À LA LOUPE - Les cantines scolaires et d'entreprises envahies de viande étrangère ? C'est en tout cas ce qu'affirme Hervé Juvin, candidat Rassemblement national aux élection européennes, sur l'antenne de France Inter le 18 avril. D'après lui, "plus de 70 % de la viande dans la restauration collective est importée." À La Loupe s'est penché sur le contenu de nos assiettes, pour le moins cosmopolite.
Invité à la matinale de France Inter, le 18 avril, Hervé Juvin, candidat RN aux élection européennes, a affirmé que "plus de 70 % de la viande dans la restauration collective est importée et produite dans des conditions qu'aucun éleveur français ne serait autorisé à pratiquer chez lui."
Un chiffre également avancé par le député MoDem Richard Ramos lors d'un amendement dépose en 2018. Qu'en est-il vraiment ?
Absence de chiffres officiels
Précisons tout d'abord qu'il n'existe pas de statistiques spécifiques sur la part de viande importée proposée en restauration collective, c'est-à-dire dans les cantines scolaires et les selfs d'entreprise, comme nous l'a confirmé le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. "La structure très complexe de la restauration collective ne permet pas d'avoir un suivi global de l'origine des approvisionnements." En effet, la restauration collective peut être gérée par les entreprises ou les collectivités elles-mêmes. "Ce secteur est très éclaté : il n'existe pas de vision consolidée des approvisionnements," nous précise le ministère.
Ce flou sur l'origine de la viande et des autres produits servis en restauration collective est en passe d'être réglé. FranceAgriMer travaille actuellement sur une étude complète sur le sujet. "Les producteurs français veulent connaître les besoins en restauration collective pour lutter contre la concurrence étrangères," nous explique l'organisme. Car si résultats de l'étude ne sont pas encore publiés, beaucoup d'indices concordent vers une forte présence de viande étrangère dans nos cantines.
Paradoxe entre la cantine et le frigo des Français
En l'absence de données nationales, les professionnels du secteur peuvent nous éclairer sur des tendances. Paul Rouche, directeur-délégué de Culture Viande, syndicat qui regroupe les principales entreprises françaises des viandes, estime qu' "en restauration collective, environ 70% de la viande de poulet est importée et 40% pour le porc. Mais il ne s'agit pas pourcentages précis." En 2014, Interbev, l'association interprofessionnelle établissait, dans une étude, que 66% de la viande bovine consommée hors-domicile était importée.
Paradoxe : lorsqu'on se penche sur la consommation nationale des Français, ceux-ci mangent plutôt de la viande Made in France. D'après les chiffres du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, 75% pour le bœuf, 70% pour le porc et 55% pour le poulet. Ainsi, les chiffres de la consommation nationale de viande sont l'exact inverse de ceux de la restauration collective. Comment expliquer cette situation contradictoire ?
Des règles trop strictes ?
Si les entreprises privées qui proposent un service de restauration sont libres pour déterminer les conditions d'achat des produits, les collectivités sont, elles, soumises au code des marchés publics. Elles doivent respecter les règles du marché commun déterminées par l'Union européenne et ne peuvent pas exiger ce qu'elles veulent dans le choix des produits.
Même s'il existe des subtilités dans les règles des marchés publics, comme des tours de passe-passe pour imposer des productions locales, tout cela reste compliqué pour les collectivités. "On peut demander que la viande soit Label rouge par exemple, mais il existe des labels équivalent en Europe, donc ça ne garantit pas que la viande viendra de France," nous confie Isabelle Maincion. La seule préférence possible est de demander une origine communautaire par rapport à de la viande hors-UE par exemple.
Alors quelles solutions ? D'après l'élue, "il faut simplifier les règles pour les collectivités et permettre davantage de proximité." Des difficultés de préférences nationales que nous a également confirmées par l'Association des départements de France.
Un changement de conscience
"Notre profession est confrontée à de nouvelles exigences sociétales, comme le bio et le local," explique Dominique Bénézet, délégué du syndicat national de la restauration collective. "Les prestataires des selfs et des cantines proposent de plus en plus de produits de proximité car il y a une vraie attente."
Malgré un changement dans les consciences, les collectivités - comme les écoles ou les hôpitaux - ont un marge de manœuvre limitée à cause du prix qu'elles peuvent demander. Prenons l'exemple de la cantine d'une école primaire. Les mairies, qui proposent ce service aux enfants, doivent surtout tenir compte du prix, comme nous l'explique Isabelle Maincion, vice-présidente de l'Association des maires de France. "Aujourd'hui, un repas dans une cantine coûte déjà 7,50 à 8 euros, mais seulement un quart de ce prix est consacré aux aliments. Le reste sont les frais de personnel et les coûts des fournisseurs."
Le véritable problème est que les produits de proximité sont souvent plus chers. Dominique Bénézet se montre également sceptique sur l'obligation de 20% de bio en restauration collective publique d’ici 2022. "Cela va favoriser les importations car notre production agricole n'est pas prête pour atteindre cette objectif et les fournisseurs devront s'appuyer sur le bio étranger."
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