CONTESTATION - Jugeant "illégale" la décision du gouvernement d'interdire aux Français basés en dehors de l'Union européenne de revenir en France depuis le 31 janvier hors motifs impérieux, des expatriés saisissent le Conseil d'État.
C’est l’une des dernières mesures mises en place par la France pour contrer la propagation du virus : la fermeture des frontières. Dans son discours surprise du 29 janvier, le Premier ministre Jean Castex a annoncé que "toute entrée ou sortie de notre territoire, à destination ou en provenance d’un pays extérieur à l’UE, sera interdite, sauf motif impérieux". Mais cette décision, entrée en vigueur depuis le 31 janvier, ne fait pas que des heureux. Des Français basés à l’étranger la contestent même en justice.
C’est le cas de l’avocat Pierre Ciric, basé à New York, qui a déposé un recours devant le Conseil d’État. Selon lui, "il est impossible de restreindre d’aucune façon ou d’interdire à un ressortissant français de revenir en France", écrit-il dans le recours. "Il y a des motifs tout à fait légitimes de Français qui ont besoin de rentrer en France et qui, aujourd’hui, s’autocensurent", abonde l’avocat sur France info. Il fustige une mesure qui a "un effet dissuasif certain" : "vous êtes dans un arbitraire total en face d’un droit" pourtant "fondamental".
Une mesure "discriminatoire et injuste"
Dans le recours, l’avocat pointe notamment une "atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale". Il y évoque la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans laquelle il est inscrit que "toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays", mais aussi le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui stipule que "nul ne peut être arbitrairement privé du droit d’entrer dans son propre pays".
Sur les réseaux sociaux, le mouvement est partagé via le hashtag #JeVeuxRentrerChezMoi. Il est notamment soutenu par Damien Regnard (LR), sénateur des Français établis hors de France. "La France est probablement le seul pays au monde à interdire à ses ressortissants établis hors de France de rentrer chez eux", regrette-t-il dans une vidéo postée sur ses réseaux sociaux, à l’adresse du président de la République. Il dénonce une situation "discriminatoire, intolérable, injuste" et qui "ne respecte pas les fondements de la Déclaration des droits de l’homme".
Les Français bloqués à l'étranger, eux, se sentent lésés. "Depuis que j'ai quitté mon pays, j'ai toujours été rassuré par l'idée que je pouvais rentrer en France n'importe quand", témoigne sur Facebook un expatrié au Canada. "Quelqu'un que je ne connais pas vient de décider que la France, ce n'est plus tout à fait ma maison. Je pensais que j'étais le seul à pouvoir prendre cette décision."
Le conseiller élu à l’Assemblée des Français de l’étranger, Yan Chantrel, a même lancé une pétition "pour le retrait de la décision discriminatoire interdisant l’entrée et la sortie des Français de leur propre pays", destinée à Emmanuel Macron. "Le gouvernement prend des mesures attentatoires aux libertés au lieu de mettre en place de réelles mesures sanitaires efficaces aux frontières", peste-t-il dans les colonnes du Figaro. Les signataires de la pétition jugent notamment que les motifs impérieux fixés par le gouvernement "ne couvrent pas de nombreuses situations de détresse". Elle a récolté, à ce jour, près de 1800 signatures.
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