DÉCRYPTAGE – Alertée sur la recrudescence des déformations des crânes de nourrissons, la Haute Autorité de Santé (HAS) s'est saisie de la question. Alors que des recommandations à l’adresse des parents et des professionnels devraient prochainement voir le jour, LCI fait le point avec deux spécialistes de la question.
Moins de "têtes plates" chez les futures générations ? La Haute Autorité de Santé (HAS) a en tout cas décidé de se saisir de cette question de l’aplatissement du crâne chez les nourrissons, aussi appelé plagiocéphalie, à la demande d'une association de défense des patients. Et ce au risque de créer une polémique chez les pédiatres.
Si le docteur Thierry Marck, auteur du livre Mon bébé n’aura pas la tête de plate, se réjouit que "le problème arrive enfin sur la place publique", nombre de ses confrères craignent au contraire que la peur des plagiocéphalies remette en cause dans l'esprit du grand public l'obligation du couchage sur le dos. Cette position est en effet recommandée depuis 1994 par les autorités, pour prévenir la mort subite du nourrisson. Or, le crâne des tout-petits, dont les os ne sont pas encore soudés entre eux, est malléable et peut facilement se déformer "sous l’effet d’une pression postérieure". Aujourd’hui, près de 20% des bébés sont concernés.
"Les mères se retrouvent face à un chantage éhonté et se disent que si quelque chose arrive à leur bébé ça sera de leur faute", regrette le spécialiste, qui qualifie le "syndrome de la tête plate" de "problème sanitaire global". A la clé notamment ? "Des problèmes vertébraux, de scoliose, de déformation de la mâchoire voire oculaires".
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C'est un premier pas
Thierry Marck, pédiatre
Alors que la Haute Autorité de Santé devrait publier prochainement des recommandations à l’adresse des parents et des professionnels, Thierry Marck estime que cela ne "résout malheureusement pas à la cause". Et ce dernier de rappeler que "des neurochirurgiens ont compris depuis longtemps que la tête ne se répare pas et qu’à deux ans, il est déjà trop tard."
Pour le pédiatre, le couchage sur le dos n'est pas en lui-même un problème. C'est plutôt son recours systématique. Aussi, une solution alternative existe. "Un bébé nait tout rond avec une surface d’appui très importante, il est très bien sur le côté", explique-t-il, assurant que "né à terme, dans un lit à lui, il ne peut pas basculer."
Ce positionnement latéral serait aussi utile en prévention de la plagiocéphalie qu’en traitement, comme l’explique Alexandra Richard, ostéopathe. "Quand le méplat (plat du crâne, ndlr) est à droite, l’idée est de caler la tête à gauche et inversement", précise-t-elle tout en incitant à "favoriser le portage et la motricité libre de l’enfant" pour varier les postures durant la journée.
Il y a une détresse car les parents sont culpabilisés
Alexandra Richard, ostéopathe
Mais la praticienne, qui affirme que ce problème concerne désormais près de 50% de ses consultations, précise qu’"il y a des âges où l’on peut récupérer, d’autres où c’est trop tard". Et de poursuivre : "entre 3 et 5 mois, ça commence à être compliqué, au-delà de 5 mois, très franchement c’est compliqué" et l’ultime recours sera le casque, proposé en général à partir de six mois. "Il agit comme un tuteur et ne va pas comprimer quoi que ce soit", tient à rassurer Thierry Marck qui considère néanmoins que ce traitement signe "l’échec de la prévention."
Convaincu que "les têtes plates ont encore de longs jours devant elles" car la pédiatrie occidentale "n’est pas prête de bouger d’un iota" sur la consigne du couchage sur le dos, il estime que le compromis se trouve ailleurs. A savoir, "le matelas de sécurité" qui repose sur des mailles tendues, permettant la respiration du bébé, même sur le ventre.