Journée contre l'homophobie : des plaintes en hausse mais qui restent "la partie émergée de l'iceberg"

M.L (avec AFP)
Publié le 17 mai 2022 à 15h08

Source : Sujet TF1 Info

En cinq ans, les plaintes pour injures, menaces ou agressions envers les personnes LGBTI+ ont doublé.
Elles ont même bondi de 28% entre 2020 et 2021.
Mais seule une personne sur cinq porte plainte en cas d'agression ou de menaces, des actes qui laissent pourtant les victimes "traumatisées et désemparées".

"Je vais te buter, sale pédé", "tu ne mérites pas de vivre" :  les plaintes pour injures, menaces ou agressions envers les personnes LGBTI+ ont doublé en cinq ans. Mais elles ne reflètent qu'une faible part de la réalité selon des données publiées lundi, à l'occasion de la journée mondiale contre l'homophobie et la transphobie prévue ce mardi. L'an dernier, 2170 crimes et délits contre les lesbiennes, gays, les personnes bisexuelles et transgenres ont été enregistrés par la police et la gendarmerie, auxquels il faut ajouter 1620 contraventions. Dans la plupart des cas (59%), les victimes ont subi injures et diffamations.

Ces plaintes ont grimpé de 12% par rapport à 2019 (avant la crise Covid) et de 28% par rapport à 2020, selon les statistiques publiées lundi par le ministère de l'Intérieur. Ces chiffres ne constituent que "la partie émergée de l'iceberg", relève Flora Bolter, de l'observatoire LGBTI+ de la Fondation Jean Jaurès. Selon l'enquête "Cadre de vie et sécurité" du ministère, réalisée sur la période 2012-2018, seule une victime sur cinq porte plainte en cas d'agression ou de menaces, et 5% en cas d'injure. 

Plus de visibilité mais aussi plus d'exposition au risque d'agression

Les personnes concernées "culpabilisent", ont peur d'être mal reçues par les forces de l'ordre ou sont confrontées à une minimisation des faits qu'elles dénoncent, analyse Lucile Jomat, la présidente de l'association SOS Homophobie. Les lesbiennes, gays, bi, trans ou intergenres sont "de plus en plus visibles, ce qui contribue à une banalisation", mais le "revers de la visibilité" est un risque accru d'agression qui laisse les victimes souvent "traumatisées et désemparées", ajoute-t-elle.

"Quand nous intervenons dans les établissements scolaires, nous rencontrons de plus en plus de jeunes très ouverts, mais aussi de personnes intolérantes : il y a une polarisation", poursuit-elle, estimant que la lutte contre l'homophobie "suppose des moyens", pour "faire avancer la société via des campagnes de sensibilisation et d'éducation".

L'an dernier, 1138 situations LGBTIphobes ont été signalées à l'association, sur sa ligne d'écoute, par courrier ou chat, détaille SOS Homophobie. Dans son rapport annuel, l'association évoque des "crachats", une intensification des coups et blessures et même des viols, ainsi qu'une "recrudescence alarmante des cas en milieu scolaire (...), dans les commerces ou au sein de la police et de la justice".

"Témoignages de détresse" pendant la crise sanitaire

Selon Beauvau, près de la moitié des crimes et délits anti-LGBT+ ont lieu dans l'espace public. Mais même chez elles, les personnes LGBTI ne sont pas à l'abri d'insultes et de brimades : la haine homophobe de la part de voisins a donné lieu l'an dernier à des "témoignages de détresse particulièrement poignants" recueillis par l'association FLAG!, créée par des policiers et fonctionnaires de justice LGBT. Avec la crise sanitaire, "beaucoup de gens se sont retrouvés coincés chez eux en télétravail, à huis clos avec des voisins violents, qui menacent, qui frappent", au point de pousser certaines personnes à envisager le suicide, raconte Flora Bolter, qui a analysé les 1148 signalements reçus en 2021 par FLAG!.

"Stéréotypes et idées reçues sont encore vivaces", relève quant à elle la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), dans un rapport également publié lundi qui alerte entre autres sur les "risques de maltraitance et de violences au sein des prisons". 

Par ailleurs, les victimes sont en majorité des hommes (73%) âgés de moins de 30 ans (51%), mais il faut relever un fait notable cette année : plus de 15% des situations signalées concernent aussi des personnes transgenres, ce qui, selon SOS Homophobie, démontre la nécessité de former davantage les professionnels concernés. Par exemple pour éviter que les trans se voient refuser un changement de prénom par l'administration.


M.L (avec AFP)

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