CLUSTERS - 85 détenus de la prison de la Santé sont isolés après la découverte de 26 cas de Covid-19. Un coup dur pour les familles dont les parloirs ont été suspendus sine die.
"C'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase", s'énerve Margot*, compagne d'un des 900 détenus que compte la maison d'arrêt de la Santé. Depuis un an, date du premier confinement après l'arrivée en France du Covid-19, le nombre de parloirs, stoppé pendant plus de trois mois au printemps avant une reprise à l'été, a été réduit et les conditions de leur déroulement modifiées.
Mais alors qu'un nouveau cluster a été détecté dans la prison parisienne au "quartier de confiance", appelé aussi "module respect" ou "respecto", les règles sont devenues encore plus strictes. "C'est un quartier où les détenus circulent librement habituellement. Deux cas de Covid-19 y ont été diagnostiqués en février. Les 85 détenus qui l'occupent ont été testés et 26 ont été positifs au Covid. Du coup, tous les détenus qui s'y trouvent ont dû être isolés, comme l'exigent les mesures sanitaires et les parloirs ont dû être suspendus. On ne sait pas pendant combien de temps", précise à LCI un agent pénitentiaire sous couvert d'anonymat.
"Personne ne nous a appelés pour nous informer de cela. Seuls les détenus qui ont des téléphones en cellule ont pu faire passer l'information à leurs proches afin qu'ils ne se déplacent pas pour rien", critique Margot qui n'a pas vu son compagnon depuis deux semaines et qui ne pourra pas le voir avant deux semaines au moins même si les parloirs reprennent. Ce dernier vient d'être testé positif.
Plus aucun contact
Si Margot attend avec impatience son prochain parloir, elle dénonce toutefois les conditions dont ceux-ci se déroulent depuis plusieurs mois, avec notamment l'installation de plexiglas pour éviter tout contact qui pourrait entraîner une intrusion du virus en maison d'arrêt. "On ne peut plus se prendre dans les bras. Les enfants ne peuvent pas avoir de contact avec leur père, c'est très dur et même inhumain", regrette-t-elle.
De surcroît, les parloirs en famille ont été suspendus. "Avant une maman pouvait venir avec un, deux ou trois enfants. Mais depuis un an, c'est un enfant par parloir, pas plus. Du coup, pour les familles nombreuses, les enfants ne peuvent voir leur père qu'une fois par mois, et en ce moment, plus du tout avec le cluster", poursuit-elle.
Leila, mère de famille aussi et dont le mari est détenu, pointe du doigt certains évènements dont elle dit avoir été témoin au "quartier de confiance" de la Santé. "Nous respectons nous, visiteurs, scrupuleusement les règles sanitaires. Certains surveillants, eux, ne portent pas de masque ou le mettent sous le nez. On ne peut pas se toucher, s'embrasser, au motif qu'il y aurait des risques. Mais il y a des cas positifs en prison, il a bien fallu que le virus arrive jusque–là. Et en l'occurrence, il ne peut venir des familles et des proches".
Au QB3 "avec les terroristes"
Les visiteuses ne sont pas les seules à mal vivre la situation. Derrière les barreaux, la vie est aussi très difficile. Pour les cas contacts et les détenus infectés, les promenades ont été réduites à une par jour, à raison de groupe de 5 personnes maximum. Les activités et le travail ont été suspendus. "Mon conjoint a besoin d'être entouré. Il n'a vu personne depuis un mois et demi en raison du Covid, relate Emilie. Il a d'abord été cas contact. Du quartier de confiance, le QB1, on l'a passé au QB3, où sont les détenus radicalisés et où il a été isolé à un autre étage. Il n'a même pas pu prendre ses affaires quand ils l'y ont conduit. Il est resté une nuit sans chauffage, il a eu des gamelles pour repas. Apparemment, les locaux n'étaient pas forcément prêts pour accueillir les positifs au Covid. Puis il est revenu au quartier de confiance, avant de repartir au QB3 car il était à nouveau cas contact, et de revenir au quartier de confiance. Depuis, il a eu le Covid."
"On a l'impression que nos hommes sont parqués comme des bêtes dans leur cellule. Certains sont isolés, d'autres conduits dans le bâtiment des terroristes. On ne peut pas leur amener de vêtements propres ou de livres. Ça n'est pas comme ça que l'on traite les gens. La plupart d'ailleurs ne sont pas condamnés encore, ils sont donc présumés innocents", renchérit Carole.
Rumeur d'une vaccination générale
Autre point sensible pour ces femmes, une réunion qui se serait tenue mercredi dernier au cours de laquelle aurait été question de vacciner tous les détenus. "On a peur que cette information soit vraie. Et qu'en cas de refus, on refuse aux détenus de voir leur famille ", glisse Emilie.
L'agent pénitentiaire que nous avons contacté assure qu'il n'y a pas eu de réunion sur le sujet. "Les critères de priorité en détention sont les mêmes qu'à l'extérieur, 'personnes de plus de 75 ans', 'personnes vulnérables'... Il n'a pas été question à ce jour de généraliser la vaccination. Quant à l'imposer, c'est bien sûr interdit et impossible", rétorque-t-on à l'administration pénitentiaire.
Margot et les autres espèrent aujourd'hui un assouplissement des règles au plus vite pour que certains ne craquent pas. Elles aimeraient notamment que les plexiglas soient retirés, que les fréquences des parloirs reprennent un cours normal et que les parloirs familiaux reprennent, quitte à ce qu'un test PCR négatif soit demandé à l'entrée.
Pourquoi pas non plus faciliter dans un tel contexte qui est exceptionnel et pour ceux en attente de jugement en cette crise sanitaire, des mesures existantes, comme la semi-liberté ou le bracelet électronique. "Nous avons bien conscience que les surveillants dont la grande majorité respecte les consignes sanitaires, ne font qu'appliquer un protocole. La décision d'assouplir les règles doit être prise par les autorités", s'accordent-elles à dire.
Pour l'instant, cela n'est pas, semble-t-il, d'actualité. "Notre priorité aujourd'hui est de tout faire pour éviter une suspension totale des parloirs comme en mars. Nous faisons au mieux, nous avons conscience que ça n'est pas facile pour les familles, mais nous devons respecter les consignes des autorités de santé", rappelle l'Administration pénitentiaire.

La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté fait des propositions
Depuis le début de la pandémie, plusieurs clusters ont été détectés dans les prisons françaises. Mercredi, un cluster de 69 personnes contaminées au coronavirus, des détenus et membres du personnel, a été identifié à la maison d'arrêt de Tours, où les incarcérations ont été suspendues, a annoncé mercredi la direction interrégionale des services pénitentiaires de Dijon.
Au total, 65 détenus sur 212 ont été contaminés, ainsi que quatre agents et surveillants sur 77.
La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGPL) Dominique Simonnot a rappelé à cette occasion "ses recommandations aux autorités publiques d’engager, comme au printemps dernier, un nouvel allègement de la surpopulation carcérale et de doubler cette mesure salutaire d’un plan de vaccination spécifique aux établissements pénitentiaires". "En outre, le seul dépistage des arrivants s’avère nettement insuffisant, alors que cette grave pandémie nécessite des campagnes de tests très régulières et de grande ampleur", a-t-elle ajouté dans un communiqué.
*Tous les prénoms figurant dans cet article ont été modifiés.
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