Covid-19 : le défi de la vaccination

Le "plafond de verre" des anti-vaccins : comment convaincre cette "frange incompressible" de se faire vacciner ?

par Maëlane LOAËC
Publié le 26 mai 2021 à 18h23, mis à jour le 27 mai 2021 à 0h36
JT Perso

Source : JT 20h Semaine

VACCINATION - Après une accélération, la campagne vaccinale française risque d'être freinée cet été par les récalcitrants aux injections. Si aucun pays dans le monde n’a encore adopté la vaccination obligatoire, plusieurs initiatives visent à réduire cette marge qui menace l’immunité collective.

Rendre la vaccination contre le Covid-19 obligatoire pour venir à bout de la réticence des antivax, c’est la position défendue par l’Académie de médecine dans un communiqué publié ce mercredi 26 mai. Ce qui inquiète l’institution, c’est un essoufflement de la campagne vaccinale cet été. Le taux d’immunité collective, fixé à 80% de la population totale selon l’Académie, risque d'être manqué. 

La campagne poursuit pourtant un rythme encourageant jusqu'à aujourd'hui. Selon les données du Ministère de la Santé, près de 23,8 millions de personnes ont déjà reçu une première dose de vaccin, soit plus de 35% de la population française. Mais c’est à l’approche de l’été que la campagne devrait patiner selon l’Académie de médecine. 

Un Français sur trois ne voudrait pas encore se faire vacciner

Conséquence de ce scénario : la reprise de l’épidémie à la rentrée. Le document prévoit que “le dynamisme de la campagne va se heurter à l’obstacle des hésitants et des opposés à la vaccination”. 

Ces deux groupes réticents représenteraient 15% de la population française selon les estimations de l’institution : autrement dit, près d’un tiers des Français s’opposent ou hésitent face aux injections. Des estimations corroborées par le dernier point épidémiologiste de Santé Publique France, publié le 7 mai : 44% des sondés ne veulent toujours pas se faire vacciner pour l'instant. Parmi les raisons avancées, des doutes sur la sureté et l'efficacité du vaccin, mais les personnes concernées indiquent qu'elles seraient prêtes à changer d’avis s’il y avait "des informations qui prouvent l’efficacité et la sûreté du vaccin" (32%), "un retour à une vie plus normale" (22%) ou une nécessité de "protection de ses proches" (16%).

Ces résistances forment un “plafond" comme l'a décrit l’épidémiologiste Yves Buisson sur LCI ce mercredi, que l'on peut observer aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Israël. “On voit qu’on ne peut pas vacciner tout le monde parce qu’il y a eu une frange incompressible de gens qui refusent la vaccination ou qui hésitent à se faire vacciner”, détaille-t-il. L’Académie de médecine, de son côté, craint même que de nombreuses doses commandées restent inutilisées.

Pour autant, certains spécialistes doutent de l'absolue nécessité de l'immunité collective. Pour Robert Sebbag, infectiologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière interrogé ce mercredi sur LCI, cette immunité ne représente pas "une panacée", puisqu'elle n'est pas atteinte pour la grippe en France sans que cela ne représente “un fléau”. Il faut selon lui encourager la vaccination, mais pas l’imposer : "60 à 70% d’immunité" serait déjà de bon augure, car la plupart des personnes susceptibles de développer des formes graves seraient vaccinées selon lui. 

"Il y a une frange incompressible de gens qui refusent" : Yves Buisson sur l'obligation vaccinaleSource : TF1 Info

Dans le reste du monde, aucun pays n’a officiellement opté pour une vaccination obligatoire, mais certains ont multiplié les tentatives afin de rendre le passage par un centre de vaccination incontournable.

Pèlerinages interdits en Arabie Saoudite, une bière offerte pour une vaccination aux États-Unis

En Arabie saoudite, où le ministère de la Santé dit avoir déjà administré plus de 12 millions de doses, dans le pays de 34 millions d'habitants, les pèlerinages et voyages à l’étranger ont été interdits aux non-vaccinés cette semaine. Selon l’AFP, le royaume a également annoncé que la vaccination serait obligatoire à partir d'août pour accéder aux universités, centres commerciaux, bureaux et transports. 

Des mesures censées relancer l’économie, mais accueillies par des critiques, notamment sur les réseaux sociaux où les hashtags "Non à la vaccination obligatoire" et "Mon corps, mon choix" ont circulé.

Du côté d’Israël, un des champions de la vaccination avec 60% de la population vaccinée le mois dernier, le parlement a adopté en février une loi controversée. Elle autorise pendant trois mois les autorités sanitaires à transmettre les coordonnées des non-vaccinés aux municipalités et à différents ministères, selon Libération. Un “badge vert” pour les vaccinés régule aussi l’accès à certains lieux. En mars dernier, 80 employés de l’hôpital Hadassah à Jérusalem qui refusaient de se faire vacciner ont été placés en congé sans solde. 

Lire aussi

Des initiatives plus locales ont aussi cherché à inciter les récalcitrants à sauter le pas de la vaccination. À Tel-Aviv, des plats traditionnels, bières ou encore pizzas ont été offerts contre une injection. Aux États-Unis, des incitations insolites ont été mises en place, de la prime de 100 dollars offerte aux fonctionnaires du Maryland à une entrée gratuite pour un match de base-ball à New York, en passant par l’opération “a shot and a beer”, une bière offerte pour une injection dans le New Jersey. 

Près de la moitié de la population du pays a déjà reçu une première dose, mais la campagne vaccinale a ralenti significativement ces dernières semaines : après le record de 3,38 millions de doses administrées par jour à la mi-avril, le nombre d’injections quotidiennes a chuté de 41% en un mois d’après le New York Times

En France, la perspective n’est pas encore envisagée. “Pas d’obligation vaccinale pour l’instant, surtout que le niveau d’acceptation dans la population est actuellement très haut, le but est de l’accroître encore davantage sans contrainte”, a indiqué le Ministère des Solidarités et de la Santé au Parisien


Maëlane LOAËC

Tout
TF1 Info