Attentats de Paris : un "fiché S" raconte son assignation à résidence

Publié le 19 novembre 2015 à 19h15

TEMOIGNAGE - Depuis la mise en œuvre de l'état d'urgence vendredi, au soir des attentats, au moins 118 assignations à résidence ont été prononcées à l'encontre d'individus considérés comme dangereux par le ministère de l’Intérieur en raison de leurs activités présumées. L'un d'eux a été sollicité par metronews. Nous lui avons demandé de décrire ce dispositif.

Il fait partie des 118 individus assignés à résidence par le ministère de l’Intérieur depuis les attentats de Paris, le 13 novembre 2015. B.*, surveillé de longue date par les services de renseignements français, a reçu ce lundi 16 novembre une notification des autorités françaises. D'après ce document, qu'il a communiqué à metronews, les autorités ciblent ce "théologien et figure emblématique du salafisme" en raison de son implication présumée dans des faits particulièrement graves, "en relation avec une entreprise terroriste", ce qu'il conteste par ailleurs. Il entre dans la catégorie des "fichés S", ces quelque 10.000 personnes surveillées en raison d'activités susceptibles de porter "atteinte à la sûreté de l'Etat". Pour l'heure, contacté, le ministère de l'Intérieur ne s'exprime pas sur le sujet.

Alors que les députés ont voté, jeudi, la prolongation pour trois mois des mesures d'assignation à résidence prises dans le cadre de l'état d'urgence , ainsi que leur renforcement - les individus pourront notamment se voir imposer le port du bracelet électronique -, nous avons souhaité savoir comment la mesure était appliquée concrètement. D'après le témoignage de B., "une dizaine de policiers" se sont présentés lundi à son domicile alors qu'il était lui-même "au travail". C'est son "fils aîné" qui a trouvé l'assignation à résidence, déposée dans sa boîte aux lettres. Elle était assortie d'une convocation, pour le lendemain matin, au bureau parisien de la sous-direction de la lutte contre l'immigration irrégulière.

Recours en vue

Le document est sans ambiguïté : l'homme doit pointer "quatre fois par jour, à 8h30, 12h30, 16h30 et 19h30" au commissariat de police de son quartier, en banlieue parisienne, et demeurer dans le périmètre de sa commune. En outre, il doit "demeurer tous les jours de 21h30 à 7h30 dans les locaux où il réside". "Je suis assigné au domicile de ma mère", précise B. "Je signe quatre fois par jour au commissariat. J'y vais normalement, sans me rebeller, je fais un sourire, signe et repars en saluant", assure-t-il. Pour l'heure, le refus d'obtempérer est puni, selon la loi de 1955 , de 8 jours à deux mois de prison. Mais les peines ont été singulièrement durcies après le vote de jeudi, allant jusqu'à un an de prison. Est-il surveillé d'une autre façon par les forces de l'ordre ? "Je n'ai pas remarqué ça", affirme-t-il.

S'il se montre coopératif, B. indique avoir, comme d'autres assignés à résidence avant lui , contacté un avocat pour contester la décision des autorités françaises devant la justice. Il invoque l'article 6 de la loi de 1955, qui prévoit que l'autorité administrative "assure sa subsistance" et celle de sa famille. "Je travaillais en CDI et je ne peux pas m'y rendre. Je ne peux plus payer mon loyer ni nourrir ma famille", plaide-t-il. Une défense parmi d'autres, ce qui promet, peut-être bon nombre de recours devant la justice. 

EN SAVOIR +
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Vincent MICHELON

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