Fake news, misogynie… Le site d'info américain Breitbart devient-il partenaire de Facebook ?

Publié le 28 octobre 2019 à 16h59
Fake news, misogynie… Le site d'info américain Breitbart devient-il partenaire de Facebook ?

Source : Photo d'illustration ROBYN BECK / AFP

À LA LOUPE – Facebook lance aux États-Unis un onglet dédié à l'actualité sur le réseau social, et souhaite ainsi lutter contre la désinformation. Connu pour relayer des fake news, le site d'extrême droite américain Breitbart va-t-il faire partie des médias partenaires ?

Empêtré dans une série d'affaires, Cambridge Analytica en tête, Facebook subit des critiques récurrentes en Europe et aux États-Unis. Candidate à l'investiture démocrate pour la présidentielle 2020, Elizabeth Warren a même annoncé vouloir démanteler le réseau social si elle était élue. Accusé d'encourager la propagation de fausses informations, le site géré par Mark Zuckerberg a présenté le 25 octobre une nouvelle fonctionnalité : un onglet dédié à l'actualité. Lancé outre-Atlantique, ce "Facebook News" devrait être étendu progressivement à travers le monde.

Annoncée au printemps, la mise à jour visait à promouvoir les informations de "haute qualité". Comment, dès lors, expliquer la présence de Breitbart News aux côtés des autres médias partenaires tels que le Wall Street Journal, NBC News ou le New York Times ? Accusé – entre autres –, de relayer des fake news, va-t-il recevoir de l'argent de la plateforme, en échange d'une mise en avant de sa production ?

Breitbart News, un site sulfureux

Si la liste des quelque 200 sites partenaires n'a pas été communiquée, le nom de Breitbart News a fuité et été confirmé par… Bretibart News lui-même. La nouvelle a même fait l'objet d'un article au titre sans équivoque que l'on pourrait traduire par "Les grands médias en PLS : les journaleux flippent en voyant l'ajout de Breitbart à Facebook News". L'auteur de l'article compile une série de tweets réprobateurs et savoure l'effroi provoqué dans une partie de l'opinion par l'inclusion du site dans ce nouveau service.

Habituée à être couverte d'opprobre, la rédaction de Breitbart est familière des provocations. Décrit comme "conservateur", "pro-Trump", proche de la "droite populiste américaine" le site lancé en 2007 s'est forgé une réputation sulfureuse, notamment grâce à celui qui est devenu son chef en 2012 avant de rejoindre la campagne de Donald Trump à l'été 2016 et de travailler à la Maison blanche, Steve Bannon. 

On doit à ce site, très apprécié de l'"alt-right" (l'extrême-droite aux États-Unis, ndlr.) des articles ouvertement misogynes, comme celui affirmant que "La contraception rend les femmes moches et folles", mais aussi des publications aux accents xénophobes. Son autre spécialité : la diffusion de fausses informations, en particulier lorsqu'il s'agit de décrédibiliser les opposants de Donald Trump. 

En 2016, Télérama citait les mots de Tom Rosentiel, directeur exécutif de l’Institut de la presse américaine, pour qui le travail de Breitbart était un "journalisme d’affirmation, pas de vérification". Si une version française du site, annoncée en 2017, n'a finalement pas vu le jour, il faut noter que Fdesouche se revendique aujourd'hui comme son incarnation hexagonale "sur le plan politique". 

La sélection opérée par Facebook fait des vagues

Les réactions épidermiques que l'on observe aux États-Unis ne risquent pas d'être atténuées par les propos de Mark Zuckerberg. Le PDG de Facebook, qui répétait il y a quelques mois vouloir délivrer aux internautes des informations fiables et dignes de confiance ("trustworthy news", en VO), a assumé à demi-mots le choix d'inclure Breitbart dans la sélection de son onglet "news". Il s'est retranché derrière la nécessité de proposer des contenus "qui représentent des points de vue différents".

Le billet de blog annonçant le lancement de Facebook News précise que la sélection des titres partenaires suit des critères stricts, et que les sites doivent respecter les standards fixés par l'entreprise. Sont concernés la lutte contre les contenus racoleurs, les discours haineux… et la désinformation. Le réseau social rappelle au passage qu'il s'appuie sur des services tiers de vérification des faits, et assure qu'il vérifiera en permanence que ces principes soient respectés. 

Les médias qui verront leurs contenus repris par Facebook toucheront de l'argent, des sommes qui pourraient atteindre 1 à 3 millions de dollars par an. Rien ne garantit toutefois que les publications de Breitbart seront régulièrement mises en avant. Mark Zuckerberg a rappelé qu'être associé à ce dispositif ne garantissait pas des reprises fréquentes.

Vous souhaitez réagir à cet article, nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N'hésitez pas à nous écrire à l'adresse alaloupe@tf1.fr


Thomas DESZPOT

Tout
TF1 Info