BAC - A Montauban, Lille ou Strasbourg, enseignants, syndicats et élèves ont manifesté contre les épreuves de contrôle continu du nouveau bac, les "EC3". A Bordeaux, la mobilisation a été particulièrement suivie au lycée Gustave Eiffel, avant de se répandre dans trois autres établissements, induisant le report ou l'annulation de cet examen.
Il faisait encore nuit quand une centaine d’enseignants et militants se sont réunis devant les grilles du lycée Gustave Eiffel, à Bordeaux, ce lundi matin. Malgré une poubelle brûlée et quelques bousculades, l’ambiance était "globalement bon enfant", assure Alexandre Diener-Froelicher, secrétaire du syndicat national des lycées et collèges (SNALC) Aquitaine. Comme nombreux de ses collègues partout en France, Alexandre est venu manifester contre les épreuves de contrôle continu du nouveau bac, les "E3C". Pourtant, étant prof d’Histoire en collège, ses élèves ne sont pas concernés. "J’étais là en tant que syndicaliste en lutte avec les collègues. Le bac comme les retraites, nous manifestons contre un ensemble de mauvaises décisions du ministère", explique-t-il.
C'est délicat de se retrouver entre le marteau et l’enclume, entre Blanquer et nos élèves stressés
Emilie, professeur de lettres au lycée Elie Faure de Lormont
Accompagné de cheminots et quelques gilets jaunes, le groupe d’enseignants et syndicalistes a enchaîné le portail pour empêcher l’entrée des élèves, obligeant la police à intervenir pour les laisser composer. "Nous avons essayé d’inciter les élèves à réfléchir, essayé d’éveiller leur conscience citoyenne pour qu’ils n’aillent pas passer ces examens. On leur a dit que le bac de toute façon il l’aurait, contrairement à leur retraite ! Les plus âgés ont eu le courage de ne pas entrer, les autres sont passés. On regrette surtout que plein de collègues ne suivent pas le mouvement", poursuit Alexandre. Parmi les élèves restés dehors pour manifester, l’un d’eux a été interpellé après avoir fait exploser une bouteille d’aérosol, heureusement sans faire de blessés. Vers 10h30, lorsque la mobilisation commençait à se disperser, certains élèves ayant raté leur épreuve ont voulu entrer dans le lycée pour réviser celle du lendemain, mais selon le syndicaliste : "l’accès leur a été interdit".
"Il y a eu des menaces et des pressions dans plusieurs établissements", assure également Emilie M., professeure de lettres dans le lycée Elie Faure de Lormont, en périphérie de Bordeaux. Elle a manifesté toute la matinée ce lundi, qui est aussi son 14ème jour de grève. "J’étais à Gustave Eiffel, puis je suis allé au lycée les Iris, puis à François Mauriac, où ma fille est en terminale. Lorsque les élèves ont fait un sitting dans la cour des Iris, le proviseur les a menacé de leur mettre un zéro s’ils ne montaient pas passer leurs examens. Certains ont fini par céder en pleurant", regrette-t-elle. "Et cette pression des chefs d’établissements s’exerce aussi sur les collègues, si nous sommes majoritairement opposées à ce nouveau bac, c’est toujours délicat de se retrouver entre le marteau et l’enclume, entre Blanquer et nos élèves stressés. La grève crée des tensions dans les équipes".
Bac national... Mais épreuves locales
"Même si la grève aujourd’hui n’était pas l’objectif", assure Alain Reiller, professeur de techno au lycée Gustave Eiffel, qui a participé au rassemblement ce matin. "Le but, c’était que les élèves ne passent pas les évaluations, montrer notre mécontentement… On n'est pas écouté et on ne peut pas travailler correctement." Bien qu’ils soient seulement une petite trentaine d’enseignants sur les 260 de son établissement à avoir perturbé la tenue des examens, Alain Reiller veut croire à leur report, voire à leur annulation. “Excusez mes mots, mais c’est le bordel ces E3C : personne n’est prêt, il y a un amateurisme navrant dans la préparation au niveau du ministère, la banque nationale de sujets a été envoyée il y a une quinzaine de jours seulement. Le but c’est juste de mettre 15 à tout le monde, ou noter en fonction des moyennes globales des lycées, quel intérêt ?”, questionne-t-il.
En tant qu’enseignante mais aussi en tant que maman, Emilie est elle aussi exaspérée par ces nouvelles épreuves "extrêmement inégalitaires" qui font du bac "un examen local", qui varie d’un lycée à un autre. "On s’oppose à ces épreuves parce qu’elles ont été très mal préparées, rien n’est fait correctement et les conditions de passations d’épreuves sont très différentes. Certains établissements ont banalisé la semaine, les élèves ont seulement leurs E3C et peuvent réviser le reste du temps, pendant que d’autres ont maintenus les cours", illustre Emilie. "Une jeune fille me disait aujourd’hui avoir eu son examen de langue vivante directement après trois heures de cours de SVT. Et pendant ce temps certains rectorats ont envoyé la partie du cours à réviser - soit le sujet de l’examen - par mail à leurs élèves ! On perd tout le sens d'un bac national".
Les élèves pris en étau entre décisions du ministère et combat des enseignants
Une situation qui atteint évidemment les élèves. "Ils sont tous très stressés, ils ne savent pas comment cela va se passer, on a beau leur dire que les épreuves sont faciles ou qu’elles ne comptent que pour 2% dans la note finale du bac, ce flou ambiant empêche de les rassurer entièrement”, explique Alain Reiller. "Et au delà des épreuves, les jeunes n’ont plus confiance dans le système sociétal qu’on leur propose. Ils ne savent pas de quoi leur avenir sera fait. Mais on essaye de leur redonner espoir, petit à petit, ils comprennent que les acquis sociaux ont été des luttes… Donc j’espère qu’ils vont pouvoir se mobiliser pour influencer les politiques", affirme-t-il.
Plus de 90% des 7 567 élèves qui devaient passer des E3C ont pu passer leurs épreuves dans de bonnes conditions
Rectorat de l'académie de Bordeaux
Sur l’académie de Bordeaux, "plus de 90% des 7,567 élèves qui devaient passer des E3C aujourd’hui ont pu passer leurs épreuves dans de bonnes conditions", indique le rectorat pour relativiser. "Sur les 34 établissements qui accueillaient ces examens, deux établissements ont seulement reporté les épreuves du matin à l’après-midi, et deux autres ont dû les annuler". Une version différente de celle des syndicats, qui assurent que cinq lycées ont été perturbés et que quatre d'entre eux - Mauriac, Blaye, Orthez et Vacla Vavel - ont annulé les épreuves.
A propos des recommandations faites aux directions sur la sanction des élèves absents, le rectorat affirme que ceux disposant d’un justificatif médical ne seront bien sûr pas concernés, mais que concernant les grévistes, et sur décision du lycée, "il se peut qu’il y ait cette éventualité d’un zéro".
Ce lundi soir, une assemblée générale inter-lycées girondins avait lieu à Bordeaux, pour coordonner la suite des actions. Demain, des épreuves E3C doivent se dérouler dans 38 établissements de l'académie, concernant 10 709 élèves de première. "On continuera les jours suivants", nous confirment nos trois interlocuteurs tour à tour. "Mais cette fois, on veut arriver avant la police donc on sera prudent de ne pas dire où et quand, y compris sur les réseaux sociaux", assure Alexandre Diener-Froelicher.
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