SPORT - L'enseigne française commercialise un hijab de running au Maroc et souhaite désormais l'étendre à d'autres pays. En France, cette nouvelle a fait réagir une partie de la classe politique. Ce mardi , la marque a indiqué "assumer complétement le choix de rendre le sport accessible pour toutes les femmes dans le monde."
Le fournisseur français d'équipements sportifs, Decathlon, va proposer dès la mi-mars, un hijab pour les femmes musulmanes qui souhaitent courir dans l'espace public. Un article qui n'est, pour l'heure, vendu qu'au Maroc.
Mise en ligne sur la version française du site, dans la journée de lundi, la fiche technique a rapidement déclenché une polémique. "Decathlon renie donc les valeurs de notre civilisation sur l'autel du marché et du marketing communautaire", a par exemple lancé Lydia Guirous, porte-parole des Républicains.
Bonjour, Rassurez-vous, nous ne renions aucune de nos valeurs. Nous avons toujours tout fait pour rendre la pratique du sport plus accessible, partout dans le monde. Ce hijab était un besoin de certaines pratiquantes de course à pied, et nous répondons donc à ce besoin sportif. — Decathlon (@Decathlon) 25 février 2019
Interrogée mardi sur RTL, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a souligné qu'un tel produit n'est "pas interdit par la loi". Mais "c'est une vision de la femme que je ne partage pas. En tant que femme c'est comme ça que je le vis. Tout ce qui peut amener à une différenciation me gêne. J'aurais préféré qu'une marque française ne promeuve pas le voile". La députée LaREM Aurore Bergé a posté une réaction dans laquelle elle dit "ne plus faire confiance à une marque qui rompt avec nos valeurs".
Le sport émancipe. Il ne soumet pas. Mon choix de femme et de citoyenne sera de ne plus faire confiance à une marque qui rompt avec nos valeurs. Ceux qui tolèrent les femmes dans l'espace public uniquement quand elles se cachent ne sont pas des amoureux de la liberté. #Decathlon — Aurore Bergé (@auroreberge) 26 février 2019
"L'erreur a été la publication prématurée de la fiche produit alors que le stock n'est pas encore disponible", s'était expliqué Decathlon sur Twitter dans un premier temps avant d'ajouter mardi un message sans ambiguité : " Nous assumons complètement le choix de rendre le sport accessible pour toutes les femmes dans le monde. C'est presque un engagement sociétal, si cela permet à des coureuses de pratiquer la course à pied, nous l'assumons avec sérénité", a expliqué le responsable communication externe de Decathlon United.
"Volonté que chaque femme puisse courir (..) indépendamment de sa culture"
"L'engouement pour le produit a fait que nous nous sommes posé la question de le rendre disponible" ailleurs qu'au Maroc, a détaillé Xavier Rivoire, soulignant que "ce couvre-tête laisse le visage libre et visible".
Responsable du jogging chez Kalenji, la gamme de course à pied de l'enseigne, Angélique Thibault, qui a conçu le "Hijab Kalenji", se dit "mue par la volonté que chaque femme puisse courir dans chaque quartier, dans chaque ville, dans chaque pays, indépendamment de son niveau sportif, de son état de forme, de sa morphologie, de son budget. Et indépendamment de sa culture".
En attendant, la fiche produit a été retirée des sites français et marocain. La marque, qui plaide pour "la tolérance et la démocratisation du sport", appelle à éviter les amalgames et explique ce choix pour répondre à une demande. "La raison est plus sportive que financière. Certaines femmes nous ont exprimé ce besoin, et n'avaient pas de produit adapté à leur manière de pratiquer leur sport. Avec ce hijab, nous répondons simplement à ce besoin."
Reste que derrière ces propos se cache néanmoins une réalité économique non-négligeable. De fait, selon le rapport 2018-2019 de Dinar Standard - Thomson Reuters, la "mode islamique" pourrait générer 320 milliards d'euros d'ici 2023.
La commercialisation de produits ciblant les femmes musulmanes fait régulièrement polémique en France. Comme, en décembre 2017 quand la marque Nike avait lancé un hijab de running. Face aux critiques, Nike avait rétorqué avec un clip "What will they say" (Que diront-ils?). Des sportives voilées et non-voilées pratiquaient leur passion sous le regard désapprobateur de la foule silencieuse. La vidéo se refermait sur un encouragement à toutes les femmes.