MAINTIEN DE L'ORDRE - Plus de trois mois après le début du mouvement des Gilets jaunes, le Conseil de l'Europe a appelé mardi 26 février à "suspendre l'usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre" en France afin de "mieux respecter les droits de l'Homme".
Le débat sur l'usage des lanceurs de balles de défense (LBD) s'invite au Conseil de l'Europe. L'institution composée de 47 Etats du continent, qui œuvre pour les Droits de l'Homme et la démocratie, est en effet intervenue sur cette question sensible ce mardi 26 février. Depuis son siège à Strasbourg, elle a appelé à "suspendre l'usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre" en France afin de "mieux respecter les droits de l'Homme" dans le cadre du mouvement des Gilets jaunes.
La commissaire aux Droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, a déclaré que dans "l'attente d'(une) révision" de "la doctrine d'emploi des armes de force intermédiaire", les autorités françaises devraient "suspendre l'usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre".
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Des questions sur "les méthodes employées"
La commissaire a également assuré "condamner fermement les violences commises à l'encontre des membres des forces de l'ordre" et "déplorer le nombre important de blessés dans leurs rangs", mais en rappelant que leur "tâche première (...) consiste à protéger les citoyens et leurs droits de l'Homme". Dunja Mijatović estime en effet que "le nombre et la gravité des blessures" infligées aux manifestants "mettent en question la compatibilité des méthodes employées dans les opérations de maintien de l’ordre avec le respect de ces droits".
Le gouvernement français a rapidement fait une réponse officielle, reprenant les décisions prises au niveau national : "Le Conseil d'Etat a estimé que les armes de type LBD étaient pleinement adaptées aux situations dans lesquelles elles ont été employées". De fait, des demandes d'interdiction du LBD, formulées par la Ligue des Droits de l'Homme et par le défenseur des droits Jacques Toubon, avaient déjà été rejetées par le Conseil d’État.
Pour rappel, selon des chiffres du ministère de l'Intérieur en date du 4 février, 2060 manifestants ont été blessés, dont 69 considérés en "urgence absolue". Depuis, de nouvelles manifestations ont eu lieu, occasionnant plus de potentiels blessés, difficiles à recenser. Au 30 janvier, plus de 9000 tirs de LBD avaient été recensés par le ministère de l'Intérieur.
La loi anti-casseur également visée
Dunja Mijatović invite également les autorités françaises à ne pas apporter de "restrictions excessives à la liberté de réunion pacifique" à travers la proposition de loi controversée "anticasseurs" adoptée début février par l'Assemblée nationale. Elle dénonce "le pouvoir donné aux préfets (...) d’interdire à une personne constituant 'une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public', de participer à une manifestation", jugeant qu'il s'agirait d'"une grave ingérence dans l’exercice du droit à la liberté de réunion".
La commissaire, dont les recommandations s'appuient sur une visite à Paris effectuée en janvier, suggère aussi de renoncer à "ériger en délit la dissimulation volontaire 'sans motif légitime' de tout ou partie du visage au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation". Dans sa réponse officielle, le gouvernement français indique qu'il avait voulu préciser la nature du délit qui porte désormais sur les manifestations lors desquelles "des troubles à l'ordre public sont commis ou risquent d'être commis".