Jugé pour avoir aidé sa femme à mourir : "Une promesse qu’on s’était faite"

Anaïs Condomines
Publié le 22 septembre 2015 à 9h00, mis à jour le 10 novembre 2016 à 11h48
Jugé pour avoir aidé sa femme à mourir : "Une promesse qu’on s’était faite"

TEMOIGNAGE - Le tribunal correctionnel de Saint-Etienne (Loire) décide ce mardi du sort de Jean Mercier, 87 ans, qui a aidé sa femme à se suicider en 2011. A la veille de son procès, apaisé, il se confie à LCI.

Il est en route vers une réunion organisée par son comité de soutien. Ce lundi soir, au bout du fil, Jean Mercier est un peu essoufflé, "il a fait une longue marche". Péniblement, il s’assoit sur un bloc de pierre, à l’entrée d’une salle de Saint-Etienne, où ils sont nombreux à l'attendre. C’est que pour tous, et surtout pour Jean, le grand jour arrive enfin.

"Elle m'aurait mis plus bas que terre"

Cet homme de 87 ans, atteint de la maladie de Parkinson, est attendu au tribunal correctionnel de Saint-Etienne, ce mardi 22 septembre. Il est poursuivi pour "non-assistance à personne en danger". En novembre 2011, il a aidé sa femme à se suicider. Victime d’une maladie osseuse incurable et profondément déprimée, Josanne, alors âgée de 83 ans, implore son mari de lui apporter un verre d’eau et "les médicaments".

Jean s’exécute et après 55 ans de mariage, accompagne son épouse dans ses derniers instants. Il confie à LCI: "C’est une promesse qu’on s’était vraiment faite l’un à l’autre. Si je ne l’avais pas tenue, elle m’aurait mis plus bas que terre. Et elle aurait eu raison. On m’accuse de non-assistance à personne en danger. Pour moi, c’est le contraire, j’ai porté assistance à une personne en danger."

"L'émotion était terrible"

Alors Jean l’assure, aujourd’hui, il ne regrette pas son geste. Même si son monde s’est écroulé, même si c’est la solitude et la douleur qui d’abord, se sont imposées. "Au début, poursuit-il, je ne savais plus qui j’étais, je ne savais plus ce que je faisais. L’émotion était terrible et il m’est arrivé de me demander si j’avais bien fait. Et puis, aussitôt, j’ai compris que de toute façon, je n’aurais pas pu faire autrement."

D’abord mis en examen pour homicide volontaire , le vieil homme bénéficie d’un non-lieu à la fin de l’instruction. Reste l’accusation de "non-assistance à personne en danger", pour laquelle il risque cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. "Mon client est au-dessus de tout ça, nous explique Mickaël Boulay, l’avocat de Jean Mercier. Il est en paix avec lui-même, même s’il est fatigué par la procédure."

Au bout de sa promesse

Celui qui a vu sa question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative au suicide assisté rejetée par le tribunal correctionnel de Saint-Etienne en début d’année, assure qu’il plaidera la relaxe pure et simple. "Par ces poursuites judiciaires, on réprimande un défaut d’humanité. Or, Jean Mercier a eu un geste d’humanité. Il a tenu la promesse qu’il avait faite à sa femme, qui sentait qu’elle était arrivée au bout du chemin."

Jean, de son côté, souhaite dire aux juges ceci : "Si vous pensez que je suis coupable, que j’ai commis un acte méprisable, condamnez-moi à une peine sans sursis." Et il ajoute, la voix affirmée, presque plus essoufflé : "Je suis décontracté, je n’ai aucune appréhension. Le pire que je risque, ce n’est pas grand-chose. Je suis arrivé au bout de ma promesse."

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