LE POINT - Alors que la Cop23 bat son plein, plus de 15.000 scientifiques ont publié lundi 13 novembre un appel pour alerter sur le "changement profond dans notre gestion de la terre" qu’il est "indispensable d’opérer si l’on veut éviter de grandes misères humaines ". Parmi les mesures préconisées : limiter les naissances.
Ce n’est pas peu dire que l’appel est alarmant. Lundi 13 novembre, plus de 15.000 scientifiques de 184 pays différents, ont pris la plume pour alerter sur l’état de la planète, et les changements indispensables qu’il faut opérer si l’on veut "éviter de grandes misères humaines". L’appel a été publié dans sa version originale dans BioScience, repris par Le Monde.
Les signataires s’inscrivent dans la lignée d’un appel de 1992, déjà, à l’époque, alarmant. Les scientifiques "craignaient que l’humanité ne pousse les écosystèmes au-delà de leurs capacités à entretenir le tissu de la vie". Ils soulignaient que nous nous rapprochions rapidement des "limites de ce que la biosphère est capable de tolérer sans dommages graves et irréversibles". 25 ans après, le constat est accablant. "Non seulement l’humanité a échoué à accomplir des progrès suffisants pour résoudre ces défis environnementaux annoncés, mais il est très inquiétant de constater que la plupart d’entre eux se sont considérablement aggravés."
Limiter notre propre reproduction ?
Parmi les mesures préconisées pour améliorer les choses, ressort une piste, déjà évoquée en 1992 : une stabilisation de la population humaine. Il faut "prendre conscience que la croissance démographique rapide et continue est l’un des principaux facteurs des menaces environnementales et même sociétales", écrivent les signataires de l’appel. Limiter la croissance de la population, aurait un véritable impact sur le climat, autant que réduire les émissions de gaz à effets de serre, encourager le recours aux énergies renouvelables, ou encore enrayer la pollution.
Les scientifiques préconisent ainsi, urgemment, de "réexaminer nos comportements individuels, y compris en limitant notre propre reproduction (l’idéal étant de s’en tenir au maximum au niveau de renouvellement de la population) et en diminuant drastiquement notre consommation par tête de combustibles fossiles, de viande et d’autres ressources."
L'idée d'un contrôle démographique n'est pas nouvelle
Cette idée d’instaurer un contrôle démographique des populations n’est pas nouvelle, et elle est ressorti régulièrement au cours du temps. En 2009, c’est même cette question qui avait été portée au menu du Sommet de Copenhague par le Fonds des nations unies pour la population (UNFPA) : le réchauffement planétaire ne peut être endigué que par une réduction massive de la population mondiale. Dans son rapport sur l'Etat de la population mondiale, l’UNFPA citait ainsi le Giec, en 2007, qui estimait que "le PIB par habitant et la croissance démographique ont été les principaux moteurs de la hausse des émissions de carbone pendant les 3 dernières décennies du XXe siècle". Selon cette thèse, la croissance démographique est en effet un des facteurs qui influent le plus sur les émissions carbone, "tant dans les pays en développement que dans les pays industrialisés". "Dans une population donnée, chaque nouveau venu consommera des vivres et aura besoin d’un logement, et de manière générale, la plupart utiliseront des moyens de transport qui consomment de l’énergie, ainsi que du combustible pour chauffer leur maison et avoir accès à l’énergie électrique", explique ainsi l’UNFPA.
L’idée a été longuement évoquée à l’époque. En France, le député vert Yves Cochet avait même proposé de "faire moins d'enfants pour sauver la planète", et pour ça, envisageait de réduire les allocations familiales après le deuxième enfant, revendiquant par là un "néomalthusianisme modéré". Utopique ? Non-éthique ? Le magazine écologique Terra Eco a lui aussi posé le débat en 2010 : "Ne faut-il pas aussi encourager la limitation des naissances ? C’est un sujet qui paraît tabou. On comprend aisément pourquoi, mais peut-on raisonnablement l’éluder ? (...) Le débat mérite d’être lancé car ce qui est aujourd’hui un choix pourrait demain devenir une nécessité", estimait le magazine qui voyait là une "solidarité transgénérationnelle".
Sensibiliser au niveau individuel et étatique
Dans son rapport, l’UNFPA veut limiter le nombre de "nouveaux venus" afin que la population mondiale ne dépasse pas les 8 milliards d’individus en 2050, au lieu des 9 à 10 milliards escomptés. Ce qui permettrait d'avoir, d'après le climatologue Brian O’Neill du National Center for Atmospheric Research "un à deux milliards de tonnes d’émissions de carbone en moins que dans le cas du scénario de croissance démographique moyenne" de 9 milliards. Il ne s’agit pas pour autant de "contrôle des populations", prévient l’instance, qui rappelle elle aussi que le sujet est sensible, et que les Etats évitent de faire mention de la "population" dans le débat sur climat tant ils craignent de paraitre favorable à une régulation de la population. L’UNFPA se base notamment sur l’éducation des populations en voie de développement, et l’accès à un planning familial.
Reste que chaque humain n’a pas la même empreinte carbone. "Là où l’empreinte carbone d’un Américain du Nord est de 20 tonnes de CO2 par an, celle d’un Ethiopien dépasse à peine les 100 kilos, 200 fois moins…", indique ainsi Terra Eco. "L’Américain devrait ainsi soit réduire très fortement sa consommation soit réduire très fortement sa natalité, ou du moins la compenser a minima." Car il ne s’agirait pas, prévient le site, "d’instaurer des politiques coercitives à la Chinoise, avec le modèle de l’enfant unique", mais plutôt "de sensibiliser chacun au poids écologique qu’il fait porter à la planète et à sa responsabilité en tant que parent sur le nombre d’enfants qu’il a – ou souhaite avoir – et sur les modèles de consommation dans lesquels il les engage."
Une illusion ?
Au fil des années, le débat sur l’impact réel de la croissance démographique sur le climat a aussi été changeant. Dans les années 1990, des chercheurs ont plutôt mis en avant l’impact de la consommation. Fred Pearce, journaliste spécialisé dans les questions d’environnement, estimait ainsi en 2009 que "le demi-milliard de personnes les plus riches du monde – c’est-à-dire environ 7 % de la population mondiale – est responsable de 50 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone (...) Par contre, la moitié la plus pauvre de la population mondiale est responsable de 7 % seulement des émissions".
Aujourd’hui, cette thèse, qui avait tendance à "pointer" les pays riches, a un peu perdu de son emprise. Ou en tout cas, l’UNFPA rappelle qu’"il n’existe pas d’êtres humains qui n’ait véritablement aucun effet sur les émissions de carbone". "Indéniablement, la croissance démographique amplifie tous les problèmes, c'est l'élément le plus simple et le plus direct", rappelait le démographe Henri Leridon, dans Le Monde en 2009. mais pour lui, ce levier reste difficile à actionner. "C'est une "illusion de croire que l'on peut agir sur cette variable de manière simple et directe", dit-il. "C'est un processus lent, qui passe par l'éducation et se heurte à des obstacles politiques et culturels, plus encore que religieux. Il ne suffit pas de mettre des cartons de contraceptifs à disposition des gens."
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