Le Premier ministre a confirmé ce mercredi qu'une "décision claire", devant notamment permettre "un retour à la normale" concernant "l'ordre public", serait prise "avant fin janvier" au sujet du projet de construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
"Là où, jusqu’à présent, le raisonnement était de savoir si on faisait Notre-Dame-des-Landes ou rien, le rapport propose deux solutions : la construction de Notre-Dame-des-Landes ou le réaménagement de l’aéroport de Nantes Atlantique." Voilà les propos tenus par Edouard Philippe devant la presse, après avoir reçu le nouveau rapport rendu par trois experts sur le projet de Notre-Dame-des-Landes, ce mercredi.
Là où jusqu’à présent le raisonnement était de savoir si on faisait #NDDL ou rien, le rapport propose deux solutions : la construction de #NDDL ou le réaménagement de l’aéroport de Nantes Atlantique. pic.twitter.com/ki3ZMEGWPU — Edouard Philippe (@EPhilippePM) 13 décembre 2017
Le rapport des médiateurs ne tranche pas vraiment entre les deux solutions : transfert de l'aéroport à Notre-Dame-des-Landes ou son maintien, avec un réaménagement, à Nantes-Atlantique. Ce sont deux options "raisonnablement envisageables", estiment les médiateurs.
Les différentes analyses de la médiation "confirment l'absence de solution parfaite, chaque option apparaissant marquée par au moins un handicap significatif sur un critère particulier", l'environnement et l'étalement urbain pour le projet de Notre-Dame-des-Landes, les nuisances sonores "significatives" pour l'aménagement de Nantes-Atlantique, soulignent dans leur rapport les experts nommés par le gouvernement pour l'aider à décider de la suite ou non du projet controversé.
Pour autant, dans son discours à la presse, Edouard Philippe a paru découvrir cette nouvelle option, de réaménagement de Nantes-Atlantique. Et la présenter avec une certaine satisfaction, ou soulagement. "Le rapport nous invite à réfléchir sur un choix qui se formaliserait plutôt de la façon suivante : Notre-Dame-des-Landes ou un réaménagement de l'aéroport de Nantes-Atlantique", a-t-il répété, estimant que ce rapport avait donc permis "d'identifier des sujets qui n'ont pas suffisamment fait l'objet d'analyse".
Dans les faits, pourtant, cetet hypothèse n'est pas nouvelle, et est étudiée depuis longtemps. Elle a même été chiffrée dans un rapport présenté en 2013 à la demande de la Commission du dialogue, en ligne sur le site du ministère de la Transition écologique. Ce réaménagement de l’existant, c’était aussi l’hypothèse portée de longue date par les opposants à Notre-Dame-des-Landes, qui avaient piloté leurs propres études sur le sujet.
C'est d'ailleurs ce que rappelle l'ex-président des Pays de la loire et fervent défenseur du dossier, Bruno Retailleau.
#NDDL : Les 2 solutions ont déjà été étudiées. Les contraintes environnementales autour de l'aéroport de #Nantes empêchent son développement. Le Grand-ouest est habité par 8 millions de personnes, il nous faut un nouvel aéroport. L'Etat de droit doit être respecté. #BFMTV — Bruno Retailleau ن (@BrunoRetailleau) 13 décembre 2017
Serait-ce une manière, pour le chef du gouvernement, d’amorcer délicatement un début de sortie de crise, en présentant cette option, comme nouvelle et tout juste sortie du chapeau ? Une porte de sortie sans avoir l'air de plier ?
Le Premier ministre a en effet reconnu, rapport à l'appui, que les besoins en infrastructure étaient réels, au vu de l’augmentation du trafic aérien. L'aéroport existant frôle en effet la saturation, d'après les chiffres des pro-aéroport, et les prévisions tablent sur une croissance de ce secteur-là. "Les besoins liés au développement du transport aérien dans le grand Ouest justifient la réalisation d’une plateforme qui sera dimensionnée sur les hypothèses de trafic connues", a ainsi indiqué l'ancien maire du Havre. Une manière de donner un point à chaque camp ?
Le rapport des médiateurs sur #NDDL confirme le besoin d’un aéroport pour le Grand Ouest dimensionné pour absorber des trafics qui vont presque doubler d’ici 2040. https://t.co/fVot9n7b4t — Edouard Philippe (@EPhilippePM) 13 décembre 2017
En ce jour de remise du rapport, une délégation des 300 pro-aéroport, composée, accompagné entre autre de la maire de Nantes Johanna Rolland, est venu à Paris, porter leur message : ce nouvel aéroport est "utile, légal et validé démocratiquement".
Merci à @Johanna_Rolland présente à nos côtés à Paris . Elle marque l’importance de #NDDL pour la sécurité des nantais et le développement économique du Grand Ouest pic.twitter.com/FyU12msVMJ — Ailes pour l'Ouest (@ailespourlouest) 13 décembre 2017
Mais les anti-aéroport semblent penser qu'avec ce rapport, la balance penche, enfin, de leur côté...
Si avec ce rapport @EmmanuelMacron @EPhilippePM ont tous les éléments en mains pour enterrer définitivement #NDDL ! Projet du passé, défendu par les hommes du passé @BrunoRetailleau @jeanmarcayrault @ailespourlouest — Sebastien Mabile (@SebastienM) 13 décembre 2017
Anne Boquet, une des expertes, estime ainsi que les opposants n'ont pas été "assez écoutés" dans ce dossier.
« Nous n’avons pas assez écouté les opposants dans ce dossier. Il y a eu des failles dans le débat démocratique, dès le début de la création de la Zad en 1974... » dit Anne Boquet #NDDL — Arnaud Wajdzik (@awajdzik) 13 décembre 2017
Le rapport complet devrait être mis en ligne dans l'après-midi. Edouard Philippe a proposé aux élus et parties prenantes qui le souhaitent de les recevoir "afin de faire de la pédagogie" et "entendre leurs réactions à la publication de ce rapport". Le gouvernement tranchera d’ici la fin janvier, ainsi que l'avait déjà formulé Emmanuel Macron. "Cette décision sera claire, assumée par le gouvernement, et doit permettre de répondre aux besoins identifiés et garantir un retour à la normale largement attendu par les habitants de cette région", a ainsi résumé le chef du gouvernement.
Vers une capitulation inédite de l'Etat de droit
Guillaume Peltier
Devant la gestion du dossier, certains pro-aéroports font déjà part de leurs doutes. Guillaume Peltier, porte-parole des Républicains (LR), a prédit ce mercredi une "capitulation inédite" de "l'Etat de droit", au regard des zadistes qui occupent le terrain où devait être construit le deuxième aéroport. "Quand j'écoute le président de la République, les déclarations de son porte-parole monsieur Griveaux, ou le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, je dis que nous sommes à la veille d'une capitulation politique et démocratique inédite sous la Ve République", a-t-il déclaré sur Cnews. Il pointe d'ailleurs deux des médiateurs, "Michel Badré et Gérard Feldzer, sont des proches identifiés, caractérisés, de Nicolas Hulot, de sa fondation et des associations écologistes".
Ce dimanche, dans le JDD, l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault avait lui aussi prévenu, comme en anticipation : "Ce projet a fait l’objet de toutes les concertations possibles. Plus de 180 recours ont été déposés par les opposants, tous ont été perdus. Le projet a donc été approuvé juridiquement et démocratiquement, puisque le référendum organisé par le président Hollande a validé le transfert de l’aéroport à plus de 55 %. Passer outre ce référendum serait un déni de démocratie".