Lutte contre la pédophilie dans l'Eglise : dans le huis clos d'un séminaire pour sensibiliser les prêtres

David DOUÏEB
Publié le 31 mars 2017 à 20h18
Lutte contre la pédophilie dans l'Eglise : dans le huis clos d'un séminaire pour sensibiliser les prêtres

ABUS SEXUELS – A Lyon, 77 prêtres ont participé jeudi dernier à une journée de formation. L’occasion pour eux d’aborder le thème de la pédophilie avec Latifa Bennari, qui anime des groupes de parole confrontant victimes et pédophiles. Elle raconte son intervention à LCI.

En finir avec l’omerta. Jeudi 30 mars, 77 prêtres du diocèse de Lyon ont participé à une journée de formation où a notamment été abordé le sujet brûlant de la pédophilie. Un évènement organisé depuis trois ans qui revêt toutefois une dimension particulière cette année alors que le procès canonique du père Preynat - mis en examen pour avoir agressé sexuellement des scouts mineurs dans la région lyonnaise - est actuellement en cours dans le diocèse. 

"Il y a eu un très bon accueil des prêtres qui étaient heureux d’avoir pu participer à cette journée de formation", nous atteste père Yves Baumgarten, vicaire général modérateur au sein du diocèse. L’intervention de Latifa Bennari, fondatrice de l’association L’Ange bleu (groupe de parole où pédophiles et victimes témoignent ensemble autour d’une table), a notamment suscité un vif intérêt dans l’assistance. Outre l’accompagnement des victimes, sa méthode consiste à aider les pédophiles abstinents à exprimer leurs souffrances afin d’éviter un éventuel passage à l’acte.

Améliorer l’accompagnement des victimes

Jointe par LCI, la spécialiste confie qu’elle ne s’attendait pas un accueil aussi "chaleureux" : "J'ai été sollicitée tout au long de la journée par les prêtres pour répondre à leurs questions qui portaient notamment sur l’écoute des victimes. En effet, ils sont nombreux à recevoir la confession de certaines situations incestueuses ou de maltraitances sexuelles sur enfants et trouvent des difficultés dans l'accompagnement de ces victimes". 

Et la responsable associative d’ajouter : "Les prêtres ont par ailleurs remarqué que les cellules d’écoute des victimes (mise en place récemment dans les diocèses, ndlr) ne sont pas forcément pilotées par des personnes compétentes". Selon elle, "écouter, c’est aussi répondre au cas par cas et donner des conseils pour aider les victimes à se reconstruire. Les cellules ne doivent pas uniquement servir à dénoncer". 

L’Eglise doit prendre les devants
Victime

Mais le moment fort de son intervention a été la lecture du témoignage d’une femme victime des attouchements d’un prêtre lorsqu’elle avait 12 ans (laquelle vient de déposer plainte après avoir découvert l’existence d’autres victimes). En voici quelques extraits : "Il est temps que ces hommes de Dieu se fassent entendre (...) qu’ils défendent le plus fragile, en se rappelant de cette parole ‘ce que tu fais au plus petit d’entre les miens c’est à moi que tu le fais’. Il est temps que la prévention soit également à l’œuvre, la vraie celle qui permet à ceux qui ont des penchants et ne veulent pas faire de mal, de protéger et de se protéger".

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D’après elle, l’Eglise doit prendre les devants en s’inspirant notamment de l’action de Latifa qui "permet à chacun de se parler et de s’aider" : "Les pédophiles réalisent les dégâts qu’ils ne souhaitent pas causer - ce qui est le meilleur des gardes fous - et les victimes voient des hommes qui regrettent, qui souffrent ce qui les aident à se reconstruire et à cicatriser". 

En définitive, cette journée a permis d’identifier les chantiers de l’Eglise en matière de prévention et d’accompagnement des victimes d’actes pédophiles. Reste à savoir si elle sera suivie de mesures concrètes.


David DOUÏEB

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