Déconfinement : la situation sanitaire est-elle vraiment pire qu'il y a un mois ?

Publié le 3 mai 2021 à 18h23, mis à jour le 4 mai 2021 à 18h21

Source : JT 13h Semaine

ÉTAT DES LIEUX - Le déconfinement s'amorce à l'heure où les chiffres de la circulation du Covid-19 restent à un niveau élevé. Voire plus élevé qu'avant l'annonce des dernières restrictions par Emmanuel Macron le 31 mars dernier comme avancé par le Pr Philippe Juvin ? On fait le point.

Ce lundi marque la première étape du calendrier de déconfinement annoncé par Emmanuel Macron. Si le pays connaît une décrue des entrées à l'hôpital et en réanimation, avec une baisse respective de 13% et 18% ces sept derniers jours par rapport à la semaine précédente, les chiffres restent cependant à un niveau élevé.

"On a un peu l'impression que le gouvernement a voulu déconfiner quoi qu'il en coûte, quoi qu'il arrive", a commenté lundi sur Cnews Philippe Juvin, chef des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou, jugeant que cette décrue était "trop lente". Jeudi sur France Inter, ce dernier avait même attiré l'attention sur le fait qu'"on va déconfiner avec des chiffres moins bons que quand on a confiné". Vraiment ? 

Que disent les chiffres à l'hôpital ?

Pour appuyer son propos, Philippe Juvin cite notamment  les chiffres dans les hôpitaux où la situation ne s'est effectivement pas vraiment améliorée. "On avait 4200 patients en réanimation en France quand on a confiné il y a un mois et demi. Et là on est presque à 6000 !", dénonçait-il ainsi jeudi. Depuis, cet indicateur est redescendu mais 5600 personnes étaient toujours en soins intensifs dimanche, soit un seuil qui n'avait plus été atteint depuis le mois d'avril 2020.  "Aujourd'hui, les indicateurs qui sont choisis pour déconfiner ne sont pas des indicateurs qui témoignent du taux de remplissage en réanimation", regrette le médecin.

S'agissant des hospitalisations, le bilan n'est guère plus réjouissant. Ce dimanche 28.818 personnes étaient hospitalisées pour Covid contre 28.581 début avril, signe que les établissements de soin sont encore sous tension. À titre de comparaison, le 15 décembre 2020, lors du précédent déconfinement, 25.240 étaient hospitalisés pour Covid en France, dont 2881 en réanimation.

Que penser du taux d'incidence ?

En ce premier jour de déconfinement, précisément comme il y a un mois, seuls cinq départements affichent un taux d'incidence inférieur à 100, dans l'ouest de la France, tandis que dans plusieurs autres, dont le Val-de-Marne ou la Seine-Saint-Denis, il dépasse 400. À l'échelle nationale, le nombre de cas de Covid-19 pour 100.000 habitants dépasse toujours les 250, soit l'ancien "seuil d'alerte maximale". À titre de comparaison, le 15 décembre dernier, cet indicateur atteignait 119 au niveau national et était inférieur à 100 dans près de la moitié des départements français.

Pour rappel, Emmanuel Macron se réserve le droit de ralentir le rythme du déconfinement, notamment dans les régions où le taux d'incidence serait au-dessus de 400. "Ça représente à l'échelle nationale 38.000 nouveaux cas par jour", explique Philippe Juvin, tout en rappelant qu'"en décembre le Président parlait de déconfiner si on passait en dessous des 5000 cas par jour". La preuve que selon lui, "on a dégradé nos exigences de déconfinement" après avoir "perdu beaucoup de temps en janvier, février, mars".

Que dit le nombre de nouveaux cas ?

C'est sans doute l'indicateur qui invite le plus à l'optimisme lorsqu'on le compare à la situation d'avant confinement. Si à la fin du mois de mars, près de 40.000 nouvelles contaminations étaient enregistrées chaque jour en moyenne, seuls 25.000 nouveaux cas quotidiens sont recensés actuellement. Mais là encore, il convient d'apprécier avec prudence cette décrue, encore loin du fameux objectif des "5000 cas par jour" fixé par Emmanuel Macron à l'automne dernier et qui n'a d'ailleurs pas été atteint depuis le mois d'août.

Lors du second confinement, 50.000 nouveaux cas quotidiens étaient recensés contre à peine 10.000 un mois plus tard.

Quid du nombre de décès

À l'instar du nombre d'hospitalisations et du nombre de patients en réanimation, le nombre de décès quotidien reste lui aussi élevé. Depuis fin mars, cet indicateur s'est même dégradé, passant de 250 décès quotidiens en moyenne à plus de 280. Mais il est à noter que les données relatives à la mortalité, "en décalage", reflètent la situation d'il y a trois à quatre semaines, une amélioration étant attendue dans les prochains jours.

Il n'en demeure pas moins que face à cet indicateur également, Philippe Juvin juge le déconfinement précoce et risqué. "En Grande-Bretagne, qui déconfine, il y a 20 morts tous les jours", souligne-t-il.


Audrey LE GUELLEC

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