Espace : de minuscules billes de verre pourraient cacher des milliards de tonnes d’eau sur la Lune

Publié le 29 mars 2023 à 11h22, mis à jour le 30 mars 2023 à 12h20

Source : JT 20h Semaine

Des billes de verre présentes sur la surface de la Lune pourraient constituer une source d'eau facilement accessible pour de futures missions.
Selon les chercheurs, ce réservoir d'eau insoupçonnée pourrait servir de ressources in situ aux astronautes lors de futures missions lunaires.

Des milliards de tonnes d’eau, piégées dans de minuscules billes de verre éparpillées sur la surface de la Lune, pourraient servir de ressources in situ aux astronautes lors de futures missions lunaires. C'est en tout cas ce qu'avance une équipe internationale de chercheurs, dirigée par Huicun He de l'Académie chinoise des sciences, dont les travaux ont été publiés lundi 27 mars dans la revue Nature Geoscience

En analysant des échantillons ramenés sur Terre par la mission chinoise Chang'e-5, les scientifiques ont découvert que ces perles de verre, qui se forment à partir de l'hydrogène contenu dans le vent solaire, ont un rôle essentiel dans le cycle de l'eau sur la Lune.

À l'origine des billes de verre, des micrométéorites

Les échantillons provenant des missions du programme Apollo contenaient des traces d'eau, mais avec une concentration extrêmement faible, si bien que les scientifiques ont pensé que la Lune était totalement asséchée. Mais de nouvelles découvertes ces dernières années semblent indiquer tout le contraire. Des engins spatiaux ont récemment détecté de l'hydrogène et de la glace dans les cratères profonds au niveau des pôles lunaires. Avant cela, en 2020, une équipe de scientifiques de la Nasa a détecté, pour la première fois, des molécules d'eau dans des zones de la Lune éclairées par le Soleil, émettant l'hypothèse qu'elles pourraient être piégées dans des billes de verre, ce qui expliquerait pourquoi l'eau ne s'est pas évaporée. 

Une intuition que confirment aujourd'hui ces nouvelles recherches, avec l'analyse des échantillons ramenés sur Terre, en décembre 2020, par la sonde chinoise Chang'e-5. Ces travaux suggèrent que ces billes de verre se forment lorsque des micrométéorites frappent la surface de la Lune, ce qui a pour effet de faire fondre la roche qui les entoure. Les auteurs de l'étude expliquent que l'eau est expulsée des billes au moment de l'impact, mais qu'elles sont suffisamment poreuses pour absorber l'hydrogène apporté par le vent solaire -un flux de particules invisibles chargés électriquement – des ions et des électrons essentiellement – émis par notre étoile. L'hydrogène interagit avec l'oxygène piégé dans le verre pour créer un hydroxyle (OH), un ion qui peut s'associer à d'autres atomes d'hydrogène pour former de l'eau, explique l'équipe.

Nous ne parlons pas de [quantités] comparables à celles de la Terre, mais nous parlons de quantités suffisantes pour être utilisées
Huicun He, l'auteur principal de l'étude.

"Nous ne parlons pas de [quantités] comparables à celles de la Terre, mais nous parlons de quantités suffisantes pour être utilisées", déclarent Huicun He, l'auteur principal de l'étude. Près de 300 milliards de tonnes d’eau pourraient être emprisonnées dans ces billes de verre, d'après leurs estimations. L'analyse a montré que la formation de l'eau est un processus relativement rapide, puisqu'il ne fallait qu'une quinzaine d'années pour atteindre les niveaux détectés dans les billes. Une découverte majeure notamment pour les agences spatiales, qui envisagent la construction de bases lunaires dès la prochaine décennie. Les futurs colons pourraient non seulement en extraire de l'eau, mais aussi de l'hydrogène et l'oxygène, deux ressources essentielles pour envisager de s'y établir durablement.

"Pour la planification future des ressources in situ, il s'agit donc d'un grand pas qui ouvre la voie à une ressource dont la teneur en eau est assez élevée", soulignent les auteurs de l'étude. Les expériences menées par les scientifiques en laboratoire montrent qu'il suffirait de chauffer la bille à quelques centaines de degrés et, à l'aide d'un condensateur, d'en extraire l'eau qui s'y trouve, une opération relativement simple. Une analyse antérieure du régolithe - la fine couche de poussière sur la face de la Lune - par l'équipe de la mission chinoise Chang'e-5 a révélé que les billes contiennent plus d'eau que le sol environnant. Néanmoins, notamment du fait de la taille réduite de ces billes de verre, de nombreux défis restent à surmonter avant d'envisager de pouvoir exploiter ce réservoir d'eau à une échelle industrielle.


Matthieu DELACHARLERY

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