Covid-19 : pourra-t-on échapper à l'obligation vaccinale ?

C.A.
Publié le 17 juin 2021 à 13h04
Covid-19 : pourra-t-on échapper à l'obligation vaccinale ?
Source : jody amiet / AFP

VACCINATION - Le ministre de la Santé a évoqué pour la première fois, ce jeudi, l'hypothèse d'une obligation vaccinale pour les soignants, encore trop peu nombreux à avoir reçu une première injection. Jusqu'alors, le gouvernement se refusait à cette solution, déjà choisie dans plusieurs régions du monde.

"Il y a 60% des adultes français qui ont déjà reçu une injection, il y a moins de 60% des soignants qui travaillent en Ehpad, ce n'est pas justifiable", a fustigé Olivier Véran sur BFMTV-RMC ce jeudi. Le ministre de la Santé a lancé un "appel solennel"  à ces professionnels, et notamment à ceux qui travaillent en Ehpad, à se faire vacciner, sous peine de rendre pour eux la vaccination obligatoire. "Si d'ici la fin de l'été ça ne devait pas s'améliorer, alors oui, nous nous poserions la question d'une obligation vaccinale pour ces publics particuliers", a-t-il déclaré.

Si l'obligation vaccinale semblait encore il y a trois semaines inenvisageable pour Emmanuel Macron, qui estimait que "l'adhésion monte" toute seule et qu'une obligation ne ferait que braquer les Français réticents, la crainte d'un "plafond de verre de la vaccination" est désormais de plus en plus présente.

Les réticents, les personnes isolées et les vacanciers freinent la campagne

Après plusieurs mois durant lesquels de nombreux Français ont cherché en vain des doses de vaccins, les centres de vaccination ont désormais parfois du mal à trouver preneurs. Selon l'Académie de médecine, environ 30% de la population française serait hésitante ou réticente à se faire vacciner. Parmi les raisons avancées, des doutes sur la sureté et l'efficacité du vaccin, mais les personnes concernées indiquent qu'elles seraient prêtes à changer d’avis s’il y avait "des informations qui prouvent l’efficacité et la sûreté du vaccin" (32%), "un retour à une vie plus normale" (22%) ou une nécessité de "protection de ses proches" (16%), rapporte une enquête de Santé publique France publiée début mai.

Certaines personnes, habitant dans des territoires isolés ou ayant du mal à se déplacer, sont également difficilement atteignables par la campagne de vaccination. Les autorités de santé mènent actuellement un travail pour les joindre et organiser un rendez-vous. Il y a quelques jours, l'épidémiologiste Pascal Crépey soulignait auprès de l'AFP l'existence d'un "plafonnement chez les plus de 75 ans, à environ 80% de vaccinés".

Enfin, à l'approche des vacances d'été, de nombreux Français préfèrent reculer la date de leur première injection à cause du délai à respecter entre les deux doses. Pour remédier à cette problématique, Olivier Véran a annoncé sur Twitter le 15 juin que "les systèmes de rendez-vous" de vaccination "allaient être modifiés de façon à ce qu'un rappel soit programmé entre 21 et 49 jours après la 1ère injection" pour les vaccins à ARN messager.

L'obligation vaccinale ou la quatrième vague ?

Face à cette situation, et alors que les nouveaux variants, à l'image du variant Delta, représentent une réelle menace, l'Académie de médecine appelait le 25 mai dernier à envisager l'obligation vaccinale. "Cette mesure a été appliquée en France pour la variole (1902-1984), la diphtérie (1938), le tétanos (1940), la tuberculose (1950-2007), la poliomyélite (1964), et étendue en 2017 pour 11 vaccins du nourrisson. Elle s’impose dans tous les cas où une vaccination efficace permet d’éliminer une maladie répandue, sévère et souvent mortelle", faisait-elle valoir dans un communiqué.

Depuis cependant, le débat fait autant rage chez les politiques que chez les médecins. "Dans un pays où qui a été capable de décréter trois confinements, d'enfermer la totalité de la population chez elle, de fermer les écoles, de barricader les gens dans les maisons de retraite, je ne comprends pas qu'il y ait un débat éthique sur l'obligation vaccinale pour une population chez qui le bénéfice/risque est immense", s'est agacé ce jeudi matin sur LCI l'épidémiologiste Martin Blachier. Pour lui, seule une obligation vaccinale prise dès cet été si le taux de vaccination de certaines catégories de personnes à risque est encore insuffisant pourrait éviter à la France de subir une quatrième vague.

Martin Blachier, épidémiologiste : "le virus est mis en pause pour l'été"Source : TF1 Info

"Si on regarde Israël, les Etats-Unis ou le Royaume-Uni, qui sont des pays qui ont suffisamment de vaccins depuis plusieurs mois, ils arrivent tous au même point d'équilibre : 65% de la population vaccinée. C'est insuffisant pour l'immunité collective", assure-t-il.

Moscou et l'Italie ont déjà tranché en faveur de l'obligation

Pendant que l'exécutif hésite, d'autres régions du monde ont franchi le cap de l'obligation vaccinale. Mercredi, le maire de Moscou a annoncé une obligation de vaccination contre le Covid-19 pour tous les employés du secteur des services, face à la situation sanitaire "dramatique" dans laquelle est plongée la ville. 12.000 personnes y sont hospitalisées, tandis que "la morbidité est au niveau des pics de fin d'année 2020", a indiqué l'élu, Sergueï Sobianine. Selon un sondage réalisé en avril de l'institut indépendant Levada, plus de 60% des Russes interrogés ne comptent pas se faire vacciner. À l'heure actuelle, à peine 13% de la population du pays a reçu une première dose de vaccin.

L'Italie, elle, a légiféré sur le sujet le 1er avril. Le pays a rendu obligatoire la vaccination contre le Covid pour tous les travailleurs des établissements de santé dans le secteur public ou privé, ainsi que pour les pharmaciens. En cas de refus, un salarié risque d'être suspendu au moins jusqu'à la fin de l'année 2021. Il lui est alors interdit d'exercer sa profession en lien avec le public.  


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