PLUS QU'UN FILM - "Hors normes", d’Olivier Nakache et Eric Tolédano, actuellement en salles, met en lumière la question de la prise en charge de l’autisme et raconte, notamment, le combat des parents, des familles. Leur solitude aussi face à une société sans pitié. Nous avons demandé à deux mères d’enfants autistes ayant vu le film leur point de vue sur celui-ci.
Ils ont fait rire le monde entier avec "Intouchables" et "Le sens de la fête". Eric Toledano et Olivier Nakache font maintenant pleurer avec "Hors normes", avec Vincent Cassel et Reda Kateb en animateurs d'une association venant en aide à de jeunes autistes précédemment rejetés pat toutes les structures d'accueil. Très précisément Le Silence des Justes, fondée en 1996, qui œuvre pour "le développement des enfants, adolescents et adultes avec autisme ou atteints de troubles apparentés dans les meilleures conditions possibles".
En dépit de ses bonnes intentions fédératrices et d'une réelle satisfaction du public comme de la critique, le film ne fait pas l’unanimité, notamment pour CLEA (Collectif pour la Liberté d’Expression des Autistes), qui lui a reproché dans un communiqué diffusé mercredi de se servir des malades au bénéfice des "gens normaux". Un avis qui tranche avec celui d’autres associations qui voient ce film d’un bon œil et espèrent qu’il permettra de faire bouger les choses. Et les parents d’enfants autistes, qu’en pensent-ils ? S'agit-il là d'un bon coup de pied dans la fourmilière ?
C’est un petit miracle que l’on montre cette réalité au cinéma
Danièle Langloys, présidente de l'association Autisme France
Enthousiasmée, Danièle Langloys, mère d’un enfant autiste de 35 ans et actuelle présidente de l'association Autisme France, loue l’initiative consistant à parler des enfants comme des adultes autistes, dont on ne parle jamais, dans un film populaire, accessible, fédérateur : "Selon moi, il fallait oser parler de ceux dont la société ne veut pas, qui se font virer de l’école, des instituts médico-éducatifs, voire des hôpitaux psychiatriques pour des problèmes de comportements. Personne ne veut s’efforcer de voir comment on pourrait mieux les comprendre et répondre à leurs difficultés, et c’est la première fois que l’on montre au cinéma ces enfants, ces adolescents et ces adultes. A l’autre bout du spectre de l’autisme, se trouvent ces grands handicapés ayant de grandes difficultés sensorielles, qui ne parlent pas, qui ont des difficultés comportementales majeures et que, souvent, l’on a du mal à identifier. Pour moi, c’est un petit miracle que l’on montre cette réalité au cinéma avec des acteurs connus et des réalisateurs ayant fait des films grand public, qui ont touché beaucoup de monde."
L'association montrée comme "vecteur d'innovation"
Sophie Biette, présidente d'une Association départementale des amis et parents de personnes handicapées mentales (Adapei 44), mère d’une fille de 28 ans atteinte d’autisme sévère, comme montré dans le film, est tout aussi élogieuse. "Ce que j’ai trouvé intéressant dans le film, c’est que pour une fois, la question de l’autisme sévère est abordée de façon positive : on peut faire quelque chose de ces jeunes, rien n’est perdu. Et ce qu’il raconte aussi, c’est à quel point les associations sont des vecteurs d’innovation. Il ne faut pas attendre des pouvoirs publics mais croire en la société civile. C’est un appel à reprendre le militantisme grâce auquel on est parvenu à faire reconnaître l'autisme comme un handicap et non plus comme une maladie mentale". Sophie Biette cite une scène dans laquelle Vincent Cassel tend les photos d'enfants autistes abandonnés par la société à des enquêteurs de l'Inspection générale des affaires sociales venus lui chercher des noises. "Aujourd’hui, le Silence des justes est reconnu par l’Etat et financé pour faire son travail, avec un professionnel pour chaque personne autiste, mais le film montre bien que ça a pris du temps et qu'il a fallu se battre."
"Pour chaque personne autiste, enfant, ado, adulte, il faut un encadrement un pour un, et c’est normal, poursuit Danièle Langloys. Ces personnes autistes ne sont pas faites pour vivre en collectivité. Elles ne peuvent pas supporter le bruit des autres, la lumière des autres, le mouvement des autres, les paroles des autres. C’est diabolique pour une personne sévèrement atteinte. Le problème justement soulevé par le film, c’est 'qui s’en occupe' et 'qui finance'."
"Ceux qui vous aident et ceux qui ne vous regardent même pas"
Dans un souci de justesse, les réalisateurs Eric Toledano et Olivier Nakache ont tenu à exposer tous les points de vue, notamment celui, sensible, de la mère d'un adulte autiste, Joseph, interprétée par Hélène Vincent qui, dans une scène forte, assène : "Ils sont mignons quand ils sont petits mais quand ils grandissent, le regard des autres n'est plus tout à fait le même. Le monde se divise alors en deux : ceux qui vous aident et ceux qui ne vous regardent même pas." Une phrase pleine d’acuité selon Danièle Langloys : "Mon fils autiste est adulte maintenant, relativement autonome, mais lorsqu’il était enfant, il a fini par se faire éjecter du système qui n’a rien fait pour qu’il trouve sa place. J’étais seule et, même si aujourd'hui, il existe une vraie solidarité entre les parents autistes grâce aux différents groupes d'entraide qui se sont constitués sur Facebook, ça me fait mal au cœur de voir, qu’au fond, peu de choses ont changé en 2019."
De grandes qualités, des petits bémols
Danièle Langloys et Sophie Biette ne tarissent pas d’éloges. Mais s’il fallait trouver des réserves ? Pour Danièle Langloys, les bémols tiennent des artifices de la fiction : la dramatisation, l’émotion surlignée… : "Après avoir vu le film et écrasé sa larme, on fait quoi ? On fait comment, concrètement ?", questionne-t-elle. "En tant que spectateur lambda, non confronté à cette réalité, je suis forcément émue mais ce que j’aimerais que le film provoque, c’est la révolte, la colère". Elle prend l'exemple du personnage de Valentin, "l’enfant autiste sévère qui porte un casque parce qu’il se cogne la tête : il vient d’une USIDATU, une unité hospitalière temporaire qui accueille les plus vulnérables, mais qui ne tient non plus à les garder. La solution de repli, ce n’est pas un institut médical mais cette association sans moyen, sans agrément. Le spectateur ne devrait pas pleurer, il devrait se sentir mal. Constater que ces personnes existent, que la société les laisse tomber, qu’une association est seule contre les pouvoirs publics qui s’offusquent du manque d’agrément. Comment peut-on accepter une telle maltraitance en 2019 sur le territoire français ?"
C’est juste le récit de cette association à un moment donné, et une jolie expérience n’est pas applicable partout. Je tiens à la solidarité nationale.
Sophie Biette, présidente de l'Adapei 44
Autres griefs évoqués par Sophie Biette : le côté "très policé de la représentation de l'autisme dans le film" et l’absence de la dimension éducative. "J’aurais bien aimé en voir plus sur la manière dont on accompagne les jeunes personnes autistes, comment on trouve un outil de communication, comment on apprend les repères de l’espace et du temps, comment on travaille sur les difficultés sensorielles. Et ce qui paraît un peu magique dans le film, c’est cette idée que l’on va résoudre le problème des enfants autistes en les faisant encadrer par des jeunes déscolarisés. Je crains surtout, au niveau national, que l’on érige le film comme un modèle de prise en charge, qu'on se dise qu’il suffit de mettre une personne autiste dans une entreprise pour résoudre le problème. C’est juste le récit de cette association à un moment donné et une jolie expérience n’est pas applicable partout. Je tiens à la solidarité nationale."
"Toute cette dimension manque un peu dans le film mais soyons clairs, ce n’est pas non plus son objectif", poursuit Danièle Langloys. "Il fallait vulgariser les enjeux pour mettre en avant l'entraide, la compassion, le don de soi... Les auteurs ont voulu à dessein faire un film grand public et engagé et le principal, c’est que ça sensibilise."
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