La grève coûte cher pour ceux qui la font, d'autant plus avec le contexte de hausse des prix.Des caisses de solidarité sont mises en place pour soutenir le portefeuille des grévistes.Des initiatives fleurissent également sur Internet et ailleurs pour collecter des dons.
L’argent, c’est le nerf de la grève, surtout quand la lutte s’annonce pour durer ! Caisses de grève ou de solidarité, cagnottes en ligne, vente de goodies ou encore marathon de stream sur Twitch... Syndicats et organisations politiques font feu de tout bois pour tenir dans la durée et soutenir le portefeuille des grévistes, alors que des grèves reconductibles ont été déjà annoncées dans plusieurs secteurs, l'énergie et le transport notamment. La grève coûte cher pour ceux qui la font, qui plus est en période d’inflation. Et le Code du travail est clair, un jour de grève n’est pas rémunéré. Et c'est tout l’intérêt justement de ces fameuses cagnottes.
Apparues au début du XIXe siècle, au moment de la révolte des Canuts lyonnais, que beaucoup considèrent comme l’acte de naissance du mouvement ouvrier, elles font leur retour en force. Selon nos confrères du journal Le Figaro, il y en aurait actuellement plus de 400. Pour Gabriel Rosenman, un ex-cheminot devenu sociologue qui prépare une thèse sur le sujet, ce phénomène est lié au fait que "la pression financière sur les salariés est plus importante", mais aussi du fait que certains employeurs en jouent en n'étalant plus les retenues sur salaire, souligne-t-il. "Les pouvoirs publics jouent beaucoup sur le poids que représentent ces pertes de salaire, abonde l'historien Stéphane Sirot. Ça fait partie du rapport de force."
À la Confédération française démocratique du travail (CFDT), tout comme chez Force ouvrière (FO), une "prestation de grève" est versée aux adhérents qui se mobilisent sous forme d'"indemnités". Ce coup de pouce est financé en partie par les cotisations des adhérents. Le budget alloué à cette cagnotte par la CFDT pour l’année 2023 se chiffre à "un million d'euros", indique à l’AFP Jean-Michel Rousseau, chargé de la caisse qui gère aussi les actions juridiques. "On a une réserve dont tout le monde parle, de 140 millions d'euros, mise de côté depuis 50 ans" dans laquelle il serait possible de piocher au besoin, ajoute-t-il. Avec ce système, "on sait dès le début du conflit qu'on indemnise à 7,70 euros de l'heure", précise le syndicaliste. FO, pour sa part, préfère garder le montant secret.
Au sein des autres organisations, Solidaires et la CGT ont opté pour des caisses non centralisées, dans un but de "transparence". Le mois dernier, la CGT a réactivé sa "Cagnotte Solidarité CGT Mobilisation", qui avait été lancée en 2020 sur la plateforme Leetchi. Son montant atteint plus de 645.000 euros. En 2016 a aussi été lancée en ligne une "Caisse de solidarité" gérée par Info’Com CGT avec SUD-Postes 92. Pour le conflit actuel, elle a récolté près de 665.500 euros (plus de 4 millions depuis 2016). "C'est la première fois qu'on collecte autant en amont des grèves reconductibles", indique Romain Altmann, d'Info'Com CGT, coordinateur de cette caisse. "Syndiqué ou non", pour prétendre à une aide, "il faut avoir fait deux jours de grève consécutifs", explique-t-il.
Marathon en ligne sur Twitch pour récolter des dons
D'autres initiatives fleurissent, comme côté politique avec la "Caisse de grève Insoumise". Lancée en octobre dernier, la cagnotte comptabilise déjà plus de 330.000 euros. Une somme qui sera "entièrement reversée à des caisses de grévistes mobilisés", indique La France insoumise sur son site internet. Une part non négligeable de cet argent provient de deux événements organisés sur la plateforme Twitch à son initiative, derrière le hashtag "#GrevEvent". Le week-end dernier, après la première édition du 12 février, streamers et blogueurs étaient à nouveau réunis pour collecter des dons en proposant des contenus variés sur les réseaux sociaux. Résultat, "50.000€ récoltés en quelques heures, qui viennent s’ajouter aux plus de 70.000€ déjà récoltés le 12 février", se félicite l'organisation dans un communiqué.
A ces cagnottes en ligne se combinent également des pratiques aussi vieilles que le droit de grève en lui-même, comme les quêtes sur le bord des manifs, l'organisation de repas de fête (sur le principe des "soupes communistes" historiquement prises en commun par les grévistes) ou encore des spectacles de solidarité. A l'instar de l'opération lancée par le réalisateur Gilles Perret, qui vise à mettre des films à disposition pour des projections, chaque organisateur reversant ensuite le bénéfice à la caisse de son choix. "On en est à 350 soirées-débats", réalisées ou programmées, indique le cinéaste. Le réalisateur du film documentaire "Debout les femmes" avec l'Insoumis François Ruffin ambitionne de collecter 150.000 euros de dons "d'ici à la fin du mois".
Il y a toujours des pertes pour le salarié qui est en grève
Un syndicaliste, à Miramas près de Marseille.
Si ces cagnottes grossissent, elles ne permettent pas de compenser le sacrifice financier consenti par les grévistes, comme l'expliquent syndicalistes et salariés grévistes dans la vidéo en tête de cet article. "Ça peut les aider à ce que ça fasse un peu moins mal au porte-monnaie" mais "il y a toujours des pertes pour le salarié qui est en grève", soulignent ces deux salariés encartés à la CGT, présents ce mercredi matin à Miramas, près de Marseille. En dépit du versement de ces indemnités, "les salariés ne peuvent pas être mobilisés systématiquement car cela représente un coût énorme à la fin du mois avec les pertes de salaires", soulignent un autre. En moyenne, avec un salaire horaire de 11,30 euros net, un employé du secteur privé perd 79,10 euros sur une journée de sept heures. À volume horaire égal, un ouvrier perd 82,60 euros et un cadre 193,20 euros.
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