Des tracteurs dans Paris : pourquoi les agriculteurs sont-ils en colère ?

par Annick BERGER avec AFP
Publié le 8 février 2023 à 10h49

Source : TF1 Info

Des centaines de tracteurs ont convergé vers la capitale française ce mercredi 8 février.
Ils veulent manifester contre les "contraintes" pesant sur le monde agricole.
Et notamment les restrictions d'usage des pesticides.

Cela faisait trois ans qu'ils n'avaient pas convergé en nombre vers la capitale. Mercredi 8 février au petit matin, des centaines de tracteurs ont pris la route direction Paris pour manifester leur colère et leur inquiétude face aux "contraintes" qui pèsent sur le monde de l'agriculture. "Près de 500 tracteurs" et plus de "2000 paysans" se sont rassemblés selon la FNSEA, premier syndicat agricole en France. Il faut dire que depuis des mois, les doléances se multiplient chez les professionnels du secteur.

Les insecticides au cœur de la colère

Ils sont le symbole de la colère des agriculteurs. Le gouvernement a décidé, le 23 janvier dernier, de renoncer à autoriser les néonicotinoïdes pour la culture de la betterave sucrière. Ces produits sont appliqués préventivement sur les semences pour les prémunir de la jaunisse, maladie virale qui menace les rendements des champs. L'utilisation de ces insecticides, toxiques pour les abeilles, est interdite depuis 2018, mais ils bénéficiaient d'une dérogation en France depuis deux ans. Un régime d'exception qui devait être prolongé en 2023, mais le gouvernement a dû revoir sa politique après une décision de la Cour de justice de l'Union européenne qui a estimé ce type de dérogations illégales. 

Mais la fin de ces dérogations n'est que "la partie émergée de l'iceberg", selon Damien Greffin, président de la FNSEA Grand Bassin parisien et agriculteur dans l'Essonne. Car les agriculteurs pointent l'interdiction d'autres insecticides comme le phosmet qui "compromet" la culture de cerises ou celle d'un désherbant pour les endives. Selon le responsable syndical, on assiste ainsi à "une hécatombe des filières agricoles, les unes après les autres" et "à ce rythme-là, l'agriculture française va disparaître". 

La question des coûts et de l'eau

Ces derniers mois, les agriculteurs se sont également rassemblés par petits groupes à travers le pays pour dénoncer la hausse des coûts de production du fait de la flambée des prix de l'énergie ou encore pour réclamer de stocker de l'eau pour irriguer leurs cultures. Selon la FNSEA, "les agriculteurs se retrouvent aujourd'hui en butte à des contraintes réglementaires de tous ordres qui freinent les projets innovants dans les territoires (irrigation, bâtiments d'élevages...)" et "sont aujourd'hui confrontés à des impasses de solutions face à des menaces sanitaires sur les cultures ou face à la prédation".

Mais cette manifestation parisienne n'est pas soutenue par tous. Si la Coordination rurale, deuxième syndicat représentatif, a affirmé avoir proposé à la FNSEA Grand bassin parisien de se joindre à la manifestation - demande à laquelle elle assure avoir essuyé un refus - la Confédération paysanne dénonce, elle, des positions "réactionnaires". Le troisième syndicat agricole français, qui se mobilisait mardi contre la réforme des retraites, a déploré dans un communiqué que "d'autres" manifestent "pour continuer à utiliser des néonicotinoïdes et refuser toute avancée écologique". "L'ambition de progrès social fait face ici aux positions les plus réactionnaires et conservatrices", a estimé l'organisation.

La dernière mobilisation d'ampleur du monde agricole remonte au 27 novembre 2019, quand un millier de tracteurs avaient mené des opérations escargot sur le périphérique à Paris. Les manifestants dénonçaient, déjà, un durcissement des règles concernant l'épandage de pesticides de synthèse avec la création de zones de non-traitement (ZNT), des bandes de quelques mètres à proximité des habitations où il est interdit de recourir à ces substances.


Annick BERGER avec AFP

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