Le Puy du Fou accueille 9000 personnes : pourquoi la dérogation fait polémique

par Mathilde ROCHE
Publié le 16 août 2020 à 13h17

Source : TF1 Info

POLÉMIQUE - La dérogation obtenue par le Puy du Fou pour accueillir 9000 personnes dans ses tribunes au lieu des 5000 maximum autorisées fait réagir les élus, les internautes et les acteurs du monde du spectacle, très impactés par les restrictions du gouvernement pour prévenir la propagation du Covid-19.

Près de 9000 personnes ont assisté à la Cinéscénie, le spectacle nocturne du parc du Puy du Fou samedi 15 août. Un nombre en deça des visites habituelles pour le site touristique, mais qui fait réagir alors que les rassemblement de plus de 5000 personnes sont toujours interdits en France. 

Le lieu a obtenu une dérogation pour cette soirée, déclenchant l'ire de certains élus, l'incompréhension des supporters de foot ou férus de concert et des acteurs du monde culturel qui dénoncent une injustice.

L'Elysée assure qu'Emmanuel Macron n'est pas intervenu

La principale critique formulée par les élus, comme par les internautes sur les réseaux sociaux, visait la proximité du fondateur du Puy du Fou et du président Français. Philippe de Villiers et Emmanuel Macron sont de bons amis et l'établissement est le seul dans le secteur du spectacle à avoir obtenu deux dérogations concernant les jauges de spectateurs en quelques semaines.

La polémique a d'abord été politique. La conseillère écolo de Paris Raphaëlle Remy-Leleu a dénoncé sur LCI une dérogation "irresponsable". Sur Twitter, le secrétaire du Parti Socialiste, Olivier Faure, a déploré dans cette décision une "grande confusion...". L'eurodéputée Aurore Lalucq a dénoncé ce qu'elle considère être un "passe-droit" présidentiel au Puy du Fou. Même réflexion de la part du maire adjoint de Paris, David Belliard, qui s'est exprimé sur Twitter : "Donc à partir du 15 août, le gouvernement interdit les événements de plus de 5000 personnes. Ce même 15 août pourtant, le Puy du Fou pourra, sur dérogation, accueillir 9000 personnes ! Notre santé vaut bien plus qu'un passe droit pour l'ami du président !".

L'Élysée assure cependant que cette décision a été prise par le préfet de Vendée lui-même et qu'il n'y a eu aucune intervention de la présidence, ni même un échange téléphonique avec M. de Villiers à ce sujet.

Par le biais d'un communiqué publié le 15 août à 21h30, le préfet a tenu à rappeler qu’il s’agit d’une autorisation "exceptionnelle" valable seulement pour le 15 août. Le texte fait valoir que la Vendée, "avec un taux d’incidence hebdomadaire pour 100 000 habitants de 3,66 tests positifs au Covid-19 et un taux de positivité de 0,65% (...) connaît pour l’instant une circulation du virus en net retrait par rapport au niveau national (17,35 cas pour 100 000 habitants et 2,15% de taux de positivité)."

La question de cette autorisation va se reposer : l'attribution ou pas d’une dérogation pour les spectacles du week-end du 21 et 22 août "s’appuiera notamment sur une réévaluation de la situation sanitaire ainsi que sur le respect effectif des engagements lors de la représentation du 15 août", prévient le préfet.

"Il faut faire confiance au couple maire-préfet", estime pour sa part Franck Louvrier, président du Comité régionale du tourisme des Pays de la Loire, sur LCI. "Ils prennent des décisions au plus près des enjeux économiques et sanitaires, et ce pour la protection de nos concitoyens".  

Les équipes du Puy du Fou assurent par ailleurs que le protocole sanitaire était à son plus haut niveau, et validé par les services de l’Etat. Nicolas de Villiers, fils du fondateur et actuel président du Puy du Fou, nous précise que le nombre de 9000 personnes acceptées correspond "à moins de 70% de la capacité totale des tribunes".

Le secteur culturel entre dénonciation et espoir

Reste que la décision pose question quand les stades et les salles de spectacles restent vides : les matchs se jouent à huis clos et les événements culturels sont annulés les uns après les autres. Les chanteurs et chanteuses Slimane, Hoshi et Juliette Noureddine ont exprimé leur incompréhension sur Twitter. Pour cette dernière, "les élus ne sont pas les seuls à s'indigner, tous les artistes - comme moi - qui ont quelques dates en perspective et qui tremblent qu’on les leur annule, dans des salles de 1000 places..." sont également outrés, a commenté l'artiste.

Pascal Negre, ex-président d'Universal Music France, déplore une décision qui dénote une tendance au "deux poids deux mesures" et déclare qu'en "ces temps de crise majeure pour l'événementiel, les concerts, les réunions sportives et les discothèques cela est encore plus insupportable à vivre".

Une expression choisie à l'identique par Jérome Tréhorel, directeur général du festival de musique Les vieilles Charrues, qui a lieu chaque année dans le Finistère, a partagé ce dimanche matin son "incompréhension" vis-à-vis de cette dérogation unique. "Le secteur culturel a été le premier impacté, on est toujours à l’arrêt et on a l'impression qu'il y a deux poids deux mesures dans le traitement des demandes qui sont faites pour les réouvertures" a-t-il dénoncé sur LCI, rappelant qu'actuellement des centaines de structures risquent de mettre la clé sous la porte, avec des dizaines de milliers d'emploi indirects menacés.

Dérogation polémique au Puy du Fou : "On a l'impression que c'est deux poids deux mesures"Source : TF1 Info

Il souhaite cependant rester positif : "Tant mieux que l'on puisse tester de nouveaux protocoles pour accueillir le public et que l'activité puisse enfin redémarrer". Il pense que cette initiative du Puy du Fou pourrait être "élargie" à des salles de spectacle tant que le protocole sanitaire permet l'accueil du public en toute sécurité. 


Mathilde ROCHE

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