Le vol inaugural de Terran 1, première fusée imprimée en 3D dans l'espace, se solde par un échec

par M.D. avec AFP
Publié le 23 mars 2023 à 12h53

Source : JT 20h WE

La nuit dernière, la startup californienne RelativySpace a tenté de faire décoller la première fusée au monde imprimée en 3D.
Le lanceur n'a pas réussi à atteindre son orbite, le moteur du deuxième étage de la fusée ne s'étant pas allumé correctement.

La route vers les étoiles est semée d’embuches. La nuit dernière, la startup RelativitySpace a tenté à nouveau de faire décoller la première fusée au monde imprimée en 3D, mais ce troisième essai s’est soldé par un échec. Le lanceur Terra 1 s’est bien arraché, comme prévu, du pas de tir de Cap Canaveral en Floride, mais sans parvenir à atteindre son orbite pour autant. En cause, une "anomalie" au moment de la séparation du deuxième étage. Le moteur n'a jamais réussi à s'allumer correctement, si bien que l'engin n'a pas réussi à s'élever au-delà d'une altitude de 120 km. Cette mission, baptisée "Good luck, have fun" ("Bonne chance, amuse-toi bien", en français), était scrutée avec attention dans le petit monde du spatial. 

Pour de nombreux spécialistes du secteur, les fusées imprimées en 3D pourraient représenter une petite révolution dans l'industrie du lancement. La fusée Terran 1, qui mesure 33,5 mètres de haut et un peu plus de 2 mètres de diamètre, devait recueillir des données et démontrer qu'une fusée imprimée en 3D pouvait résister aux rigueurs du décollage et des vols spatiaux. Au total, 85% de la masse de la fusée a été imprimée en 3D, et l'entreprise vise les 95% à l'avenir.  Son premier étage comporte neuf moteurs, également imprimés en 3D. Avantage principal de la technique : simplifier grandement le processus de fabrication et réduire ainsi les coûts. 

Avec ses grands robots d'impression 3D, la compagnie affirme diviser par 100 le nombre de pièces par rapport à une fusée traditionnelle. Elle met aussi en avant la rapidité de la méthode : 60 jours, de la matière première au produit fini. L'objectif pour la jeune pousse RelativySpace, être capable de placer 1250 kilos en orbite terrestre basse (des petits satellites, par exemple). Pour ce vol d'essai, l'engin ne transportait pas de charge utile. Le lanceur Terran 1 devait placer sur une orbite d'environ 200 kilomètres son étage supérieur, dont le cône devait libérer un anneau métallique, premier composant produit par l'entreprise via la technologie d'impression 3D

Métahlox, le carburant du futur

Théoriquement, la fusée aurait dû atteindre, 80 secondes après le décollage, le point où la force aérodynamique exercée sur l'engin est la plus élevée (max Q, dans le jargon). C'est l'étape cruciale du vol, selon le jeune patron de Relativity Space. 

"Nous avons déjà prouvé au sol ce que nous espérons prouver en vol, que lorsque la pression dynamique et la tension sur le véhicule sont au plus haut, les structures imprimées en 3D peuvent résister à ces forces", avait tweeté début mars Tim Ellis.  Après la séparation du premier étage de la fusée, le second aurait dû poursuivre sa route jusqu'à atteindre l'orbite terrestre, environ 8 minutes après son décollage. 

Réussir cette étape dès le premier vol aurait été "sans précédent", avait dit Tim Ellis. En effet, la fusée utilise du méthalox comme carburant, un mélange d'oxygène liquide et de gaz naturel liquéfié (essentiellement du méthane). Si elle était parvenue à atteindre l'orbite, Terran 1 serait devenue la première fusée utilisant ce carburant à y parvenir. Relativity Space, qui promeut la vision de long terme d'une humanité vivant sur plusieurs planètes, fait valoir qu'il s'agit du carburant "du futur", le plus facile à produire sur Mars. Les fusées en développement Vulcan, de United Launch Alliance (ULA), et Starship, de SpaceX, doivent également utiliser ce carburant.

Une première tentative de lancement de Terran 1 avait été abandonnée le 8 mars à cause d'un problème de température de carburant. Puis, le 11 mars, le décollage avait été annulé à deux reprises dans les dernières secondes du compte à rebours, d'abord à cause d'un problème d'automatisation, puis à cause d'un souci de pression du carburant. Quel que soit le degré de réussite du vol inaugural de Terran 1, les données récoltées serviront aussi pour l'élaboration de sa grande sœur : Terran R. Cette plus grosse fusée, également développée par Relativity Space, pourra quant à elle transporter jusqu'à 20.000 kilos jusqu'en orbite basse. 

La société a déjà signé pour 1,65 milliard de dollars de contrats, la majorité pour Terran R, selon Tim Ellis. L'un d'eux a été passé avec l'entreprise OneWeb, dont la constellation de satellites doit fournir internet depuis l'espace. Ce type de fusée "moyenne-lourde est clairement là où se trouve l'opportunité de marché la plus importante pour le reste de la décennie, avec une pénurie énorme actuellement dans cette classe de charge utile", avait tweeté Tim Ellis. Un opérateur de satellite peut attendre des années avant d'obtenir une place dans les grosses fusées d'Arianespace ou de SpaceX. Des dizaines de start-up se sont donc lancées ces dernières années pour répondre à une demande en plein boom.


M.D. avec AFP

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