INTERVIEW - Invités de Darius Rochebin sur LCI, ce samedi, l'épidémiologiste Dominique Costagliola et l'infectiologue Enrique Casalino se disent favorables l'injection d'une troisième dose pour reprendre la main sur le virus. Ce shot de vaccin "va aider le système immunitaire à avoir une meilleure réponse, plus durable."
Une troisième dose pour tous ? En France, comme ailleurs en Europe, l'épidémie de Covid-19 repart en flèche. "La cinquième vague est là", a reconnu le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, mercredi 17 novembre. "Partout l'épidémie accélère et le virus reprend du terrain." La barre des 20.000 nouvelles contaminations en 24 heures a été franchie, systématiquement, au cours des quatre derniers jours dans l'Hexagone (20.294 cas ont été recensés mercredi 17, 20.366 jeudi 18, 21.220 vendredi 19 et 22.678 samedi 20). Des chiffres en croissance exponentielle que l'on n'avait plus vus depuis le 25 août dernier.
Pour enrayer cette reprise épidémique, la question de la troisième dose apparaît comme inévitable. En effet, l'efficacité du vaccin contre les risques d'infection diminue avec le temps, à partir du 6e mois après la deuxième injection. "Cette baisse d'efficacité est d'autant plus importante, en fonction de l'âge et des comorbidités", explique l'épidémiologiste Dominique Costagliola, directrice de recherches à l'Inserm, invitée de Darius Rochebin sur LCI, samedi 20 novembre. Ce rappel, uniquement accessible aux plus de 65 ans et les personnes à risque de formes graves, boosterait la protection contre le virus.
On aurait dû être beaucoup plus réactifs et proactifs
Enrique Casalino, infectiologue et directeur médical de l'hôpital Bichat à Paris
"De façon de très claire, on a des études qui montrent que lorsqu'on a eu ce rappel, on a un gain d'efficacité", affirme la biostatisticienne. Sur la base de ces données, le spectre d'accueil va s'ouvrir progressivement, puisqu'à partir du 1er décembre, les 50-64 ans seront éligibles. Dans un avis publié, vendredi 19 novembre, la Haute autorité de santé (HAS) a recommandé d'élargir l'injection aux 40 ans et plus. Pour Dominique Costagliola, "il n'y a pas de question à se poser", "une troisième dose va aider le système immunitaire à avoir une meilleure réponse. On peut donc espérer une réponse plus durable."
Le temps des interrogations est passé, il faut désormais agir car, sur la troisième dose, "nous sommes déjà en retard", déplore sur LCI l'infectiologue Enrique Casalino. "On aurait dû être beaucoup plus proactifs, beaucoup plus réactifs, (...) avec une stratégie de communication beaucoup plus enthousiaste, moins timorée et avec des arguments beaucoup plus convaincants, probablement adaptés à chacune des populations que nous devons vacciner." "La HAS dit qu'il faudrait commencer (la troisième dose, ndlr) à 40 ans et on nous dit qu'on va réfléchir, mais réfléchir à quoi ?", rebondit Dominique Costagliola.
Les non-vaccinés, "un problème" pour la circulation du virus
Par ailleurs, l'épidémiologiste regrette qu'on "ne fait pas le débat par rapport à la vaccination des enfants", la fameuse tranche des 5-11 ans. "Je trouve qu'il n'y a aucune bonne raison qu'un enfant, même si le risque est très faible, doive mourir ou être hospitalisé à cause de la Covid", argumente-t-elle. "Ce qu'on voit, par exemple, du déploiement de la campagne aux États-Unis, où il y a déjà plus d'un million d'enfants vaccinés, laisse à penser que le risque (de la vaccination) n'est pas très élevé." Pour Dominique Costagliola, "il faut adopter l'ensemble des mesures qui minimisent les dommages." "La vaccination en fait partie. Par conséquent, je pense qu'effectivement, pour tous les plus de 12 ans, il faudra aller vers la troisième dose", estime-t-elle.
Lire aussi
"Le Covid dans l'un, la grippe dans l'autre" : ça vaccine à tour de bras
Lire aussi
Calendrier, public concerné, prise de rendez-vous... tout savoir sur la campagne de rappel
Généraliser la troisième dose à tous, oui, mais "il ne faut pas oublier qu'il faut continuer à vacciner les personnes qui ne le sont pas encore aujourd'hui", intime Enrique Casalino, aussi directeur médical de l'hôpital Bichat à Paris. Quelque 6,5 millions de Français, âgés de plus de 12 ans, n'ont toujours pas reçu la moindre dose. "C'est un problème parce que ces personnes expliquent une partie importante de la circulation du virus. (...) C'est un phénomène mathématique. Plus le virus va circuler, plus nous verrons un certain nombre de personnes, même vaccinées, qui pourraient tomber malades et faire des formes graves."