À LA LOUPE – La plateforme est régulièrement accusée d'accentuer les tensions sur le marché de l'immobilier locatif. Pour cela, de multiples dispositifs sont imaginables, sans que soit forcément décrétée une interdiction en bonne et due forme.
La presse portugaise annonce que le maire de Lisbonne, Fernando Medina, souhaite se "débarrasser d'Airbnb" une fois que la crise du Covid-19 sera terminée. L'édile a en effet signé une tribune sur le site du journal britannique The Independant, dans laquelle il explique vouloir "transformer les locations de vacances à court terme en logements pour les travailleurs essentiels".
"Nous proposons de payer les propriétaires pour transformer des milliers de locations de courte durée en logements 'à loyer sûr' pour les travailleurs clés", ajoute le maire, des déclarations qui font écho à celles de Ian Brossat, l'adjoint (PCF) au logement à la mairie de Paris.
La balle dans le camp des villes
Peut-on imaginer dans un futur proche des villes françaises imiter Lisbonne ? Face à la hausse des loyers dans les grandes villes, à Paris en particulier, l'idée fait son chemin. Dans la capitale, Ian Brossat estime qu'en l'espace de 5 ans, plus de 20.000 logements ont été retirés du parc locatif, une situation critique dont Airbnb est souvent accusé d'être à l'instigatrice.
Interdire purement et simplement l'entreprise d'exercer son activité n'est pas envisageable, la plateforme se conformant en effet à la législation en vigueur. Il serait par ailleurs contre-productif de s'attaquer à cette seule entreprise, puisque d'autres viendraient dans la foulée prendre sa place sans que ne soit réglé le problème. C'est donc avec des outils législatifs que les municipalités peuvent agir.
En France, il faut distinguer les logements sur Airbnb en plusieurs catégories. Les résidences principales tout d'abord, que les propriétaires ont le droit de louer (en partie ou en intégralité) 120 jours par an au maximum. Il s'agit d'une disposition de la loi ELAN, votée en novembre 2018 et qui définit ce que l'on qualifié de "meublé de tourisme". Notez qu'une déclaration spécifique auprès de la mairie est nécessaire si le bien est situé dans une ville de plus de 200.000 habitants.
L'autre cas de figure, plus épineux, concerne les résidences secondaires meublées, louées sur les plateformes de type Airbnb. Ces dernières années, la législation s'est renforcée : "Si vous désirez mettre votre résidence secondaire, en location touristique de courte durée à une clientèle de passage, toujours dans la limite légale de 120 jours par an, vous êtes tenu de solliciter un changement d’usage, auprès du maire du lieu de situation du bien immobilier loué", résume l'avocate Pauline Darmigny. Ce "changement d'usage" est déclaratif partout en France, mais soumis à approbation dans les villes de plus de 200.000 habitants et dans les départements suivants : Hauts de Seine (92), Seine-Saint-Denis (93) et Val de Marne (94). Le dernier mot étant donné aux services de la ville, ces derniers sont en mesure de fixer des conditions restrictives pour accéder à une telle requête.
Des critères très sévères
Aujourd'hui, les propriétaires qui demandent un changement d'usage de leur résidence secondaire dans le but de la louer via des plateformes comme Airbnb sont déjà contraints de se soumettre à des règles strictes. "Dans la majorité des grandes villes", précise l'avocate Lorène Derhy, "le maire assortit son autorisation d’une obligation de 'compensation' sous la forme de la transformation concomitante en habitation de 'locaux à un autre usage'."
Le principe de ce système, explique-t-elle, "impose soit de proposer en compensation des locaux à 'autre usage que l’habitation” dont vous êtes propriétaire et que vous allez transformer en logements, avec l’autorisation et sous le contrôle des services municipaux compétents […] soit d’acheter un titre de compensation (ou commercialité) auprès d’un tiers, propriétaire de locaux affectés à un 'autre usage que l’habitation' (bureaux, commerces…) qu’il va transformer en logements. Il n’existe pas de tarif officiel : les prix sont négociés entre l’acheteur et le vendeur."

À défaut d'interdire l'activité de telle ou telle entreprise, l'idée est donc plutôt de rendre les conditions d'exercice de cette activité beaucoup plus difficiles. Il est ainsi possible d'engager une réflexion sur la durée annuelle maximale de location, l'abaisser permettant de réduire la rentabilité, mais aussi de réfléchir à des contraintes supplémentaires.
Amsterdam a notamment "dégainé l’artillerie lourde", rapporte France Inter, puisque la ville a acté que "la durée des locations meublées pour les touristes, dont celles pour Airbnb, passent de 60 à 30 jours par an". Conséquence de cette politique, "la capitale néerlandaise est la seule en Europe où dormir à l’hôtel reste moins cher qu’une location Airbnb". À Barcelone, l'équipe municipale a décidé depuis 2014 de ne plus attribuer de licence pour la location d'appartements touristiques. Outre-Atlantique, à Los Angeles, il est tout simplement interdit de mettre en location courte un meublé qui ne serait par une résidence principale.
En résumé, on constate donc que les villes disposent aujourd'hui de moyens variés pour compliquer la location de logements sur les plateformes de type Airbnb. Plutôt que leur interdire d'exercer leur activité, l'idée est plutôt de renforcer la législation afin de limiter le nombre de logements éligibles à des autorisations et de rendre moins attractives pour les propriétaires ces locations touristiques. Une baisse de rentabilité qui doit ainsi permettre, comme l'espèrent les municipalités, de voir des logements retourner dans le parc locatif traditionnel.
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