Chute d'une fusée chinoise : comment les agences spatiales font-elles atterrir leurs débris en douceur ?

Publié le 30 juillet 2022 à 17h17, mis à jour le 31 juillet 2022 à 7h51
JT Perso

Source : JT 20h WE

Les restes d'une fusée chinoise, qui avait décollé la semaine dernière, se sont écrasées sur Terre ce samedi.
Une grande partie a atterri dans l'océan Indien alors que des critiques se sont élevées face au manque de contrôle des autorités chinoises sur ces débris.
Habituellement, les agences spatiales utilisent des systèmes de propulsion pour déterminer avec précision le point d'impact.

"Laxisme", "désinvolture", "imprudence", les critiques fusent depuis quelques jours dans le petit monde du spatial, alors que les restes d’une fusée chinoise hors de contrôle sont retombés dans l'océan Indien ce samedi 30 juillet. Il faut dire que ce n’est pas la première fois que la Chine perd le contrôle d’un engin spatial. En 2020, des débris appartenant à une fusée Longue-March s'étaient même écrasés non loin d’un village en Côte d'Ivoire, provoquant des dégâts matériels mais sans faire de blessés. Cette fois, à en croire l’Aerospace Corporation, il y a "99,5% de chances rien ne se passe", la plupart des débris devraient être consumés en entrant dans l'atmosphère. 

Après les retombées des premiers débris, les autorités surveillent toutefois la chute potentielle d'autres parties de la fusée. Des éléments, d’un poids compris entre 5,5 et 9,9 tonnes, pourraient atteindre le sol à la vitesse de 7 kilomètres par seconde. Mais l'inquiétude est moindre avec la probabilité que ces éléments retombent en mer, dont notre planète est constituée à 75%, ou bien dans une zone désertique, seulement 2,5 % des terres émergées étant habitées. L’an dernier, un morceau d’une fusée Long March 5B avait terminé sa course dans l’océan Indien, comme c’était prévu. Cependant, on l’a déjà vu dans le passé, le risque zéro n’existe pas, d’où l’appel lancé l’an dernier par plusieurs experts pour demander à la Chine d’équiper l’engin de rétrofusées, de manière à être en mesure de contrôler sa descente d’orbite.

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"De cette manière, on peut déterminer l’emplacement où va s’écraser le débris, en provoquant son entrée dans l’atmosphère à l’endroit voulu, explique à TF1info David Mimoun, enseignant-chercheur à l'Isae-SupAero, l’école toulousaine spécialisée dans le secteur aérospatial. Les fusées européennes, russes et américaines sont toutes équipées de propulseurs d’appoint qui permettent de freiner la course du débris, et de le faire tomber rapidement et de façon contrôlée". Les gros débris spatiaux terminent ainsi leur course au milieu Pacifique, loin de toute vie humaine.  Ce cimetière pour engins spatiaux a même un petit surnom, le "point Némo". Mais c'est à la fois complexe et coûteux, et les Chinois ne semblent pas vouloir se donner ce mal.

Des recommandations pour limiter les risques

Pourtant, même si la Chine ne viole pas le droit spatial international (encore assez sommaire à ce jour), son imprudence témoigne d’un certain zèle quant au respect des règles "de bonne conduite" établies par les grandes agences spatiales, souligne Robin Dickey, analyste en politiques spatiales et aérospatiales, dans un entretien accordé à l’Aerospace Corporation.  "En allant bien au-delà du seuil de risque couramment utilisé pour les victimes (1 sur 10.000)", cette rentrée incontrôlée "peut être considérée comme irresponsable". D'autant qu'il existe, en effet, des normes internationales avec des recommandations sur la façon d'estimer et d'atténuer le risque lié aux objets revenant de l'espace. 

En mars 2020, le Comité de coordination inter-agences des débris spatiaux (IADC) a d'ailleurs établi un ensemble de directives, afin de limiter la quantité de débris qui survivent à la rentrée dans l'atmosphère et de localiser la rentrée au-dessus des régions inhabitées. Y figure notamment le fameux "point Némo", cette zone ultra-isolée de 22 millions de km², située au large des côtes de l'Antarctique, de la Nouvelle-Zélande, des îles Piticairn et du Chili. Cet emplacement est "la région biologiquement la moins active du monde", comme l'expliquait, en 2009, l'océanographe Steven D’Hondt, de l’Université de Rhode Island. Entre 250 et 300 engins spatiaux dormiraient dans la zone, au fond de l'océan.


Matthieu DELACHARLERY

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