Le complotiste américain Alex Jones est au cœur d'un procès pour diffamation.En cause, ses propos sur la tuerie de Sandy Hook de 2012, qu'il décrivait comme un "canular".Devant les familles des victimes, il a reconnu son irresponsabilité ce mercredi.
Caché derrière son écran, il encaissait l'argent. Pendant des années, Alex Jones s'est enrichi sur le dos de victimes dont il niait la souffrance. Après avoir profité de chaque drame qui a secoué les États-Unis pour diffuser des fausses informations, cette figure bien connue de la sphère complotiste américaine a enfin reconnu son irresponsabilité. Ce mercredi 3 août, deux semaines après le début du procès en diffamation contre lui et sa société, l'animateur du site InfoWars a affirmé devant le jury que la fusillade de l'école primaire de Sandy Hook en 2012 avait bien eu lieu.
Des mensonges, même sous serment
Un aveu qui met fin à des années de tromperies. Sur son site créé en 1999, l'animateur affirmait en effet que cette fusillade, qui a fait 26 morts, dont 20 enfants, était une mise en scène. Pour lui, il s'agissait d'acteurs payés afin de renforcer le contrôle des armes à feu. Une théorie lancée sans preuve aucune, mais assénée assez longtemps pour que ses millions d'adeptes finissent par y croire. Et portent préjudice aux familles des victimes. Ce sont elles qui ont porté plainte contre le complotiste d'extrême droite et sa société de médias basée à Austin, Free Speech Systems. Au cœur du procès, Neil Heslin et Scarlett Lewis, les parents de Jesse Lewis, mort à six ans dans la fusillade la plus meurtrière de l'histoire américaine.
À la barre, ils ont témoigné mardi de la décennie de traumatismes auxquels ils ont dû faire face. D'abord, évidemment, celui infligé par le meurtre de leur fils. Ensuite, ceux provoqués par les actions des adeptes d'InfoWars. Coups de feu tirés sur leur maison, menaces en ligne et par téléphone, harcèlement dans la rue par des inconnus. Une haine devenue bien réelle, alimentée par les théories virales du show "le plus censuré du monde". "Cela me semble tellement incroyable, que nous devions vous implorer, vous punir, pour que vous arrêtiez de mentir", a par exemple lancé le père de la victime en direction d'Alex Jones, d'après une retranscription de l'agence Associated Press.
Les mensonges étaient en effet le cœur de métier de ce Trumpiste texan de 48 ans. À la tête d'un empire médiatique en ligne, il n'a jamais cessé de l'utiliser à des fins de désinformation. Entre autres, celles sur les attentats à la bombe d'Oklahoma City et du marathon de Boston, de même que lors des fusillades de masse de Las Vegas et de Parkland, en Floride. Plus récemment, il a affirmé que le Covid-19 n'était pas dangereux et, qu'au contraire, le vaccin était une "arme de dépeuplement". Des mensonges qui ne s'arrêtent d'ailleurs pas au monde virtuel. Seul à témoigner pour sa défense, Alex Jones s'est empêtré dans ses fausses allégations. Face au contre-interrogatoire précis et féroce des avocats des plaignants, il n'a pas trouvé les mots pour justifier la raison pour laquelle il essayait de cacher des preuves. Alors qu'il ne s'était pas conformé à la demande du tribunal de fournir certains SMS, expliquant sous serment ne pas être "un gars doué en technologie", il s'est retrouvé bien penaud lorsqu'il a appris que les avocats des victimes disposaient – grâce à une erreur du camp d'Alex Jones – de tous ses messages des deux dernières années.
Un procès pour l'exemple
Face aux faits, le complotiste professionnel a avoué ses torts, reconnaissant que la fusillade était "100% réelle". "J'ai involontairement participé à des choses qui ont blessé les sentiments de ces gens", a-t-il même reconnu. Tout en se gardant bien de souligner que cette "erreur" lui avait permis de s'asseoir sur une petite fortune. Ce qui n'a pas échappé aux avocats de la famille. En guise de rappel, Me Mark Bankston a réalisé une analogie particulièrement exhaustive. En fin de procès, il a sorti de sa poche un billet d'un dollar froissé, l'a montré à l'accusé et l'a posé devant les parents. "Le jour où le drame de Sandy Hook est survenu, Alex Jones a semé une graine de désinformation qui a duré une décennie", a-t-il déclaré, selon le récit du New York Times, "et il a arrosé cette graine, encore et encore, jusqu'à ce qu'elle porte ses fruits. Ceux de la cruauté et de l'argent".
La parole est gratuite, mais les mensonges sont payants
Mark Branson, l'avocat des familles
Dans des documents partagés par les familles des victimes, le jury a en effet pu découvrir qu'InfoWars a récolté plus de 50 millions de dollars par an ces dernières années. Par la publicité, mais aussi la vente de produits dérivés comme des t-shirts ou des pilules pour la "performance masculine". Un autre SMS, provenant d'un responsable commercial du site, indiquait à Alex Jones que son entreprise avait gagné 800.000 dollars bruts grâce à la vente de produits. En une seule journée. Soit, près de 300 millions de dollars en un an.

Au-delà du procès d'un showman qui a fait du mensonge son gagne-pain, cet événement doit désormais servir d'exemple. Pour les avocats des familles, le verdict attendu cette semaine pourrait en effet envoyer le bon signal aux autres complotistes professionnels, qui s'enrichissent sur le dos des tragédies. Car au-delà du seul aspect financier, l'impunité autour de la désinformation endommage des vies et exacerbe le traumatisme des familles. Pour reprendre la plaidoirie de Mark Branson : "La parole est gratuite, mais les mensonges sont payants. Il s'agit de créer un changement."
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