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Corrida : quand 6 taureaux sont tués dans l'arène, en compte-t-on "150 autres qui vivent" ?

Publié le 24 novembre 2022 à 15h03

Source : JT 20h WE

À l'initiative de la France insoumise, l'interdiction de la corrida est débattue à l'Assemblée nationale.
Un torero, attaché à cette tradition, assure que seule une minorité des taureaux élevés finissent dans l'arène.
Il dit vrai, même si les bêtes qui ne participent pas aux corridas sont elles aussi tuées, finissant leur vie à l'abattoir.

Depuis de longues années, la corrida déchaîne les passions et scinde la société en deux. La France insoumise, qui se range dans le camp des "anti", souhaite son interdiction et la porte aujourd'hui devant l'Assemblée nationale. Une position qui fait bondir les défenseurs de cette tradition. 

Invité de France Inter le 17 novembre, le torero Rafi Raucoule a porté la voix des "aficionados" et tenu à souligner que les taureaux de combat tombant dans l'arène étaient une minorité. La corrida ? "C'est 6 taureaux qui sont mis à mort, mais 150 autres qui vivent", glisse-t-il. Les éleveurs, qui font perdurer cette race très spécifique conçue pour le combat, confirment que seule une petite partie de leurs bêtes prennent part à des corridas.

Des rares taureaux graciés, les autres vers l'abattoir

En France, on estime à moins de 50 le nombre d'élevages de taureaux de combat. Ces derniers, dont la race est nommée "toro bravo" de l'autre côté des Pyrénées, ont été spécialement conçu pour la tauromachie. Issus de multiples sélections et croisements, ils peuvent peser jusqu'à 600 kilos.

Rafi Raucoule, lors de son passage sur France Inter, a souligné que ces animaux bénéficiaient de conditions de vie aux antipodes de celles connues dans les élevages intensifs, avec en moyenne "1 hectare par animal". Patrick Laugier, ancien président de l'Association des éleveurs français de toros de combat (AEFTC) confirme et insiste sur le soin apporté aux bêtes : "Il faut toujours présenter un beau taureau, en bonne santé pour qu'il arrive dans l'arène". D'ailleurs, ajoute-t-il, "des contrôles vétérinaires stricts sont effectués avant une corrida". Il explique ainsi apporter un soin immense aux taureaux qu'il élève jusqu'à leur passage à l'âge adulte, entre 3 et 4 ans. 

Combien d'animaux prennent finalement part aux corridas ? "Le but serait qu'ils finissent tous dans l'arène", assure Patrick Laugier. Mais c'est en pratique loin d'être le cas : "On va en sortir 25 ou 30 sur 100", estime l'éleveur, soit une proportion supérieure à celle évoquée par le torero Rafi Raucoule. Sur son site, l'AEFTC partage quant à elle des chiffres moins importants : "On considère qu'environ 10 % des animaux d'un élevage seront présenté en arène", peut-on lire, "le reste étant destiné à connaître d'autres circuits dont celui de l'abattage pour fabriquer des produits de boucherie et de charcuterie, d'où l'intérêt d'avoir pu obtenir en 1996 un classement A.O.C. de la viande taureau de Camargue."

Il arrive, dans de très rares cas, qu'un taureau soit gracié à l'issue d'une corrida. Il s'agit d'une marque de reconnaissance accordée à des animaux qui se seront particulièrement distingués dans l'arène. Les taureaux adultes qui n'ont pas été sélectionnés pour des spectacles de tauromachie, de leur côté, ne finissent pas leur vie à pâturer dans les vastes étendues des élevages. L'essentiel de bêtes est en effet conduit "à l'abattoir", note Patrick Laugier. L'éleveur n'en retire alors qu'un prix modique, "1 à 2 euros le kilo" explique-t-il. 

Pour l'ancien président de l'AEFTC, l'élevage de taureaux de combat est rarement une activité rentable. Si une partie des éleveurs en vivent, d'autres poursuivent cette activité par passion et se diversifient pour gagner leur vie. Le fait que les animaux ne finissant pas dans l'arène soient abattus lui apparaît assez inéluctable : en effet, il fait remarquer que les taureaux de combat ont été conçus pour cette activité et manifestent lorsqu'ils grandissent une agressivité considérable. Y compris entre congénères : "Si vous laissez 50 taureaux adultes dans un champ, vous les retrouverez morts au bout de six mois ou un an", souffle-t-il. Des animaux "conditionnés", tels qu'il les décrit, "qui vous foncent dessus alors qu'ils sont encore des veaux" et qui s'entretueraient à coup sûr.

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Thomas DESZPOT

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