Hébergement touristique : des discriminations en fonction de l’origine ethnique ou du lieu de résidence des clients

Publié le 23 novembre 2017 à 12h41, mis à jour le 23 novembre 2017 à 14h28
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Source : Sujet JT LCI

ENQUÊTE - Une étude de SOS Racisme et du CNRS dévoilée ce jeudi fait état des discriminations en France dans l'accès aux bien et aux services, dont l'hébergement touristique. LCI a pu se procurer les résultats de cette enquête qui révèle des véritables écarts.

Il l'a annoncé le 14 novembre dernier dans son discours sur la politique de la Ville. Emmanuel Macron souhaite "traquer les employeurs qui ne respectent pas ce qui est dans la loi qui interdit la discrimination à l'embauche comme à la promotion" et "pénaliser les entreprises qui ont recours à ces pratiques". Et selon l'enquête "Diamant" de SOS Racisme et du CNRS dévoilée ce jeudi, il y a encore du travail.

Pour réaliser ce testing de grande envergure, plus de 2.500 tests ont été ainsi réalisés sur la base de plusieurs offres, nécessitant nécessité l'envoi de plus de 15.000 demandes à des opérateurs dans sept secteurs différents. L'objectif de l'étude "Diamant" est de mesurer les freins dans l'accès à formation professionnelle, l’achat d'une voiture d'occasion, la souscription à une assurance automobile, une complémentaire-santé ou un crédit à la consommation, la reprise d'entreprise, et l'hébergement touristique.

Six profils test et des réponses différentes

Sur chacun de ces marchés ont été évalués les discriminations à raison de l’âge, du sexe, de l’origine et du lieu de résidence. Pour ce faire, les chercheurs ont créé six profils fictifs types : un homme de 22 ans d’origine française, une femme de 22 ans d’origine française, un homme de 22 ans d’origine africaine, une femme de 22 ans d’origine africaine, un homme de 22 ans d’origine africaine résidant dans un quartier dit "politique de la ville" et un homme de 42 ans d’origine française. 

Hormis ces différences, les six candidats présentaient exactement les mêmes caractéristiques et déposaient les mêmes dossiers. Les résultats sont pourtant bien différents. "On a trouvé globalement beaucoup d’inégalités de traitement aussi bien dans l’accès aux biens ou aux services que dans les prix pratiqués", analyse pour LCI Yannick L’Horty, l’un des auteurs de l’étude. 

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Éloquant dans son ensemble, et inédit en ce qui concerne les cas de discriminations dans l’accès à l’hébergement touristique. Point sur lequel nous avons donc décidé de nous pencher plus spécifiquement. Le rapport soulignant, en effet, qu’il s’agit de la "première étude d’envergure sur le sujet d’une discrimination dans l’accès aux services touristiques, malgré de nombreuses infractions avérées dans le secteur en France". En tout, 1.433 établissements d’hébergement de loisirs - campings, hôtels et chambre d’hôtes - ont été testés entre avril et juin 2015 dans trois grandes régions : PACA, Bretagne et Pays de la Loire.

Il existe une discrimination forte quels que soient le type et la localisation des hébergements due à l’origine ethnique suggérée et à la réputation des quartiers où résident les clients

SOS Racisme

Alors que la femme de 22 ans d’origine française a reçu une réponse positive dans 54,2% des cas, celle du même âge mais d’origine africaine n’a reçu une réponse positive que dans 47,8% des situations. L'écart est encore plus significatif si l'on compare les réponses positives du quadragénaire d'origine française (63%) avec le jeune homme d'origine africaine (49,3%) ou le jeune homme résidant en quartier dit "politique de la ville" (46,3%).

Ainsi, "pour obtenir 10 réponses positives à ses réservations, un jeune résidant dans un quartier ayant une mauvaise réputation doit envoyer 6 messages de plus (22 contre 16) à des établissements d’hébergements de loisir qu’un quadragénaire résidant dans un quartier neutre, soit près de 40% de candidatures en plus", note l'étude. 

Et de conclure : "Il existe une discrimination forte quels que soient le type et la localisation des hébergements due à l’origine ethnique suggérée et à la réputation des quartiers où résident les clients, souligne l’étude. La discrimination liée au genre ou à l’âge des clients est soit non significative soit de faible ampleur, à l’exception des chambres d’hôtes qui ont tendance à écarter plus régulièrement les candidats jeunes". 

Des discriminations dans tous les secteurs du quotidien

Le reste de l'étude pointe du doigt d'autres discriminations, notamment liées à l'âge. "Pour accéder à un crédit à la consommation, le candidat âgé de 42 ans aura une réponse positive dans 65% des cas alors qu'un candidat jeune, avec les mêmes caractéristiques, n'aura que 40% de chances d'obtenir ce crédit", analyse pour LCI Yannick L'Horty.

Dans le cadre d'une souscription à une assurance automobile, c'est le lieu de résidence qui représente le critère de discrimination le plus important. Alors qu'un homme de 22 ans d'origine française pourrait prétendre à un tarif annuel de 621 euros, celui résidant en quartier politique de la ville devra payer 681 euros, soit une différence de 60 euros.

Autre point abordé dans l'étude : la complémentaire santé. Alors qu'une jeune femme de 22 ans d'origine française reçoit 88,5% de réponses positives, son homologue africaine n'en reçoit que 86,5%. "On ne voit pas de raison médicale qui pourrait expliquer cette différence de traitement", note Yannick L'Horty. Il s'agit certainement d'une discrimination statistique par les assureurs".

Et le rapport de conclure : "Etudier les discriminations par la seule entrée du marché du travail est réducteur, les personnes issues des quartiers, d’origine étrangère, ou d’autres minorités, sont pénalisées dans l’accès à l’emploi et dans l’accès au logement, comme l’ont montré de nombreuses études. Mais elles sont aussi pénalisées dans l’accès à de nombreux biens ou services pourtant indispensables dans une trajectoire d’insertion sociale et économique".


La rédaction de TF1info

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