PAUVRETÉ - Selon le baromètre annuel du Secours Populaire paru ce mercredi, la précarité a atteint des niveaux records ces derniers mois avec la crise sanitaire.
Le nombre de précaires n'a jamais été aussi important depuis la Seconde Guerre mondiale. A l'occasion de la publication, ce mercredi, de son quatorzième baromètre annuel de la pauvreté, réalisé avec Ipsos, le Secours Populaire sonne l'alarme. Pendant les deux mois du confinement, 1.270.000 personnes ont sollicité l'aide de l'association dans ses permanences d'accueil, contre 3,3 millions sur toute l'année 2019. Parmi ces demandeurs, 45% n'avaient jusque-là jamais franchi la porte du Secours Populaire.
"Nous n'avons jamais vécu une situation pareille depuis la Deuxième Guerre mondiale, et il y a urgence", affirme Henriette Steinberg, secrétaire générale de l'association, qui craint que le nombre de personnes en situation de précarité ne continue d'augmenter. "Beaucoup n'avaient jamais demandé d'aide à personne. Et là, non seulement ils n'ont plus de quoi se nourrir, mais ils ne peuvent plus payer leur loyer ni l'électricité".
Lire aussi
Peut-on lier la mortalité du Covid-19 à la pauvreté ?
Lire aussi
La crise du coronavirus "pourrait faire basculer 60 millions de personnes dans l'extrême pauvreté"
Lire aussi
Coronavirus : 500 millions de personnes dans le monde menacées par la pauvreté
800.000 suppressions d'emploi attendues cette année en France
Familles monoparentales, personnes âgées, étudiants, mais aussi intérimaires, ou travailleurs indépendants : personne ne semble plus à l'abri de la précarité, selon le Secours populaire qui voit les files d'attente pour les distributions alimentaires s'allonger devant ses permanences. "Ce qui nous inquiète particulièrement, c'est la fermeture de petites entreprises, comme celles du bâtiment ou de la restauration qui représentent beaucoup d'emplois et qui sont obligées de licencier", poursuit la responsable associative. "Vous n'avez qu'à regarder le nombre de rideaux baissés qui n'ont pas rouvert après le déconfinement", dit-elle.
En France, la forte hausse du chômage déjà enregistrée en 2020 risque de continuer, avec 800.000 suppressions d'emplois attendues cette année selon la Banque de France. Selon Le Groupe de la Banque mondiale, à l'échelle mondiale, la pandémie de Covid-19 pourrait faire basculer jusqu'à 60 millions de personnes dans l'extrême pauvreté, "effaçant une grande partie des récents progrès réalisés dans la lutte contre la pauvreté".
Des étudiants dans la détresse
Alors qu'avant la crise sanitaire, les étudiants étaient déjà 20% à vivre sous le seuil de pauvreté, ceux-ci, nombreux à occuper de petits boulots pour financer leurs études, se retrouvent aussi durement touchés par la crise sanitaire. Kab Niang, responsable de l'antenne du Secours populaire à l'université Paris-8 en témoigne auprès de l'AFP. Il a fait livrer plus de 1.800 colis alimentaires à ses camarades durant le confinement. "D'habitude on fait une cinquantaine de colis par mois. Mais en 24 heures, j'ai reçu 250 demandes. Et chaque semaine, les demandes étaient plus nombreuses", explique cet étudiant en master de littérature française. "Beaucoup d'entre nous n'avaient plus aucune source de revenus, c'était la galère, même pour payer un loyer de 300 euros en coloc ou en chambre universitaire", dit-il.
Pour compléter les aides fournies par les associations, surtout composées de produits de base comme les pâtes ou le lait, il a lancé une cagnotte avec les professeurs de fac, et récolté jusqu'à 50.000 euros. "De quoi acheter des fruits, des légumes ou des produits d'hygiène, mais aussi un 'fonds d'urgence' pour aider ceux qui étaient le plus mal à payer leurs factures", assure Kab Niang.
Les plus modestes davantage touchés par le Covid-19
D'après les travaux de quatre économistes français, "le Covid-19 tue d’abord, et de façon particulièrement importante, les plus modestes".
En croisant les données de mortalité, le revenu des communes et les zones de déconfinement, ils ont observé que les trois quarts des communes du territoire français considérées comme les plus riches, qui "connaissent un excès moyen de mortalité, dû au Covid-19, de 50 % pour l’année 2020". De l’autre, "dans le quart des communes les plus pauvres, il atteint 88%".