EN ROUE LIBRE - Le remboursement du mois de mars pour les abonnés au Vélib' a été voté jeudi lors d'un conseil de Paris. L'occasion pour l'opposition d'un tir de barrage contre l'exécutif et la maire de Paris Anne Hidalgo.
Trois mois de retard. 450 stations ouvertes, soit "moins de la moitié" de ce qui était prévu. Pour celles installées, des bugs techniques en série. Des abonnés qui ne se réabonnent pas – ils seraient environ 128.000 à être concernés, sur les 290.000 que comptait le réseau Vélib en décembre 2017. Jeudi, le cas Vélib’ était évoqué en Conseil de Paris, à l’occasion du vote d’une délibération permettant de rembourser aux usagers les abonnements du mois de mars.
L’adjoint aux Transports, Christophe Najdvoski, a reconnu un service "convalescent". "Le compte n'y est toujours pas, du point de vue du nombre de stations, mais aussi des qualités du service fourni", a-t-il précisé, devant une assemblée particulièrement houleuse.
Un remboursement qui ne résout pas tout
Le remboursement a été voté. La même mesure était déjà en place pour janvier et février. Pour mars, elle doit encore être formellement approuvée par le Syndicat d'élus gestionnaire Autolib' Vélib' Métropole. Mais dans tous les cas, pas sûr que ce remboursement suffise à calmer les esprits. Car les élus de l’opposition ont multiplié les vœux et les demandes sur le sujet. Tous dénoncent la "gestion catastrophique" par l'exécutif parisien du changement de l'opérateur du service, passé au 1er janvier de JCDecaux au consortium Smovengo.
Car pour la plupart, ce remboursement est une évidence. "Cette politique d’indemnisation pour cause de préjudice subi me paraît le B-A-BA", indique ainsi Eric Azière, conseiller de Paris (UDI-Modem). Maud Gatel, conseillère de Paris UDI Modem, a d’ailleurs pointé des modalités de remboursement particulièrement "complexes". "C’est une illustration parfaite du fiasco du nouveau service", a-t-elle avancé. "Pour se faire rembourser ce crédit, il faut effectuer une demande écrite à la Ville, remplir un formulaire, attester du montant du crédit", explique-t-elle. Elle cite la suite de la délibération : "Ce montant sera vérifié suite à l’émission du bilan certifié et adressé par le gestionnaire de la convention de mandat, la SOMUPI puis par le syndicat pour les autres clauses." Avant de questionner : "Si quelqu’un a compris, vous m’expliquerez !". "On, est très loin de la simplicité, et pourtant ce n’est pas anecdotique : cela concerne 128.000 abonnés pour un montant moyen 5 euros, soit un total de 640.000 euros". Elle doute, d’ailleurs, "que beaucoup des abonnés étaient au courant de cette disposition" : "Le remboursement doit être simple, automatique, et ne pas nécessiter de démarche de l’abonné."
Critiques en série
Si Eric Azière appelle à mettre les querelles politiques en sourdine le temps que le service soit opérationnel, aucun ne se prive de tomber à bras raccourcis sur l’exécutif. "Les Parisiens sont attachés à Vélib, il est désormais un symbole ; et pourtant le désamour n’est pas loin", déplore Julie Boillot, conseillère LR de Paris. "La maire de Paris aura réussi ce tour de force d’affaiblir ce symbole parisien : 128 000 abonnés originels ne veulent pas migrer vers Vélib 2." Elle dénonce un processus défaillant de bout en bout. "De la réalisation de l’appel d’offre à l’exécution du contrat, rien ne roule : trois mois de retard, un cahier des charges incomplet, six semaines de retard pour choisir le design des bornes, Smoovengo qui interrompt les négociations pour reprendre le personnel de Cyclocity, l’épineux problème de l’électrification qui a créé par ricochet une situation de crise... et la mairie qui se dédouane de toute responsabilité... Tout est approximation, louvoiement et petites lâchetés."
Jérôme Dupus, PPCI (Parisiens progressistes, constructifs indépendants), veut voir, dans cette délibération, le "faire-part de décès de Vélib 1" : "C’est un fiasco technique total", assène-t-il. "Il y a des responsables qui doivent rendre des comptes, et ils se cachent ! La Ville de Paris et son exécutif, Smovengo qui se déclare responsable de rien, c'est la faute à pas de chance, à JCDecaux, à la neige... Tout ceci donne l’impression d’une espèce de débâcle. On avait un service public qui marchait à peu près et voilà qu’il est par terre."
Nous avons clairement trois mois de retard
Christophe Najdovski, élu aux Transports
Les élus de gauche, Jean-Noël Aqua pour le PCF FG et Danielle Simonnet conseillère de Paris Parti de Gauche ont dénoncé plus généralement les failles du système de délégation de service public. "Nous avions prédit le naufrage", a ainsi dit Jean-Noël Aqua, dont le groupe avait voté contre la passation à ce nouveau prestataire. "Le changement de prestataire a mené à une rupture dans la continuité du service public." Des problèmes qui ne doivent pas occulter, a précisé Danielle Simonnet, que le système de JCDecaux n’était pas non plus à l'abri de toute critique.
Face à ces tirs groupés, seuls en scène, la maire de Paris n’étant pas présente, Christophe Nadjovski a reconnu les faits. "La situation de Vélib’ nous préoccupe tous", a-t-il dit, déclinant les chiffres. "La situation de Vélib' nous préoccupe tous. Nous avons clairement trois mois de retard." L’élu a tout de même tenté d’avancer quelques points positifs : le nombre de trajets quotidiens qui augmenterait, passé de 6 000 abonnés il y a 15 jours à 20.000 ou encore la hausse du nombre d’abonnements. Christophe Najdovski indique organiser un point d’avancée tous les mois avec toutes les parties prenantes. Le service devrait être pleinement opérationnel en juin.
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