Matériel, effectifs... Nos hôpitaux sont-ils armés pour un nouveau pic épidémique ?

par Amandine REBOURG Amandine Rebourg
Publié le 7 octobre 2020 à 12h19

Source : JT 20h Semaine

CORONAVIRUS - Durant la première vague au printemps dernier, les soignants manquaient de tout. Six mois plus tard, les hôpitaux ont eu le temps de reconstituer leurs stocks de matériel et de médicaments. Mais en cas de deuxième vague, les quantités seront-elles suffisantes et surtout, les soignants seront-ils assez nombreux ?

Dans certains établissements de santé, les services comme les urgences, la gériatrie ou encore la réanimation sont déjà sous tension et parfois même, à la limite de la saturation. De quoi s'interroger sur la capacité des hôpitaux à faire face à une seconde vague de malades du Covid, qu'il faudra cette fois prendre en charge en même temps que les autres pathologies. 

En juillet dernier, le ministre de la Santé, Olivier Véran, avait annoncé qu'au moins 12.000 lits de réanimation seraient disponibles cet automne. La promesse a-t-elle été tenue ? Y aura-t-il assez d'équipements pour protéger les soignants ? Ces derniers seront-ils assez nombreux ? Les stocks de médicaments seront-ils suffisants ? Voici quelques éléments de réponse. 

Où en est-on des équipements de protection ?

Entre mars et avril, les personnels manquaient de tout. Les masques FFP2 étaient rationnés, les masques chirurgicaux devaient être portés durant 8 heures d'affilée, les blouses devaient être utilisées toute une journée au lieu d'en changer entre chaque patient, et des entreprises avaient du fournir du gel hydroalcoolique à certains hôpitaux qui en manquaient. Sept mois plus tard, où en est-on ? Selon Olivier Véran, la plupart des hôpitaux ont de quoi "tenir face à une crise sanitaire de trois semaines". 

Le stock national d'un milliard de masques a été reconstitué et les blouses sont désormais disponibles. Même chose pour les gants que les hôpitaux avaient du mal à se procurer cet été. Le gouvernement en a commandé 400 millions d'exemplaires, dont "60 millions arriveront dans les prochains jours", indiquait Olivier Véran en août dernier. Il n'excluait d'ailleurs pas un "plafonnement des prix si cela devenait nécessaire".

Les stocks de médicaments reconstitués seront-ils suffisants ?

Toujours d'après le ministre de la Santé, les stocks ont aussi été reconstitués sur ce registre : il devrait donc y avoir suffisamment de curare et autres médicaments indispensables à la réanimation pour prendre en charge jusqu'à 29.000 malades, si nécessaire. 

Le nombre de lits de réanimation a-t-il réellement été augmenté ?

Si les médicaments sont donc censés ne pas manquer, aucune ouverture de lit de réanimation n'a été annoncée. Selon le gouvernement, la France pourra mobiliser jusqu'à 12.000 de ces lits dans les semaines et mois à venir.  Au plus fort de l'épidémie en avril dernier, 9.000 avaient été mobilisés, ce qui avait conduit certains hôpitaux à transférer des patients dans d'autres régions, comme l'Aquitaine ou le sud de la France. 

Maus aujourd'hui, où en est-on sur le terrain ? Seuls 6.000 de ces lits sont opérationnels et le quart d'entre eux est occupé par des patients Covid. En Île-de-France, ce taux monte même à 40%, selon l'Agence régionale de Santé. Les autres sont vides ou occupés par des patients qui n'avaient pas pu être pris en charge au plus haut de l'épidémie. 

Le principal enjeu de ces prochains jours et semaines sera donc de prendre en charge deux flux de patients : ceux qui sont touchés par le Covid et ceux présentant d'autres pathologies. Et c'est là que le bât blesse, surtout si les admissions en réanimation ne cessent d'augmenter au cours des prochaines semaines. "Aujourd'hui, nous ne pouvons et nous ne voulons plus abandonner les patients non Covid. Donc nous allons mener de front nos traitements des malades habituels avec les malades Covid", explique François-René Pruvot, président de la Conférence des présidents de commissions médicales d’établissement de CHU. 

Y aura-t-il suffisamment de personnels en cas de deuxième vague ?

Si "mener de front" les traitements des patients Covid et des autres constitue la principale source d'inquiétude, c'est que cette gestion repose essentiellement sur les disponibilités des personnels et le recrutement. Or les bras manquent, comme l'expliquait ce mardi lors d'une conférence de presse Anne Gervais, membre du collectif Inter-Hôpitaux et médecin gastro-entérologue-hépatologue à l'hôpital Bichat à Paris. "Un quart des postes de praticiens hospitaliers n'est pas pourvu" selon elle. 

D'après une note du ministère de la Santé, il faudrait embaucher 34.000 personnels paramédicaux, 24.000 infirmiers supplémentaires et 10.000 aides-soignants, pour faire fonctionner les 12.000 lits de réanimation mobilisables en cas de pic de épidémique. Mais ces recrutements sont-ils faisables et réalistes ? "Nous avons lancé un appel au renfort pour les services qui s'occupent du Covid et à ce stade nous avons envoyé 240 candidatures de soignants dans les différents groupes hospitaliers de l'AP-HP", indique Pierre-Emmanuel Lecerf, directeur général adjoint de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Et si la région parisienne ainsi que le Grand-Est ont pu compter sur des renforts venus de province au printemps dernier, cette possibilité semble s'être éloignée, au point que selon une note de l'AP-HP que LCI a pu consulter la semaine dernière, des soignants ne pourront peut-être pas prendre leurs vacances de la Toussaint au sein de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Car contrairement au pic épidémique de mars et avril dernier, principalement concentré sur l'Île-de-France et le Grand-Est, le virus circule désormais sur tout le territoire. 


Amandine REBOURG Amandine Rebourg

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