisé à 10%. Ce qui permet désormais, en théorie, d'obtenir dix millions de doses supplémentaires d'ici à juin. Une bonne nouvelle qui sera peut-être à relativiser puisque, désormais, le laboratoire américain considère qu'un flacon de son vaccin contient six doses et non plus cinq.
À ces 36 millions de doses on peut ajouter celles de Moderna, second vaccin autorisé dans l'Union européenne. En tout, 100.000 doses doivent être livrées dès janvier, 500.000 supplémentaires en février, puis un million en mars et avril, et le double chaque mois jusqu'en juin. Pour un total de 7 millions de doses à la fin du printemps.
Et après ? Le calendrier est, là, un peu moins précis. Le gouvernement a indiqué le nombre de doses qui seraient achetées au second semestre 2021, sans rentrer dans un détail mensuel. Au total, on comptera 23 millions de doses pour Pfizer et 17 millions pour Moderna. Ce qui nous fait donc en moyenne 6,6 millions de doses par mois. Appliqués aux mois de juillet, août et septembre, cela nous amènerait à 56 millions de doses. De quoi inoculer le vaccin à 28 millions de Français.
Quid de cet été?
Alors comment expliquer ce nouveau scénario volontariste? Ce décompte est en fait soumis à au moins une condition. Celle que "tous les vaccins soient validés par les autorités sanitaires et mondiales", comme l'a précisé le ministre. Ce qui n'est pas encore le cas. Six contrats d'approvisionnement ont en effet été signés au niveau européen, avec des quantités fixées au prorata des populations des États, soit 15% pour la France. Si les vaccins étaient autorisés, alors le plan présenté par le ministre serait de plus en plus plausible. On pourrait ainsi ajouter les 28 millions de doses d'AstraZeneca, produit pour lequel un verdict est attendu la semaine prochaine, mais aussi les 8 millions délivrés aussi bien par CureVac que par Janssen. Ces deux laboratoires devraient voir leur produit approuvé avant l'été, si on en croit les estimations des spécialistes. Une addition simple - qui prend en compte la particularité du vaccin Janssen dont il ne faut qu'une dose par personne - nous permet donc d'imaginer que cela donnerait près de 45 millions de Français immunisés fin juin. Il ne resterait alors "plus que" 22 millions de personnes à vacciner d'ici le mois d'août.
En partant du postulat que tous les laboratoires avec qui des négociations ont eu lieu arrivent à produire le vaccin, alors on peut reprendre les calculs prévus pour le second semestre. Soit 16 millions de doses pour AstraZeneca, les 26 millions de CureVac et les 22 millions de Janssen prévues au second semestre. Pour un total de 104 millions de doses sur l'intégralité de la fin d'année. En tout, par mois, cela fait donc théoriquement de quoi protéger 63 millions de Français au second semestre. Soit un peu plus de dix millions par mois. Le compte est bon.
Ce plan est donc bel et bien plausible. Uniquement de façon théorique, étant donné que plus de la moitié de ces doses viennent de laboratoires qui n'ont pas encore eu d'autorisation du régulateur européen. Raison pour laquelle le ministre de la Santé est resté très prudent. Encore ce vendredi il a rappelé sur Twitter que, si et seulement si "tous les vaccins commandés sont autorisés par les autorités sanitaires" et "si les laboratoires respectent leurs engagements", alors le pays pourrait atteindre son objectif. Des projections qui permettraient de voir la fin du tunnel. Et de placer la France confortablement au niveau des attentes de la Commission européenne, qui a fixé comme objectif la vaccination de 70% de sa population adulte d'ici à l'été.
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