De faux arrêts maladie sont vendus par des escrocs pour une somme modique sur les réseaux sociaux.Le phénomène se développe depuis quelques mois : il a déjà coûté trois millions d’euros à la sécurité sociale.Mais y avoir recours vous expose à des condamnations lourdes, jusqu'à trois ans de prison et 45.000 euros d'amende.
Un arrêt de travail en quelques clics et sans même voir un médecin. Avec les réseaux sociaux, c’est très facile et complètement illégal. Sur Snapchat, pour une vingtaine d'euros, en quelques minutes seulement, nous rentrons en contact avec un escroc. Pour un arrêt maladie, il a répondu qu’il lui fallait juste le nom, prénom, numéro de sécurité sociale, date et raison de l’arrêt. Pour "lombalgie ou dépression", répond-il lorsqu'on lui demande un motif crédible. Quelques instants après le premier contact, un document prérempli, signé électroniquement par un professionnel de santé, est reçu dans votre boîte mail. Le certificat est faux, mais le médecin existe.
Des identités de médecins usurpées, malgré la multiplication des plaintes
En rencontrant le médecin usurpé, il affirme que ce n’est pas la première fois qu’un arrêt frauduleux est délivré en son nom. Depuis quelques mois, il reçoit régulièrement des appels de chefs d’entreprise soupçonneux de l’authenticité des arrêts. Il a saisi l’ordre des médecins et prévenu les gendarmes, rien n’y fait. "Toutes les semaines, j'ai un arrêt de travail qui arrive, et il faut que je porte plainte. C'est chronophage pour moi, je n'ai pas que ça à faire, j'ai aussi du soin à réaliser sur mes patients", explique le praticien.
J'en fais 150 par mois environ. Plus, au moment des vacances et des fêtes
Un escroc sur Snapchat
Quelle est l’ampleur de cette fraude ? Pour le savoir, nous avons contacté l’escroc en lui précisant cette fois que nous sommes journalistes. Il nous explique être au chômage, et faire de faux arrêts de travail pour avoir un complément de revenu. "J'en fais 150 par mois environ. Plus, au moment des vacances et des fêtes. Le modèle original a été prescrit à une vraie personne, je modifie juste le fichier. Et j'ai des amis qui travaillent à la sécu qui me disent si ça passe bien", écrit-il dans un message.
Sur notre arrêt illégal, apparaît également le nom d'une entreprise qui organise des consultations à distance. Ses locaux sont à Paris, et l’une des responsables de l’entreprise remarque immédiatement que quelque chose ne va pas en voyant l'arrêt. "Là on voit que le patient va être en arrêt pendant 15 jours, ce n'est pas possible chez nous. Tous les arrêts de travail sont inférieurs à 5 jours", explique Fadila Imerglik, responsable qualité et risques pour la société Livi.
Ces documents peuvent aussi être livrés, ou récupérés en main propre. Quelque part en région parisienne, en caméra cachée, nous prenons rendez-vous avec un autre revendeur. "Attention de ne pas trop le sortir comme ça, on sait jamais", se méfie-t-il. Il semble avoir, ce soir-là, plusieurs clients à rencontrer. L'arrêt de travail qu'il nous a remis est signé et tamponné par un médecin, à nous de remplir le reste. Récemment, les policiers du Val-d'Oise ont interpellé un homme qui procédait de la même manière. Résultat des perquisitions : des milliers d'euros saisis, et des formulaires vierges. Le trafic est rentable.
Pour usage de faux, l'escroc et le client risquent jusqu'à trois ans de prison et jusqu'à 45.000 euros d'amende. Chaque année, les arrêts de travail falsifiés coûtent à l'Assurance maladie 3,4 millions d'euros.
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