"Lover boys", "miol"... Cette nouvelle forme de prostitution des mineurs

Publié le 20 octobre 2014 à 20h58

DÉCRYPTAGE – L'association Agir contre la prostitution des enfants lance une campagne choc et s'alarme de certaines pratiques s'apparentant à de la prostitution dès le collège. Metronews s'est intéressé à ce phénomène à travers les nouveaux mots employés pour le désigner.

La porte des toilettes se referme et laisse entrevoir une scène sordide : une jeune fille pratiquant une fellation, son cartable posé par terre. C'est l'un des spots choc que vous verrez bientôt à la télévision – il est déjà disponible sur Internet – dans le cadre de la campagne lancée par l'association Agir contre la prostitution des enfants.

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Selon l' ACPE , plusieurs milliers de mineurs se prostitueraient dans l'Hexagone. Parmi eux, des étrangers qui vendent leur corps pour survivre, des jeunes étudiantes cherchant à payer leurs études, mais aussi, encore plus tabou, des lycéens et des collégiens. "Des chiffres officiels, il n'y en a pas. Mais en recoupant les retours du terrain, on peut estimer que cette prostitution en milieu scolaire représente environ un tiers des 5.000 à 8.000 mineurs qui se prostituent selon nous en France", soulève Armelle Le Bigot Macaux, la présidente de l'association. Pour mieux appréhender le phénomène, nous revenons avec elle, ainsi qu'avec Claire Berest, auteur de Enfants perdus*, sur trois mots liés à ces nouvelles formes de prostitution chez les jeunes.

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"Lover boys"
Le terme peut paraître doux mais il désigne une sinistre réalité : des adolescents qui monnaient leur copine, en direct ou via Internet. "Ce phénomène des 'mini-proxénètes' existe depuis plusieurs années en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas", explique Armelle Le Bigot Macaux, soulignant que son association est partie civile dans deux affaires de ce type en cours d'instruction en France. "Parce qu'elles sont amoureuses, les filles se prêtent à l'injonction de leur copain : prouve-moi que tu m'aimes en couchant avec untel, et ça coûte tant, entre 30 et 50 euros". Une pratique qui peut avoir des conséquences dramatiques car elle "renvoie à l'estime de soi".

"Caresses forcées"
Ce terme officiel utilisé par les autorités éducatives désigne une pratique bien plus crue. Agir contre la prostitution des enfants alerte avec sa campagne choc sur un phénomène encore peu connu, ces élèves de collège qui pratiquent des fellations dans les toilettes d'établissements "aussi bien situés en zone sensible que dans des quartiers huppés", "pour l'argent" ou "pour faire comme les autres". "Pour ces gamines, s'adonner à ce genre de pratiques est anodin, parce que les vrais bisous elles les gardent pour leur copain", explique Armelle Le Bigot Macaux. Qui rapporte une récente scène ahurissante dans un grand établissement parisien : "un concours de pénis" avec pour jury "des gamines de 13-14 ans". "Là aussi, on s'aperçoit à quel point nos adolescents sont dans la banalisation du corps et des relations sexuelles : c'est un jeu", s'alarme la dirigeante associative.

"Miol"
On dit aussi "mictime" à la place de "victime". Ce néologisme est désormais entré dans le jargon quotidien de la brigade des mineurs. "Il désigne ces viols bancals où l'absence de consentement n'est pas claire, où souvent la victime semblait d'accord avant de porter plainte, parfois car des images prises lors de l'acte sexuel ont circulé et que la honte ou le malaise lui ont fait prendre conscience de ce qu'elle avait subi", explique Claire Berest, qui pour son livre Enfants perdus a suivi pendant des mois le travail de la brigade des mineurs de Paris. "Il y a le cas devenu archi-classique de 'je te prends ton portable, en échange tu me fais une fellation si tu veux que je te le rende'', rapporte l'écrivain. "Des histoires très difficiles, révélatrices d'un malaise très actuel."

* Editions Plein Jour, disponible en poche chez Pocket en février prochain


Gilles DANIEL

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