Cryogénisation d’une adolescente britannique : en France, que dit la loi ?

Publié le 18 novembre 2016 à 18h17, mis à jour le 18 novembre 2016 à 18h32
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Source : Sujet JT LCI

UNE VIE APRÈS LA MORT ? – Quelques jours avant sa mort d’un cancer, la justice britannique a autorisé une adolescente à se faire cryogéniser après son décès dans l’espoir que les avancées technologiques futures permettent de la ressusciter. Une telle décision serait-elle possible en France ? LCI fait le point sur cette question existentielle.

Les amateurs de Louis de Funès et du film Hibernatus y ont peut-être déjà songé : et si je me faisais congeler ou cryogéniser, en attendant que la science soit un jour capable de me ressusciter ? Sans doute se posent-ils encore plus la question en apprenant vendredi qu’au Royaume-Uni, une adolescente de 14 ans ayant récemment succombé à un cancer a obtenu quelques jours avant sa mort le feu vert de la justice pour que son corps soit cryo-conservé, dans l’espoir de la faire revivre dans plusieurs siècles. 

Sa dépouille a été transférée le mois dernier dans l'un des rares pays où il est possible de la congeler, les Etats-Unis. Elle se trouve désormais au sein de l’Institut de cryogénisation. Installé dans le Michigan, c'est l’un des quelques établissements à travers le monde à avoir développé les techniques de conservation à basse température des corps dans l’azote liquide (il compte aujourd’hui une centaine de "patients", sa compatriote pionnière dans le secteur, la société Alcor, affirmant sur son site en accueillir 148).

Le juge qui a rendu cette décision inédite au Royaume-Uni a expliqué l’avoir prise pour que soient respectées la volonté de l'adolescente et non pour trancher la question de la cryogénisation. "C'est un exemple des nouvelles questions que la science pose à la loi", a-t-il souligné. 

Cryogénisation : mode d'emploiSource : Sujet JT LCI
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En France, ce serait non

Une question à laquelle la justice française aurait, elle, dit non. Car si chez nous, la loi du 15 novembre 1887 affirme le droit pour tout un chacun d’organiser comme il le souhaite ses propres funérailles (et ceux qui ne respectent pas les dernières volontés d'un mort risquent 6 mois de prison et 7.500 euros d'amende), tout n’est pas non plus permis : seules l'inhumation ou l'incinération, et rien d'autre (quoi que, on peut aussi donner son corps à la science), sont autorisées par la loi.

Ainsi dans l'affaire Martinot, ce docteur qui avait fait congeler le corps de sa femme, avant de faire placer sa propre dépouille dans un caisson réfrigéré à sa mort en 2002, le Conseil d'Etat avait jugé quatre ans plus tard que si "le choix du mode de sépulture" est "intimement lié à la vie privée", il "peut faire l'objet de restrictions, notamment dans l'intérêt de l'ordre et de la santé publique". Le fils du couple ne voulait pas en rester là et comptait saisir la Cour européenne des Droits de l’Homme. Mais il avait finalement dû se résoudre à faire incinérer ses parents en 2006, à la suite d’une panne de leur caisson réfrigéré.

Et si "l'appareil à congélation " était enterré, ne pourrait-on pas "considérer qu'il y a inhumation" et envisager d'autoriser cette pratique, avait la même année interrogé un sénateur, appelant à "entamer une réflexion" sur le sujet en France, dans une question écrite au gouvernement. La réponse de celui-ci avait alors été ferme : "La possibilité qui est évoquée d'enterrer le caisson réfrigéré en vue de considérer qu'il y a bien eu inhumation ne peut être retenue", notamment parce que "les deux modes de sépulture"acceptés en France, l'enterrement et la crémation, "ont pour finalité la disparition des corps et par voie de conséquence la libération régulière d'emplacements dans les lieux d'inhumation. ( ) Le gouvernement n'entend pas faire évoluer le droit en la matière".


Gilles DANIEL

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